Agriculture : Interview d’Éric ALAUZET sur la transmission des biens de famille.

Rencontre avec des représentants syndicaux agricoles

 

Éric ALAUZET a rencontré dernièrement des représentants syndicaux agricoles sur  la question de la transmission des biens de famille.

Le député a à cette occasion répondu au journaliste de la Terre de Chez-nous, c’était quelques jours avant le vote définitif du projet de loi sur l’avenir de l’agriculture.

 

Éric ALAUZET (EA) : Le travail sur la loi d’avenir agricole qui va être discutée en seconde lecture à l’Assemblée a déjà permis, en première lecture, des avancées sur la question de l’accès au foncier agricole. La question de la transmission des biens de famille est une question légitime, quand on sait les difficultés existantes en ce qui concerne l’installation des jeunes – et moins jeunes – agriculteurs.

Le projet de loi d’avenir prévoit que la mise en valeur des biens agricoles reçus par transmission familiale ne soit plus soumise qu’à une demande de déclaration préalable, mais avec une condition supplémentaire par rapport à la loi de 2006 : que ces biens soient destinés à l’installation d’un nouvel agriculteur, ou à la consolidation de l’exploitation (dans la limite des surfaces fixées par le schéma directeur régional des exploitations agricoles).

Cette mesure, sensée favoriser l’installation, pose toutefois un autre problème, à savoir le risque de démantèlement des exploitations dans le cadre du droit de reprise. Ce risque repose alors sur la possibilité d’un propriétaire (souvent un des héritiers) de faire valoir ses droits de propriété pour y installer un membre de sa famille (parent ou allié jusqu’au 3ème degré inclus) en fragilisant le fermier exploitant. Aussi, l’idée serait de n’accéder aux demandes des repreneurs qu’à la condition d’avoir vérifié que la viabilité de l’exploitation du preneur en place ne soit pas remise en cause.

En règle générale, le projet de loi prévoit de favoriser la protection des terres agricoles, et le renouvellement des générations (titre II).

En deuxième lecture, nous poursuivrons notre travail d’amélioration du texte sur la question du contrôle des structures pour l’accès au foncier, afin de favoriser l’installation et les projets écologiquement et socialement positifs.

 

La Terre de chez nous (TCN) : A l’occasion de la deuxième lecture de la Loi d’avenir agricole, les professionnels vous ont notamment interpellé sur la question d’un périmètre d’interdiction de traitement. Comprenez-vous leurs inquiétudes ? Quel est votre position ?

EA : « Nous assistons à une menace pour la productivité de notre environnement agricole et naturel », c’est ainsi que les chercheurs du CNRS résument les conclusions de leur étude publiée très récemment. Ceci en raison du déclin massif des insectes – dont les abeilles ne représentent qu’une petite partie. Et l’on sait le rôle décisif qu’ils jouent dans la pollinisation, et donc leur rôle économique.

Mais ces insectes subissent la haute toxicité de certaines molécules chimiques, qui est, pour des doses très faibles, 5 000 à 10 000 fois plus sévère que celle du célèbre DDT. Je n’évoquerai pas les impacts sur la santé. Nous devons regarder la réalité en face.

Bien entendu, les agriculteurs ont fait beaucoup d’efforts pour utiliser moins de produits chimiques, mais sont-ils certains de bien connaître tous les produits qu’ils manipulent, notamment les plus récents qui, même à petites doses, provoquent de fortes pollutions. Disposent-ils de toute l’information ? L’Etat de notre environnement oblige à faire le constat des dégâts environnementaux. De ce point de vue, la responsabilité est partagée par tous les acteurs, y compris les ménages qui doivent être mieux sensibilisés sur l’usage des produits domestiques et de jardinage.

Pour autant, le Ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a répondu à plusieurs questions sur le sujet et a indiqué sa volonté de concilier au mieux préservation de la productivité agricole et protection des populations.

 

TCN : dans un deuxième temps, il était aussi question des Gaec et de la disparition des comités d’agrément ? Qu’en pensez-vous ?

EA : J’ai eu l’occasion de participer à une séance de travail organisée par la FDSEA en février dernier autour de Monsieur Chandellier, directeur du département entreprise et territoire à la FNSEA. J’en ai retenu la demande de comptabilisation d’une unité économique pour chaque actif qui dégage un revenu, dans la limite d’un seuil de trois unités économiques, bien entendu. Si cette demande concerne potentiellement 20% d’unités économiques supplémentaires, cela suppose une mutualisation avec les 80% qui en bénéficient actuellement.

En ce qui concerne la suppression des comités d’agréments des GAEC, cette mesure a été proposée dans un objectif initial de simplification de la procédure d’agrément. Toutefois, il semble que le remplacement du comité d’agrément des GAEC par une décision de l’autorité administrative doive être rediscutée dans le cadre de la seconde lecture de la loi d’avenir à l’Assemblée, notamment au regard du bon fonctionnement des GAEC.

 

TCN : Ce mardi matin, les agriculteurs se sont mobilisés en estimant que trop c’est trop. Les contraintes qui s’empilent les agacent. Vous, en tant qu’écologiste, que pouvez-vous leur dire ? Et quel est l’état de vos relations : apaisé ou tendu ?

EA : J’ai des relations régulières et approfondies avec les agriculteurs et leurs représentants comme avec l’ensemble des organisations professionnelles. Nos relations sont franches, cordiales et même souvent sympathiques.

J’avoue un petit faible pour l’agriculture pour la simple raison qu’elle répond à un de nos besoins essentiels, se nourrir, et qu’elle constitue pour moi un « champ » de réflexion sur la transition écologique (énergie, intrants, aménagement du territoire…). Ces relations régulières m’ont conduit à intervenir de nombreuses fois sur divers sujets tels les retraites, le service de remplacement, le PMBE, les campagnols et la prime à l’herbe, la fiscalité, la préservation des espaces agricoles… Aussi, je suis très préoccupé par son avenir, le maintien des paysans sur nos territoires, et l’assurance d’un revenu pour chacun qui soit cohérent avec la charge de travail.

 

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