Trop de transparence peut-elle tuer la transparence ?
Trop de transparence peut-elle tuer la transparence ?
Il y a quelques jours un quotidien local consacrait un dossier à « l’absentéisme » des élus régionaux. Le titre en Une, les titres et intertitres en pages 2 et 3, et les formulations chocs, tout concourrait à mettre en scène la question des absences d’élus de façon démagogique voire populiste. D’une information citoyenne et transparente, sollicitée et communiquée comme telle, et malgré un contenu de l’article relativement modéré, Presse Océan aura donc fait sa troisième contribution en peu de temps à la mode de « l’élu bashing ».
Sa rédaction s’en défendra et nous dira que son objectif était de capter l’attention du lectorat sur un sujet citoyen ; mais ce type de traitement fait très clairement le jeu de ceux qui pensent « tous pourris ». Pour Presse Océan en quelques jours et trois papiers similaires, les élus c’est : cumulards, trop payés, absents.
De quoi parle-t-on ? Du bilan officiel et transparent de la présence des 93 conseillers régionaux depuis le début de leur mandat en 2010. Bilan transmis à la rédaction de Presse Océan à sa demande.
Pourquoi ? Parce que le Conseil régional des Pays de la Loire est l’une des seules grandes collectivités françaises à avoir mis en place un système de suivi et de sanction financière en cas d’absences trop fréquentes des élus.
Comment ça marche ? Le système est rigoureux. A partir de trois absences par trimestre, l’indemnité d’un élu est diminuée de 25% pour le trimestre suivant, ce qui représente environ 1500 euros en trois fois.
Quel est le bilan de ce dispositif ? Il fonctionne rigoureusement et s’avère très efficace. 8 élus la première année, 3 la seconde et seulement 1 la troisième, ont été ainsi pénalisés. Sur 93 élus ! La vérité est donc toute autre que ce que laisse croire la présentation délibérément tendancieuse faite par Presse Océan.
Alors, il est vrai que sur 12 pénalités, 11 concernent des élus de l’opposition régionale (UDI, UMP ou MPF). Mais nous ne voulons en aucun cas en faire un sujet de polémique. Il est évident, au conseil régional comme dans d’autres collectivités, que le rôle d’un élu d’opposition est moins dense et moins passionnant que celui des élus de la majorité, qui sont associés à tous les travaux préparatoires dans la définition et la mise en œuvre des politiques publiques. Nos collègues de l’opposition sont donc plus nombreux à être concernés par ces pénalités, mais ils ont voté ce règlement avec nous, à l’unanimité, et en acceptent tous, de bonne foi, le principe.
Faute d’un travail d’enquête honnête et complet, qui aurait pu comparer méthodiquement le système régional avec ce qui se fait ailleurs par exemple, Presse Océan a cédé à la facilité. N’hésitant pas à décerner des « bonnets d’âne » (avec quelle légitimité ?), y compris avec des élus en photo et jetés en pâture alors qu’ils ne sont pas les plus concernés…
Pour conclure, et pour réfléchir… Une récente enquête réalisée par IPSOS a mis en avant la réalité des ruptures très inquiétantes entre les français, leurs représentants et certains corps intermédiaires. 72% des français considèrent que « le système démocratique français fonctionne mal », pire ils sont 62% à considérer que « la plupart des élus sont corrompus ». Mais ils sont aussi 58% à considérer que « les médias français font mal ou très mal leur travail », et 72% que « les journalistes sont coupés des réalités et ne traitent pas des vrais problèmes des français »…
Au-delà des opinions, ou des appartenances partisanes, les élus républicains savent que la perception par les citoyens de leur action est aujourd’hui très critique. Et, pour l’essentiel, très injuste. La reconquête collective de l’opinion passe pour une part par une grande transparence sur leur action et les conditions d’exercice de leur mandat. Et par un relai médiatique.
En tirant dans le dos des élus qui jouent le jeu de la transparence, Presse Océan se tire aussi une balle dans le pied.
Alain Gralepois
Jean-Philippe Magnen
Philippe Denis
Yann Helary
Présidents des 4 groupes de la majorité régionale