[C_PRESSE] Adoption de la loi Biodiversité : une étape historique, des marges de progrès
L’Assemblée nationale a voté, le 24 mars 2015, en 1ère lecture et à une large majorité, la loi relative à la biodiversité dite «Loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages». Réaction de Sophie BRINGUY, vice-présidente du Conseil régional en charge de l’Environnement.
« C’est la première loi de cette envergure votée en France sur les enjeux de biodiversité depuis 1976. C’est historique, le symbole est fort. Il montre que la biodiversité est un enjeu majeur. Je rappelle simplement que les scientifiques ont évalué que 40% de notre économie dépendait directement des services éco-systémiques rendus par la nature. Au-delà de toute sensibilité environnementale, la biodiversité est donc un sujet sérieux, pour tout le monde.
Depuis la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM), les Conseils régionaux ont été désignés comme chefs de file en matière de biodiversité. Ils sont donc tout particulièrement concernés par ce projet de loi. Malheureusement, il ne permet pas de clarifier le périmètre de ce chef de filât, et ne donne pas aux Régions de moyens dédiés pour l’exercer avec l’ambition nécessaire, comme aurait pu le permettre le transfert d’une partie de la taxe pour les espaces naturels sensibles aujourd’hui dédiée aux seuls Départements. C’est à l’image de l’ensemble du projet de loi, dont nombre d’acteurs relèvent le manque d’ambition en termes de moyens financiers.
Un point important du projet de loi pour les Régions concerne la territorialisation de l’Agence Française de la Biodiversité (AFB). L’Association des Régions de France s’est mobilisée pour que l’AFB ne soit pas hors-sol et travaille avec les territoires. Le projet de loi prévoit ainsi que l’AFB pourra mettre en place des délégations territoriales, dont la formalisation devra prendre en compte l’existant et intégrer notamment les collectivités territoriales. En effet, celles-ci n’ont pas attendu la création de l’AFB pour agir, chaque territoire a son histoire, et elle doit être prise en compte.
Le projet de loi comprend aussi un certain nombre d’avancées en matière de Parcs Naturels Régionaux. Ainsi, les Chartes ne seront révisées que tous les quinze ans, ce qui représente un cycle beaucoup plus adapté à la vie des Parcs. Et puis, les aménagements pour l’adoption des Chartes réduit les risques de vétos de territoires en opposition au projet et permettra de travailler plus sereinement, sur des périmètres plus cohérents.
Le projet de loi intègre également des avancées intéressantes sur la gouvernance de l’eau, qui intéressent notre Région, qui s’est fortement engagée pour améliorer la qualité de l’eau et des milieux aquatiques. La composition des comités de bassin, qui influent directement sur les choix des agences de l’eau, a été modifiée pour faire une plus large place aux représentants des consommateurs, pêcheurs, associations de défense de l’environnement. Dans le mouvement, cinq amendements ont été adoptés : ils touchent à la transparence des aides financières qu’accordent les agences de l’eau, à la prévention des conflits d’intérêts en leur sein, voire à l’impossibilité d’y participer pour certains porteurs de casquettes multiples. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Enfin, le vote de l’amendement sur l’interdiction totale des néonicotinoïdes à partir du 1er janvier 2016 représente un grand espoir pour la biodiversité et pour la survie des insectes pollinisateurs, alors que ces insecticides sont clairement mis en cause dans l’effondrement des colonies d’abeilles observé depuis 20 ans. Rappelons que l’année 2014 a été une année noire pour les abeilles, avec une mortalité allant de 30% à 60% dans certains départements.
Personnellement, je regrette toutefois que l’article visant à étendre à l’animal sauvage les sanctions pour sévices prévues par le code pénal, ait été retiré du texte, par le vote d’amendements identiques de députés UMP, PS, PRG, Front de Gauche. Pourquoi un animal sauvage serait-il moins respectable qu’un animal domestique ? Ce blocage sur le caractère sensible de l’animal sauvage est d’une autre époque. Il serait temps que les élus qui ont soutenu cette position fasse leur entrée dans le XXIème siècle ! »