Discours
Eric Durand - Assemblée
Plénière 20 mars 2015
Voici l’achèvement
d’un travail de longue durée, puisqu'un an supplémentaire a dû
être ajouté à l’échéance initialement prévue, pour
l’élaboration de ce CPER 2015-2020.
Un an
supplémentaire, car l’Etat occupé dans des réformes compliquées,
a dû voir et revoir, non seulement le calendrier, mais aussi tout le
cadre initial de ces contrats.
Ce CPER n’est cependant pas abouti, puisque nous ne votons que sur une partie, à laquelle s’ajouteront d’autres conventions en cours d’élaboration dans le volet territorial. Et pour finir, s’ajoutera une révision en 2017 afin de consolider les deux CPER de Bourgogne et de Franche-Comté dans un document unique lors de la fusion des régions.
Ce CPER n’est cependant pas abouti, puisque nous ne votons que sur une partie, à laquelle s’ajouteront d’autres conventions en cours d’élaboration dans le volet territorial. Et pour finir, s’ajoutera une révision en 2017 afin de consolider les deux CPER de Bourgogne et de Franche-Comté dans un document unique lors de la fusion des régions.
Le CPER 2015-2020 de
la Franche-Comté, qui s’élève à 503 millions d’euros, doit
être un document structurant de la politique régionale qui
garantit l’action budgétaire des six années à venir. Le CPER
doit refléter la vision d’avenir que nous souhaitons pour notre
territoire : protection de l’environnement, soutien à l’économie
circulaire, volontarisme sur le transport ferroviaire, priorité sur
la transition écologique et énergétique, égalité des
territoires, l'innovation, la recherche…
Nous nous apprêtons
donc à voter un CPER qui engage nos collectivités et l’Etat
jusqu’à 2020.
Les élus EELV,
s’ils sont adeptes d’une certaine forme de planification, bien
nécessaire pour conduire des investissements de long terme, sont
plus que dubitatifs sur la forme que prend cette planification avec
les CPER sur le territoire national et particulièrement en
Franche-Comté.
Outre le fait que
l’on peut considérer que cette contractualisation entre les
services de l’Etat en région et le Conseil Régional incarne une
forme de refus de décentralisation, elle nous engage sur des
financements croisés pour des investissements parfois du passé.
Déni ou refus de
décentralisation. Car en pleine discussion gouvernementale et
parlementaire sur la réforme des collectivités, les rencontres et
les arbitrages du CPER se sont réalisés comme si rien ne se jouait
en matière de redistribution des compétences.
D’ailleurs, avec
le recul et le premier vote de la loi NOTRe de la semaine dernière,
on se demande si ce fait accompli, n’était pas un aveu par
anticipation de l’échec présumé de cette loi qui ne redistribue
aucune compétence, ne simplifie rien, ni n’enlève une feuille à
cette pâtisserie qui en compte-mille. En tous les cas, qui laisse
finalement, sans aucun doute, l’institution régionale grande
perdante de cette réforme. Mais c’est un autre sujet !
C’est dans ce
contexte donc, que l’Etat propose à la région et aux
collectivités infra de « mettre au bout » afin de financer
essentiellement les grandes infrastructures réclamées, pour la
plupart d’entre elles, depuis des décennies, et toujours pas
financées. On est bien dans cette pseudo décentralisation puisque
c'est c’est à partir du mandat que le préfet est aller chercher à
Paris, que la base des discussion et des propositions s'établit.
Le CPER est en
quelque sorte devenu le choix laissé aux collectivités de financer
ce qu’elles souhaitent du désengagement de l’Etat.
Je reconnais qu’avec
cette feuille de route le travail n’est pas facile et que les
services de la Région et de l’Etat ont beaucoup œuvré pour
arriver au document qui nous est présenté.
Mais nous avons
néanmoins la responsabilité aujourd’hui d’engager cette
planification pour les 6 ans à venir, et nous savons ici, que
parfois, les engagements pris hier nous enferment dans des choix que
nous aurions voulu être autres. C’est le propre de la
planification certes, mais chaque collectivité doit conserver son
espace de liberté d’action, d’innovation et de réactivité.
Bien entendu ce CPER
comporte des engagements importants et déterminants pour l’avenir
de notre région. Le volet sur l’énergie acte nos engagements
réciproques sur l’indispensable transition énergétique, mais
n’apporte, somme toute, guère davantage que ce que la politique
déjà ambitieuse de la région, accompagnée de l’ADEME, avait
déjà contractualisé. Sur la biodiversité et l’eau, il en est de
même. Le CPER ne fait que reprendre des politiques existantes et
soutenues dans ce cas par l‘Agence de l’Eau de manière
conséquente.
Sur le « volet
université et recherche », le compte n’y est pas, puisque
les montants inscrits représentent la moitié de ceux du précédent
contrat. Ce qui est regrettable et inquiétant, alors que les
discours tenus nationalement portent la recherche et l’enseignement
supérieur comme des secteurs essentiels et prioritaires. On ne peut
que déplorer qu’en Franche-Comté si peu d’investissements
soient retenus pour cette politique fondamentale.
L’esprit du CPER,
tel que nous l’envisagions, aurait été d'engager plusieurs
partenaires sur des investissements massifs d’avenir pour
l’ensemble de notre territoire, qui n'émergeraient pas sans cet
effort de planification et de vision. Malheureusement nous sommes
passé à côté concernant l'inscription de notre territoire vers
une transition écologique en ne mettant pas au cœur de ce CPER, la
recherche, l'enseignement supérieur, la transition énergétique,
l’économie circulaire…
Mais
mon intervention porte essentiellement sur le volet mobilité de ce
contrat de plan, ma collègue Brigitte Monnet interviendra sur le
volet transition énergétique.
Ce volet mobilité
multimodale, dont on comprend d’ailleurs pourquoi il ne figure pas
dans le volet transition écologique et énergétique, tant il ne
répond pas aux enjeux de demain.
Sur
les 300,3 M€ prévus dans le volet mobilité, 214,7 M€ sont
consacrés au volet routier soit plus de 70% du volet mobilité.
Cela
donne une indication des priorités sur notre territoire ! La région
contribue à hauteur de 18%, soit 38,5M€ sur ce volet routier.
Le volet
ferroviaire, lui, se monte à 85,6 M€ avec une participation de la
Région de 35,6 M€, soit 41%de ce volet. Quant à l'Etat, il
finance à hauteur de 50M€, soit 15 M€ de plus que lors du
précédent contrat.
C’est ce qui constitue la plus-value de la part de l'Etat sur le
ferroviaire dans ce CPER.
Pour aller au-delà
du sempiternel reproche simpliste que l’on fait à EELV de vouloir
opposer route et fer, nous voulons affirmer ici que si les
investissements sur le ferroviaire ne sont pas actés dans un CPER,
ils ne verront jamais le jour tellement la mobilisation de tous est
longue à obtenir dans ce domaine. Les infrastructures ferroviaires
ne peuvent être réalisées que dans un contexte de planification où
il faut aller chercher des financeurs au-delà d’une participation
« simple » d’un service de l’Etat, mais bien mobiliser
l’opérateur SNCF/RFF ainsi que des crédits européens.
Si l’on compare
notre CPER à celui de 2 régions voisines qui ont votés le leur
récemment, on se rend compte que la Franche-Comté a déséquilibré
l’investissement sur la mobilité au profit des routes.
Ainsi le CPER de
Rhône-Alpes, qui évidemment se situe dans d’autres proportions
que le nôtre, se dote d’un « volet mobilité » de
815,6 M€, dont 28%, soit 225,7 millions d’€ pour le volet
routier, soit moins de la moitié en proportion de ce qui est inscrit
en Franche-Comté.
Le
Conseil Régional de Rhône-Alpes participe à hauteur de 10%, soit
22 M€ sur le volet routier, auquel est ajouté les 16M€ déjà
fléchés sur les routes dans le volet territorial, totalisant ainsi
38M€. En valeur
absolue, Rhône-Alpes et Franche-Comté investissent donc la même
somme sur les routes. C’est tout bonnement incroyable, quand on
connait la différence de superficie de ces 2 territoires.
Concernant la
Bourgogne, le « volet mobilité » est plus faible que le
nôtre, avec 273,1 M€, dont 37% pour le volet routier, soit 101,8
M€, et une participation du Conseil Régional de Bourgogne de 8,65
M€ soient 8% du volet routier. A comparer à nos 18%, on voit
encore où sont les priorités du territoire et du Conseil Régional.
Pour résumer sur un
autre angle, dont je vous invite à bien prendre la mesure, les
Conseils Régionaux de Rhône-Alpes et de Bourgogne ont fléché tous
deux, 36,5 % de leur volet mobilité sur le ferroviaire, la
Franche-Comté ne fléchant seulement que 11,8 %.
En voulant recaser
l'ensemble des projets routiers de l'ancien PDMI, qui lui-même
reprenait déjà des projets non aboutis du précédent CPER, l’Etat
et les collectivités concernées semblent entraîner le Conseil
Régional de Franche-Comté dans ce déséquilibre important en
faveur des investissements routiers.
Ce CPER, Etat et
régions confondus, consacre au ferroviaire, moins de 30% du « volet
mobilité » en Franche-Comté, alors que les régions voisines
y consacrent 68% en Rhône Alpes et 59% en Bourgogne.
La consommation ou
la non-consommation des crédits du précédent PDMI de ces 2 régions
n’expliquent pas entièrement cette priorité. En
effet, la Bourgogne a consommé 2/3 de son PDMI 2007-2013,
entrainant, on peut le supposer, moins de report sur son CPER
2015-2020. En revanche, Rhône-Alpes comme la Franche-Comté n’en
ont consommé qu’un tiers, et leurs volets routier ne sont en rien
comparables.
On peut d'ailleurs
s'interroger sur la sincérité de ces engagements, compte-tenu de la
hauteur des investissements programmés, et on pourrait dès
maintenant parier sur les projets qui seront réinscrits dans le
prochain contrat.
Dans ce contexte on
comprend que le compte n’y soit pas en matière d’investissement
ferré pour l’avenir. On peut retenir, que l’accessibilité aux
gares ne sera assurée qu’à 70%. De manière imagée on pourrait
dire qu’une personne handicapée sur 3 n’aura pas accès aux
quais des gares à l’horizon 2020. Ces 30% non réalisés auraient
pu être financés sur un rééquilibrage « routes ».
On peut aussi
évoquer la ligne des hirondelles inscrite de justesse dans ce
contrat avec 6 millions d’€. C'est le minimum pour ne pas mettre
la ligne en péril, car ce sont + de 40 millions d’€ qui sont
nécessaires à sa remise en état. Cette ligne Andelot - La Cluse,
reliant le Haut Jura au reste du réseau, assure autant une desserte
en terme d’aménagement du territoire, qu’elle incarne un produit
touristique, tel que vanté lors du dernier reportage des racines et
des ailes de France 3. Si la priorité avait été mise sur le fer,
nous aurions sans aucun doute pu trouver une meilleure proportion des
investissements manquants dès ce contrat de plan pour cette ligne.
Dans la même optique, concernant
la ligne du Revermont, dont nous nous réjouissons l’inscription
(24M€ à part égale Etat +région) pour sa remise en état dans ce
contrat, mais nous aurions pu aller plus vite sur l’aménagement
des voies d’évitement, en priorisant le fer à la route.
On retiendra
également la non-inscription d'un projet pourtant inscrit de contrat
en contrat depuis plus de 15 ans : celui de la mise au gabarit
B1 de la ligne du Doubs maintenant cette ligne inaccessible au fret
et interdisant les trains duplex. Le CESER a souligné également ce
manquement. Ce projet qui contribuerait pourtant à la transition
écologique de notre territoire, n'a pas eu la chance, comme les
projets d'infrastructures routières, d'être reconduit d'un contrat
à l'autre.
Bien sûr certains
aménagements routiers sont utiles et même nécessaires, mais ne le
sont-ils pas autant en Bourgogne et en Rhône-Alpes? Nous n'avons pas
fait manifestement ce travail de priorisation et d'actualisation de
projets, pour certains, bien datés.
Je terminerai mon
propos en pointant un fort désaccord concernant l'absence de
financement programmé sur les mobilités douces. Le justificatif de
cette absence tel que rédigée dans le document du CPER est assez
cocasse puisqu'il indique que :
"À
la signature du CPER, les contraintes financières fixées par le
mandat de négociation n’ont pas permis de dégager une enveloppe
financière en part État pour contribuer à la réalisation
d’aménagements spécifiques en faveur des mobilités actives. "
À noter que le CPER
de Bourgogne, comme je l'ai dit, a inscrit un volet mobilité de 30M€
de moins que la Franche-Comté, et prévoit pourtant 1,6M€ pour la
mobilité active (Etat 0,8M€ + Région 0,8M€). Il semblerait donc
que chez nos voisins bourguignons, le préfet ait su dépasser les
contraintes financières pour dégager une enveloppe, certes modeste,
sur les mobilités douces, dont les aménagements, je vous le
rappelle, sont obligatoires dès lors que des travaux routiers sont
réalisés.
Sans doute
aurions-nous pu trouver une partie de ces crédits sur ceux
programmés pour les études de la deuxième phase de la branche Est
(300 000 €), projet qui, comme vous le savez, n'est pas
inscrit dans la liste des projets de la commission « mobilité
21 » du rapport Duron.
On le voit bien, le PDMI, intégré
désormais dans le CPER, déplace totalement le centre d'intérêt de
ce CPER et vient siphonner des crédits qui auraient dû se porter
sur d'autres infrastructures et politiques. Il entraîne ce CPER dans
une vision obsolète de l’aménagement du territoire, en consacrant
43% de son budget pour les projets routiers Mais cet appendice ne
doit pas éclipser, puisque c’est de circonstance, les autres
crédits que ce contrat permet de mobiliser sur des politiques
primordiales pour l'avenir : transition énergétique, recherche,
enseignement supérieur, numérique, innovation, infrastructures
ferroviaires, protection et la restauration de la biodiversité et de
l’eau…
Nous ne nous sentons
pas solidaires des choix imprimés par l'Etat dans ce CPER, mais nous
avons noté l'évolution de certains crédits qui ont été obtenus
par la négociation sous l'égide de la Présidente de Région.
C'est pourquoi, pour
ne pas priver notre territoire de ces crédits, nous voterons ce
CPER, mais sans enthousiasme comme vous l'avez bien compris.
Je terminerai sur un
projet structurant pour notre région, en particulier d'ailleurs dans
la perspective de fusion avec la Bourgogne. Il s'agit du jardin
botanique.
Monsieur
le préfet, lors d'une réunion d'arbitrage en présence de la
présidente, du maire de Besançon et du président de l'université,
s'était engagé à contribuer à hauteur de 400 000€ sur le projet
du déménagement du jardin botanique sur le site de la Bouloie. Or
nous ne trouvons pas la traduction de cet engagement dans le document
qui nous est soumis ce jour.
Aussi,
je vous demande monsieur le Secrétaire Général, de bien vouloir me
préciser comment l'Etat va formaliser cet engagement modeste mais
déterminant pour l'avenir du projet ?
(Page
66 du doc CPER et chapitre 3225 soutien aux projets à rayonnement
régional )
Je
vous remercie
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