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  1. La Philharmonie, nouvelle gabegie (Tribune de Danielle Fournier, coprésidente du groupe des élu/es EELV de Paris)

    Alors qu’un rapport du sénateur (UMP) Yann Gaillard pointe la dérive financière du projet de salle dédiée à la musique classique à La Villette, Danielle Fournier, coprésidente du groupe Europe Ecologie Les Verts au Conseil de Paris, plaide pour une politique culturelle de proximité.


    Décidément, à Paris, cette deuxième mandature se distingue par plusieurs dérives budgétaires inquiétantes. En ce en pleine crise de la dette publique.

    En matière d’urbanisme, la rénovation des Halles se distingue par la bientôt célèbre Canopée : un toit pharaonique en plein cœur de Paris, estimé au départ à 120 millions d’euros, qui coûtera au final à la Ville près du double, sans que son intérêt soit pour l’heure expliqué. Dans le domaine sportif, la reconstruction du stade de rugby de Jean-Bouin coûte près de 200 millions d’euros. Quant à la politique culturelle, elle sera désormais marquée par la Philharmonie.

    Le sénateur UMP Yann Gaillard –que l’on ne soupçonnera pas d’antisarkozysme– a rendu public le 22 octobre un bilan financier accablant pour le projet culturel lancé par le précédent gouvernement, qui a bénéficié du soutien sans réserves de notre municipalité. La salle Philharmonique, grand équipement prestigieux prévu à la Villette pour accueillir une grande salle de concert dédiée à la musique symphonique, tourne au gouffre financier : l’addition, annoncée à 170 millions d’euros lors de la commande, avoisine désormais les 400 millions. Cette dérive est d’autant plus grave que l’utilité du projet n’est toujours pas démontrée : comme les écologistes l’ont déjà maintes fois répété en Conseil de Paris, créer cette grande salle spécialisée à côté de la Cité de la Musique relève davantage du rêve mégalo que du souci de favoriser la pratique culturelle à Paris. La capitale compte déjà au moins deux salles dédiées en partie à la musique symphonique : le nouvel auditorium de Radio France et le théâtre des Champs-Élysées ; par ailleurs d’autres salles proposent en partie une programmation musicale classique ou lyrique : le théâtre du Châtelet, l’opéra Bastille, l’opéra Garnier, l’opéra Comique, la salle Gaveau, ou encore la salle Pleyel… Les capacités d’accueil dans ces équipements fluctuent entre 1000 et 2000 spectateurs, ce qui est tout à fait raisonnable pour recevoir des concerts internationaux de musique classique.

    Parmi les autres points noirs de ce projet, le rapport du Sénat stigmatise une gouvernance défaillante et un calendrier retardé de 24 mois. Le maire n’aura même pas l’opportunité d’inaugurer en fonction ce chantier, qui aurait pourtant dû émerger dès cette année.

    Pour les écologistes, le projet est d’autant plus contestable qu’il a été présenté –à tort– comme un projet métropolitain. Une fois de plus, comme pour l’extension du tournoi de Roland-Garros, Paris promeut la métropole dans son discours mais continue dans les faits d’accaparer les projets de prestige sur son propre territoire.

    Plus grave, cette politique se mène au détriment des associations culturelles de terrain, touchant un large public de proximité, qui elles subissent de sérieux tassements dans leurs subventions, voire des coupes « pour raisons budgétaires ». Le Lavoir moderne parisien (LMP), lieu emblématique de la scène artistique du XVIIIe arrondissement, en a subi l’amère conséquence en avril dernier. Trop peu soutenu par la Ville, il a mis la clé sous la porte. La Ville rechignait depuis plusieurs années à lui accorder 40 000 euros par an.

  2. Budget culture et communication pour 2013

    On sauve les meubles, mais ou est le projet ?

    Le Projet de Loi de Finances prévoit une diminution de son budget de 4,33% en 2013, soit 110 millions d’€, puis –2,06% en 2014 et – 1,26% en 2015 soit une diminution totale de 7,48% en 3 ans. Si on ajoute la stagnation budgétaire de l’année 2012 et l’inflation des années à venir, le budget culture aura perdu 12 % à 15 %  des ses moyens d’ici à 2015.

    C’est un resserrement des crédits sans précédent dans l’histoire du Ministère de la Culture, qui ne correspond pas aux engagements du Président de la République de sanctuariser le budget de ce Ministère. C’est un signe fort, qui n’est pas positif, pour une économie bien mince au regard du budget global de l’Etat, la Culture en constituant moins de 1% !

     

    Nous réaffirmons que la Culture, au même titre que l’Education, la Justice et la Santé, doivent être des secteurs préservés des politiques de rigueur et d’austérité, ils constituent des biens communs porteurs de droits inaliénables.

     

    Cependant, les mesures prises pour atteindre les objectifs d’économie touchent et préservent des domaines importants de la politique culturelle de façon relativement équitable, et nous apprécions qu’il soit d’abord question de :

    • Préserver l’éducation artistique, les effectifs et moyens des écoles supérieures d’art, les interventions de l’état en faveur de la création notamment dans le spectacle vivant et les arts plastiques
    • Abandonner et/ou reporter les grands projets, la plupart pharaoniques, coûteux et décidés sans concertation. Nous espérons que ces décisions enterrent les  politiques de « grands projets » décidées par un pouvoir politique omnipotent. Pour les projets passés et futurs, nous souhaitons des études au cas par cas, avec tous les acteurs concernés, au titre de priorités politiques claires, sourcées et transparentes.
    • Rééquilibrer la politique d’investissement patrimonial au profit des régions
    • Faire porter les économies  sur les grands opérateurs du MC, de façon différenciée.

     

    Toutefois, le Ministère ne semble pas apprécier et assumer complètement ce que cette dernière mesure comporte comme obligations de sa part par rapport aux opérateurs sous sa tutelle. On ne peut pas simplement prélever des fonds sur les grandes institutions publiques, d’autant plus que le niveau élevé et continu de ce prélèvement sera très déstabilisant, sans réviser en même temps la politique et les priorités des établissements. Il n’y a pas d’économies possibles, au niveau demandé dans ces entreprises, qui n’étaient pas et ne sont toujours pas des lieux de gabegies, sauf sur les rémunérations parfois démesurées de certain dirigeants d’établissement. Il faut des réorganisations profondes, des redéfinitions des missions, des réorientations sur les activités les plus efficaces et les plus pertinentes. Laisser les directions d’établissements se « débrouiller » revient à leur laisser choisir soit l’augmentation des tarifs (solution la plus courante), soit la diminution de l’activité (moins de spectacles, de créations, d’expositions…), soit la réduction des emplois, ou un peu des trois. Réduire les moyens ce n’est pas seulement un décret, c’est un redéploiement de l’intelligence.

     

    Maintenir les obligations, Contrat d’Objectifs et de moyens, de performance et continuer la politique de gel de certaines parties des subventions de fonctionnement et d’investissement sont des injonctions contradictoires et un non-sens s’il n’y a pas un accompagnement stratégique. Le Ministère doit s’occuper des entreprises qu’il déstabilise, aider à trouver des solutions, ouvrir des perspectives d’activité pouvant compenser les pertes de revenus,  et non pas les mettre au ban des accusés.

     

    A ce titre nous considérons que les messages envoyés à France Télévision, tous négatifs, sont  très inquiétants. On ne peut mettre  une entreprise dans une équation économique impossible : Avoir « à demi » supprimé la publicité, en principe remplacée par les crédits d’Etat, puis supprimer une partie de ces crédits, alors même que le restant de son marché publicitaire chancelle, et qu’on la ballote de réformes organisationnelles en réformes organisationnelles contradictoires ne peut que mener à un désastre. Ainsi, pas de publicité, mais pas de progression de la  redevance non plus, plus d’obligations à observer (par rapport à la création, aux spectacles de qualité), mais des économies à faire, de l’indépendance mais pas d’autonomie stratégique (refus des antennes régionales de plein exercice pour France 3 et France O), pas de course à l’audience mais du pluralisme de l’information face à Bouygues/TF1 et des équipes jugées sur…leur audience (contrats d’objectifs et de moyens), du media global et des revenus supplémentaires, mais interdiction d’exploiter les droits des émissions produites qui appartiennent au secteur privé, notamment via les animateurs producteurs, 180 millions à économiser, mais pas de plan social (qui serait équivalent à celui de PSA en traduction brute, etc…). Comment mieux étouffer le service public qu’en le mettant dans un faisceau de telles incohérences ? Ignore-t-on que les grands groupes audiovisuels européens cherchent déjà à exclure les services publics des marchés pour garder pour eux toute la « disponibilité cérébrale » ? Nous avons là-dessus quasiment un devoir de salubrité publique.

     

    Dans la rubrique des faits inquiétants nous notons aussi la poursuite des nominations « du fait du prince » comme celle du futur directeur de l’Opéra National de Paris, nommé dans l’opacité, sans que les principaux acteurs soient consultés, sans que l’on ne connaisse quelque chose de son projet, qui pourtant devra s’inscrire dans une réduction budgétaire drastique, et en piétinant la limite d’âge …cela augure mal de l’avenir. Cela aurait pourtant été une occasion de partager une vision et de redéfinir le rôle de l’art lyrique et de l’ONP. C’est une opportunité manquée, et c’est dommage.

     

    Rappelons à ce sujet que l’une des politiques prioritaires devrait être celle du rééquilibrage paritaire : les femmes dirigeantes d’établissements culturels sont une infime minorité, en complet décalage avec l’évolution de la société.

     

    Nous, écologistes, sommes inquiets et déçus. Le changement de politique culturelle signifie pour nous des remises en causes profondes des acquis, du centralisme, de l’orientation « prestige » des moyens alloués au détriment de politiques plus soucieuses des citoyens. Nous souhaitons une vraie décentralisation des moyens sur les territoires, un vrai changement du mode de gouvernance (agenda 21, démocratisation des instances de décision), la reconnaissance des droits culturels comme fondement des politiques culturelles. Encore une fois, ce sont les options financières qui tiennent lieu de politique, là où, justement, les nécessités économiques, loin d’être considérées comme anodines, pourraient servir de levier pour modifier notre façon de concevoir l’action publique de l’Etat en faveur de la création, de l’action artistique et de la Culture.

     

    Nous ne pleurons pas aujourd’hui sur la diminution de moyens, mais sur l’étroitesse de la vision.

  3. Prix Tournesol Avignon 2012

     

    Prix écologique du spectacle vivant

     

    Remise des Prix :

    Avignon (84) – Jeudi 26 juillet 2012

    Maison Jean Vilar – 8 rue Mons

    à 16h30

     

     

    Le Prix Tournesol du Spectacle Vivant est un prix de l’écologie attribué à des spectacles présentés dans le Off, pendant le festival d’Avignon, traitant, promouvant ou questionnant des thématiques essentielles quant à l’avenir de l’homme sur cette planète, tant dans sa relation à son environnement qu’à l’encontre de ses semblables.

    L’écologie telle qu’envisagée par les militants écologistes et/ou amateurs de spectacle vivant constituant le jury est conçue selon une vision large, politique et sociale : à la défense stricte de l’environnement s’ajoutent les valeurs de décroissance solidaire et de justice sociale, d’économie solidaire, de citoyenneté, de solidarité Nord-Sud, de défense des minorités et d’antiracisme, de pacifisme et non-violence, de lutte contre les exclusions et pour l’égalité des droits…

     

    Pour sa quatrième édition, (passage de 50 spectacles vus en 2006 à plus de 110 en 2011), le TOURNESOL conserve ses trois trophées (+1) : LE tournesol, le prix Jeunes Pousses, le prix Saltimbanques, ainsi qu’un prix spécial du jury « coup de cœur ». La remise des prix aura lieu le Jeudi 26 juillet à 16 h 30 à la maison Jean Vilar.

     

    Porteur du projet : Association 5’HOP – Contact : 5hopasso@gmail.com / 06.88.12.56.75

    Les partenaires : Affabuloir (Chateaurenard) – Brina webb – EELV Avignon  – Greenpeace 84 – Maison Alternative et Solidaire (Avignon) –  Pluriel Nature – Volubilis (Avignon)

     

  4. ACTA rejeté : une grande victoire pour une Europe parlementaire et démocratique

    Ce mercredi 4 juillet, le Parlement européen vient de rejeter le projet de traité ACTA avec 478 voix contre, 39 pour et 165 abstentions.

     

    Europe Ecologie Les Verts se félicite de cette grande victoire pour les droits et libertés des citoyen/nes europée/nes et souligne son ampleur, illustrée par un rejet massif et significatif de ce projet, suite à une mobilisation sans précédent de la société civile.

     

    Pour Sandrine Bélier, députée européenne EELV, membre de la Commission des Pétitions et de l’Internet Core  Groupe : « La bataille menée par les écologistes et de nombreuses associations depuis 3 ans contre ce traité, qui  faisait peser de lourdes menaces sur le respect des droits et libertés fondamentales des citoyen-nes, mais  également sur l’accès aux médicaments ou le libre exercice de leur activité par les agriculteurs, s’achève par une victoire. »

    « En rejetant ce texte, qui aurait bloqué toute réforme du droit d’’auteur en Europe en imposant comme seule alternative possible une répression accrue du droit de la propriété intellectuelle sans tenir compte des droits des citoyens ou des besoins des entrepreneurs du secteur numérique, c’est un nouvel espace de réflexion et de débat nécessaire qui s’ouvre. »

    Europe Ecologie Les Verts réaffirme que le libre accès à la santé, aux savoirs et au partage est un droit universel, tout comme l’accès à l’Internet libre et ouvert est un droit fondamental. EELV appelle à entamer le processus d’une réforme positive du cadre européen du droit d’auteur et de la propriété intellectuelle.

    Elise LOWY, Jean-Philippe MAGNEN,
    Porte-parole

  5. Osons l’économie sociale et solidaire pour la culture !

    Des alternatives économiques pour la culture

     

    Avignon (84), Mercredi 18 juillet 2012

    Cour de l’Université – 74 rue Louis Pasteur

    de 9h30 à 12h30

     

    La table ronde invite économistes, sociologues, artistes, syndicalistes, banquiers, responsables publics à échanger sur les pratiques et les innovations en matière d’économie sociale et solidaire pour la culture.

     

    Intervenant/es :

    Patrick Viveret, conseiller d’Etat, auteur de « Reconsidérer la richesse »

    Réjane Sourisseau, co-directrice d’Opale/CNAR Culture

    Philippe Berthelot, président de l’UFISC – Union fédérale d’intervention des structures culturelles

    Julek Jurowick, fondateur et directeur de SMart Belgique (TBC)

    Marco Félez, directeur du cluster Articulteurs, Pays de Redon et Vilaine.

     

    Grands témoins : Dominique Voynet, Maire et Emmanuel Cuffini, Adjoint à la Maire à Montreuil

    Animation : Pascale Bonniel Chalier, consultante la terre est ronde.

     

    Dans le prolongement des Assises de la culture conduites de juin 2011 à mai 2012, la Ville de Montreuil organise une conférence pendant le Festival d’Avignon de juillet 2012. Cette conférence se donne pour objectifs de :

    • réunir des professionnels du spectacle vivant, des représentants d’associations culturelles et de mouvements d’éducation populaire, des responsables publics – élus, DAC, syndicalistes, – … ;
    • accueillir les membres des collèges des Assises et les professionnels de la culture présents pendant le Festival d’Avignon ;
    • valoriser la démarche des Assises de manière institutionnelle ;
    • aborder des thèmes nouveaux qui répondent aux défis de demain qui rendent compte de l’ambition partagée pendant les Assises ;
    • expérimenter de sujets qui seraient repris lors d’une convention sur le territoire montreuillois dans les années qui viennent et permettrait à Montreuil de se distinguer dans le concert culturel des villes françaises et européennes.

     

    En Europe, la culture représente 2,5% du PIB avec un taux de croissance bien supérieur à la moyenne des autres secteurs économiques. Le 1er poste à l’exportation de l’économie nord-américaine demeure encore aujourd’hui l’audiovisuel et le cinéma. Si les industries culturelles et de la communication raflent la mise en la matière dans ces deux régions du monde, suivant la dynamique des « oligopoles à frange », le nombre des emplois « artisanaux » continuent de progresser dans les secteurs du spectacle, des arts visuels, du patrimoine et plus globalement des services culturels. Emplois non délocalisables et à haute valeur ajoutée, mais fragiles et précarisés par des cadres de travail de plus en plus insécurisés.

    Partout, les modèles économiques pour la culture subissent des transformations profondes. En France, la fragilité de l’assurance chômage pour les intermittents du spectacle et de l’audiovisuel, le resserrement des fonds publics, les baisses de mécénat d’entreprise, la crise de sens que traverse la politique culturelle nationale obligent les communautés artistiques à penser autrement leurs modalités de production et de diffusion. Des nouvelles formes d’organisations se dessinent : micro-mécénat, micro-crédit, apports du numérique, souscriptions, mutualisations et coopérations, solutions de gestion informatisées, fonds de garantie, grappes d’entreprise, cellules partagées de recherche et développement, …

    Ces dispositifs s’appuient sur un rapport renouvelé aux publics et aux usagers qui deviennent bailleurs et acteurs du circuit économique et sur une volonté de changer de paradigme pour une politique culturelle qui contribue à un autre projet de civilisation. Les alternatives entre « le tout marché et le tout public » s’ouvrent, des solidarités s’opèrent localement et globalement et mobilisent expériences et réflexions en France et dans le monde.

     

  6. La souffrance au travail dans le spectacle vivant

    Situations vécues et possibilités d’action

     

    Café-travail Europe Ecologie Les Verts

    Avignon (84) – Mardi 17 juillet 2012

    Cinéma Utopia – 4 rue des Escaliers Sainte Anne

    de 10h à 13h

     

    Organisé par EELV et la Générale d’Imaginaire

    La souffrance au travail n’épargne pas le spectacle vivant mais le phénomène est rarement évoqué. Avec ce moment participatif, nous voulons débattre des réalités vécues et des actions à mener pour préserver un travail de qualité et la santé des professionnels.

     

    Intervenants :

    Isabelle Rogez (ergonome)

    Marion Le Guerroué (administratrice)

    Stéphane Gornikowski (directeur)

    Pierre Boudeulle (metteur en scène)

     

  7. L’élu et la censure : la liberté de création dans les collectivités locales

    Journée de formation pour élu/es et collaborateurs d’élu/es locaux

     

    Avignon (84), Lundi 16 juillet 2012

    AJMI – 4 rue des Escaliers Saint-Anne

    de 9h30 à 16h30

     

    Bulletin d’inscription

     

    Comment définir la liberté de création ? Quel est le rôle de l’élu-e face aux œuvres ? Comment répondre aux demandes de censure des administré-es et des associations ? Que dit le droit ? Cet atelier permettra de répondre à ces questions en se basant sur des exemples concrets.

     

    Objectifs :

    Comprendre le lien entre liberté d’expression et liberté de création

    Identifier la place des élu-es face à la censure

    Connaître les éléments juridiques sur lesquels s’appuyer

     

    Intervenant/es :

    Gilles MANCERON, fondateur de l’observatoire de la liberté de création

    Greg GERMAIN, AF&C président du festival Off d’Avignon

     

    Pré-programme :

    Matinée

    Introduction : comment définir la liberté de création ? Historique sur les questions de liberté d’expression dans le domaine de la culture

    Les cas de censure du fait des collectivités locales : les oeuvres concernées et les arguments invoqués

    L’élu-e face aux demandes de censure : la question de la protection de l’enfance et de la sexualité, le rôle des associations

    Accès aux oeuvres et nature du public

    Que dit le droit ? Eléments juridiques à destination des élu-es

     

    Après-midi

    Présentation du festival Off

    La liberté d’expression et de création à Avignon

    La relation entre les artistes et leurs financeurs

     

    Contexte :

    La liberté de création n’est prévue dans aucun texte de loi, aucun instrument juridique ne l’a pensée. La liberté d’expression est bien consacrée depuis plus de deux siè-cles par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, mais on ne trouve pas la moindre référence aux oeuvres, ou à l’art, dans cette déclaration. Or les oeuvres font débat. Et ce débat se déroule de plus en plus devant les tribunaux, la loi se montrant sans cesse plus contraignante et répressive. Qui doit juger les oeuvres et selon quels critères ?De l’élu qui décide d’interdire telle exposition à la commission de classification des films qui applique des critères ouvertement subjectifs, la littérature, les arts plastiques, la chanson, le cinéma sont désormais passés au prisme des opinions de chacun, religieuses, morales, politiques.

    Agnès Tricoire.

  8. Musées municipaux : une réorganisation sous vigilance

     

    Communiqué de presse du groupe EELVA – 20 juin 2012

     

    En Conseil de Paris, la délibération SG 153 / DAC 506 a créé un établissement public des musées, une étape qui participe de la modernisation progressive de la gestion des musées municipaux.

     

     

    « Les objectifs affirmés par cette réforme, en termes de fréquentation des établissements, de réponse aux attentes des visiteurs (confort, médiation culturelle), d’enrichissement des collections notamment, nous semblent aller dans le bon sens » a salué Danielle Fournier, coprésidente du groupe EELVA. « En particulier, la préservation de l’emploi de 951 personnels des musées, avec les conditions d’emploi acquises, est une réelle satisfaction ».

     

    Deux dimensions de cette réorganisation suscitent cependant des réserves :

    • Aucune place n’est faite aux usagers dans les instances prévues, au grand bénéfice des habituels « experts » et des « personnalités qualifiées »

     

    • Une vigilance toute particulière devra être accordée au respect de l’autonomie des établissements, dont les formats et les projets scientifique et culturel sont très variables, tout en articulant chacun avec la politique globale de l’établissement public administratif.

     

    Contact presse :

    Julien Bonnet – 01 42 76 58 47 / 06 82 29 32 94

    elus.paris-eelv.fr

  9. Intermittence et permanence des emplois

     

     

     

     

     

     

     

    INTERMITTENCE

    L’intermittence du spectacle fut créée à l’origine pour les seuls salariés de l’industrie cinématographique, à la demande du métier  afin de disposer à tout moment et en toute tranquillité “sociale” de techniciens que la production ne pouvait ou ne souhaitait pas embaucher de manière permanente ou en CDD, mais uniquement en fonction de projets temporaires de production.

    En étendant le système à tous les secteurs (spectacle vivant et enregistré) et aux artistes et techniciens, en créant un type de contrat particulier et en fixant le niveau de travail ouvrant les droits à 507 heures, le système d’emploi du secteur est devenu hyper-flexible. Pour compenser cette hyper-flexibilité, il a été mis en place un système assez efficace de protection des travailleurs du secteur encadré par les  annexes 10 et 8 du chômage. Mais ce système, dont les recettes n’ont pas été adaptées aux dépenses et surtout à l’évolution de celles-ci, ne peut générer que des déficits, actuellement pris en charge principalement par l’interprofessionnalité.

     

    Déficit structurel

    L’intermittence est un des éléments essentiels des équilibres économiques du spectacle ; ce dispositif spécifique doit absolument perdurer. Cependant, le déficit structurel du régime spécifique (les annexes 8 et 10) met en péril sa pérennité dans le cadre de l’assurance chômage.

    Les partenaires sociaux qui gèrent l’Unedic – garants de l’équilibre et de l’équité générale du système – sont de plus en plus réticents à absorber des charges dérogatoires du droit commun. Les annexes spécifiques, pas plus celles des intermittents que celle des intérimaires, ne peuvent équilibrer cotisations et prestations que par la solidarité interprofessionnelle.

    L’augmentation d’activité crée une augmentation de chômage. Comme le secteur est en croissance, il crée des potentialités d’emploi, mais comme il est flexible, c’est à dire qu’on y partage les emplois,  un emploi va être occupé par 2, 3, 4 personnes ; autrement dit, on crée 2,3,4 « chômeurs » partiels inscrits au chômage « intermittents ». Donc, plus il y a de croissance, plus il y a de travail, plus il est partagé, plus il y a chômage, plus le régime des intermittents est déficitaire.

    Avec l’annulation des festivals en 2003 et la réforme de l’intermittence dans la suite, le système a été globalement préservé. Mais  nous sommes aujourd’hui à un niveau de l’emploi intermittent égal et même supérieur à celui d’avant la réforme de 2003 (la croissance a continué), sauf que, certaines indemnisations s’étant améliorées, le déficit est encore plus important (800 M€ en 2003, 1,2 Md d’Euros en 2010).

     

    EFFETS PERVERS

    En fait, l’intermittence du spectacle est une subvention  déguisée ; le coût de cette subvention est supporté par les seuls employeurs et employés (Unedic) des autres secteurs professionnels, dont certains sont en récession, et non pas par les employeurs concernés du secteur culturel qui est, lui, en croissance. De grandes parties de la population – fonctionnaires, retraités, agriculteurs, professions libérales – ne participent pas à ce subventionnement. Ce fonctionnement produit plusieurs effets assez pervers.

    • Créer des spectacles « en temps chômé » est la logique évidente de tous ceux qui sont indemnisés sans travailler ‘officiellement’. Faire une création en résidence, dont les coûts de répétitions sont de fait pris en charge par Pôle emploi, peut s’avérer moins cher pour un théâtre que de programmer un spectacle en diffusion. Le système est donc contreproductif pour toute diffusion de spectacles, ce qui explique en partie que le temps d’exploitation est de plus en plus court, que les tournées en dehors des coproductions et préachats deviennent de plus en plus rares.
    • Dans la volonté de diminuer les coûts de l’intermittence, sont exclus de plus en plus d’artistes, souvent les plus faibles et les nouveaux candidats à l’emploi, les jeunes, les plus âgés, les femmes…

     

    Par contre, de nombreux employeurs, surtout ceux qui embauchent régulièrement et qui embauchent beaucoup d’intermittents comme l’industrie cinématographique, et certaines catégories d’employés, notamment les plus installés dans les métiers, profitent d’un système largement perverti :

    • transformation d’intermittents en « permittents » (ceux qui travaillent 5 jours par semaine mais qui ne sont payés que pour 1-2 jours, le solde étant pris en charge par le chômage) ;
    • transformation d’emplois permanents en intermittents (cela coûte moins cher) ;
    • optimisation excessive du système d’indemnisation et du salariat.

     

    Rééquilibre nécessaire

    Si la responsabilité de l’équilibre des comptes sociaux est – et doit rester – celle des partenaires sociaux, on peut néanmoins suggérer des pistes de travail pour résoudre les contradictions d’un système généreux, mais fragile, dans lequel la part de la rémunération du travail diminue au profit de l’indemnisation du chômage.

    Au-delà d’une réduction du déficit, ce qui doit guider la réflexion, c’est la recherche de solutions complémentaires susceptibles de :

    • réduire les précarités et la paupérisation des métiers artistiques
    • prendre en compte la pluri-activité (de métiers et de statuts) des professionnels de l’art et de la culture
    • établir une équité de rémunération des emplois entre les divers acteurs de la création artistique (auteurs, interprètes, techniciens…)

     

    Externalités négatives

    On ne peut avancer résolument sur la recherche de nouveaux équilibres en s’arc-boutant sur « les 507 h en douze mois » car, alors, on laisse le marché décider de qui est artiste ou non. On ne parviendra à résoudre les problèmes que dans un cadre plus large que celui de Pôle-emploi.

    Les ressorts d’un meilleur équilibre du système repose sur trois catégories d’acteurs :

    • les partenaires sociaux des branches concernées (spectacle vivant et audiovisuel), à qui il devrait appartenir de définir les critères professionnels permettant l’entrée et le maintien dans ce dispositif dérogatoire, tout en améliorant les comptes du régime, en en prenant également la responsabilité financière.
    • les employeurs qui ne devraient pouvoir recourir aux CDD d’usage que pour l’embauche d’artistes et de techniciens dont l’activité, réellement discontinue, s’exerce dans le cadre de projets « sur et pour le plateau » ainsi que pour la transmission du savoir des artistes dans le cadre des ateliers et sensibilisations en lien avec des représentations ou dans le cadre de l’enseignement artistique piloté par l’Education Nationale et des Ecoles artistique labellisés par l’Etat.
    • les collectivités publiques – et particulièrement l’État – à qui il appartient de vérifier le respect des droits sociaux, particulièrement dans les établissements qu’elles contrôlent et pour les services qu’elles commanditent (achats de spectacles ou de films…).

     

    INTERVENANTS CULTURELS

    Les artistes interprètes (danseurs, comédiens, musiciens…) sont considérés comme intermittents du spectacle lorsqu’ils sont sur scène, en travail de répétition ou représentation. Il est de plus en plus fréquent que les artistes, en périphérie des spectacles, soient sollicités pour animer des débats, ateliers, master class… Ces activités n’entrent pas dans le cadre du statut d’intermittent mais dans celui de vacations d’intervenant culturel ou encadrement pédagogique.

    Bien que résultant d’un travail artistique, ces activités ne sont pas considérées comme ayant un lien avec le spectacle. Le statut d’intermittent du spectacle, comme son nom l’indique, concerne les activités du spectacle et non de l’art. Les artistes ne sont, d’ailleurs, pas forcément des intermittents du spectacle.

    Un intermittent du spectacle peut donner 55 heures de cours par période de statut, qui sont comptées comme heures pour valider son statut d’intermittent, à condition de les dispenser dans les institutions d’enseignement agréées par l’Etat. Sont exclus les ateliers en milieux scolaires, pour une municipalité, association, etc.

    L’intermittent peut faire plus d’heures de cours, mais elles ne sont pas validées au delà de 55 et lui font perdre son statut s’il fait plus d’heures de cours que de spectacle.

    Nous demandons que ces activités fassent pleinement partie du métier d’artiste et soient donc comptabilisables pour les intermittents du spectacle. Émanant d’une démarche artistique à part entière, elles doivent être déclarées comme telles ! Les qualifier d’« enseignement » pour les exclure des activités de « création » est incohérent.

     

    NOS DEMANDES

    Il faut  répartir le coût du régime en incitant à l’emploi permanent, générateur de recettes, en augmentant les cotisations chômage au moyen d’un bonus/malus sur les cotisations chômage (plus l’emploi est court, plus les cotisations sont élevées).

    Il faut accorder une subvention uniquement aux structures et associations qui justifient en toute transparence de la nécessité de l’emploi intermittent.

    Il faut créer un lien entre coût de représentation/coût de plateau et prix d’achat des spectacles, qui doit être largement supérieur au coût du plateau.

    Il faut donner une autorisation de production, ouvrant au soutien, en condition du financement des salaires.

    Il faut que les Collectivités territoriales et l’Etat assurent et vérifient le paiement intégral des salaires des spectacles qu’ils programment.

    Nous proposons d’autres moyens pour diminuer les coûts de l’intermittence, ou une augmentation des recettes qui peuvent financer ce système, comme :

    • une taxe sur les entrées ;
    • une taxe supplémentaire sur les droits versés  par les diffuseurs (FAI, téléphonie, TV, etc..) ;
    • le développement de l’Economie Sociale et Solidaire culturelle.

    Mais de loin, l’incitation pour l’emploi permanent nous paraît la plus évidente.

     

    PERMANENCE

    Seule la transformation d’une partie du travail artistique intermittent en travail artistique permanent peut répondre aux absurdités du système actuel et :

    • faire des artistes et techniciens du spectacle vivant des employés avec un statut digne de la condition humaine, avec un droit à la retraite, et non un droit aux minimas sociaux.
    • territorialiser le travail artistique là où il y a un besoin, en permanence, dans une continuité de travail, au bénéfice des artistes et des citoyens.
    • répartir dans la durée les subventions indirectes au spectacle vivant à l’ensemble de la société française.

    Rappelons que, pour la société, un permanent du spectacle vivant ne coûte pas plus cher qu’un intermittent du spectacle vivant.

     

    Comment augmenter le nombre d’emploi permanent ?

    Nous proposons de supprimer les abattements de 25% et de 20% appliqués dans le secteur du cinéma et du spectacle vivant. Les sommes ainsi récoltées serviront à financer les coûts supplémentaires pour un employeur qui embauche un artiste ou technicien anciennement intermittent devenu permanent. Un socle de rémunération -à définir – du nouveau permanent est payé par l’employeur, une somme fixe est financée par le fonds.

    Le système d’abattement ne profite en fin de comptes qu’aux employeurs et salariés avec des revenus assez importants. Comme l’abattement est aussi appliqué pour le calcul des droits au chômage des intermittents du spectacle, tous les salariés percevant des revenus faibles – la majorité des intermittents – sont plutôt pénalisés par cet « avantage ». Une suppression de l’abattement peut s’inscrire dans la suppression des niches fiscales.

    Les deux systèmes existeront donc parallèlement, mais le nombre d’intermittents diminuera au profit du nombre des permanents. Au niveau des coûts de société, il n’y aura aucune augmentation sur le long terme !

    Il faut certainement exclure du bénéfice de transformation intermittent/permanent les entreprises au-dessus d’un certain nombre de salariés pour éviter les effets d’aubaine. Il faut par contre chercher à installer le processus sur l’ensemble du territoire.

     

    Du travail artistique en permanence, il y en a besoin partout.

    Par la suite, les grands employeurs, n’ayant plus le bénéfice de l’abattement de 25% et de 20%, transformeront ainsi de plus en plus le travail intermittent en travail permanent.

    Le système de permanence sera subventionné par l’Etat et les organismes sociaux. Les salariés qui en profiteront indirectement à travers le subventionnement de leurs employeurs, ne perdront pas du tout leur mobilité. Ils pourront changer d’employeurs, et leurs contrats de travail à durée indéterminée pourront être dissous, comme c’est déjà le cas, dans un commun accord.

    L’Etat, déjà participant au fonds à travers le reversement de l’abattement fiscal récolté, augmentera peu à peu sa participation, pour finalement financer avec les collectivités territoriales les emplois du secteur du spectacle vivant et d’autres emplois artistiques : sera ainsi pérennisé le service public des arts et de la culture.

     

  10. Réponse d’Eva Joly à la FNCC

    Réponse à Philippe Laurent, Président de la FNCC,

    15 questions aux candidats à la présidentielle.

     

     

    Monsieur le Président,

    Je vous remercie de m’avoir fait parvenir le questionnaire de la Fédération Nationale des Collectivités Territoriales pour la Culture, et vous prie de trouver ci-dessous mes réponses.

     

    1. La culture s’entend de bien des manières. pour certains, c’est la diversité des expressions artistiques et la multiplicité des cultures. pour d’autres, c’est avant tout l’identité de la nation, le socle des valeurs partagées. pour vous ?

    La culture est un élément consubstantiel du projet écologiste. C’est aussi la condition sine qua non pour reconquérir la confiance des citoyens et « faire société », alors que la mondialisation culturelle attise les crispations identitaires et encourage la consommation effrénée de biens culturels standardisés.

    Face à l’illusion d’un consensus sur la culture, quelle est la réalité d’aujourd’hui? La médiation est maltraitée au point que des pans entiers s’effondrent, la création voit ses moyens amputés, les industries culturelles façonnent des contenus aseptisés et la diversité s’épuise…

    L’écologie, qui interroge la place de l’homme dans la nature, et les rapports des hommes entre eux, pose des questions profondément culturelles, et apporte ses réponses: l’interdépendance, l’indispensable diversité, le bonheur et la fécondité de l’échange, de la transmission, de l’oeuvre collective.

     

    2. Démocratisation culturelle ou démocratie culturelle, culture pour chacun ou culture pour tous… Quel doit être le principe premier de la politique culturelle ?

    Une politique culturelle aujourd’hui ne peut plus être soumise à l’obsession de « l’excellence » et du
    « rayonnement » de quelques artistes ou intellectuels éclairants et guidant le peuple dans l’obscurité !

    Il faut fonder une politique pour la création et l’action culturelle réellement inclusive: qui permette aux personnes, quel que soit le genre ou l’origine, de bénéficier d’une éducation artistique dès le plus jeune âge et qui propose aux citoyens dans leur diversité de (re)devenir acteurs du champ culturel.

    Il faut redonner à tous et toutes la capacité d’émerveillement et de curiosité au monde qui garantie notre capacité à vivre ensemble et à nous émanciper des discours d’exclusion et de repli sur soi.

    Musées et salles ne désemplissent pas, mais accueillent toujours les mêmes publics. En matière de diversité culturelle, il ne faut pas se payer de mots, et commencer par donner l’exemple dans les quartiers et banlieues, dont on refuse d’entendre les potentiels et les aspirations.

    Mettons en débat un Agenda 21 de la culture afin de développer la diversité culturelle et permettre de co-construire les politiques culturelles avec la société civile.

     

    3. La culture, c’est à la fois les pratiques en amateur et la création artistique professionnelle – notamment dans le spectacle vivant –, la vie associative et les industries culturelles. Comment articuler les deux aspects ?

    Pour cela, les mutations économiques doivent avant tout permettre de pérenniser l’emploi culturel par une interrogation positive et partagée des dispositifs de l’intermittence et des droits d’auteurs.

    Il est en même temps indispensable de favoriser des écosystèmes culturels équilibrés, permettant aux émergences artistiques et aux nouvelles pratiques culturelles de s’épanouir en répartissant plus équitablement les ressources publiques pour la culture.

    Pour encourager une économie équitable des arts et de la culture, on peut s’appuyer sur :

    • la création d’un fonds de développement du tiers secteur culturel, qui permettra l’émergence et la pérennisation des pratiques vertueuses des associations culturelles, des SCIC, SCOP et autres unions d’économie sociale ;
    • un versement des subventions radicalement accéléré, de manière à faire disparaître le syndrome de la double peine pour les structures culturelles.

    Les industries culturelles ne doivent être soutenues par la puissance publique que dans la mesure que celle-ci participent à la production de bien commun, d’utilité publique et culturelle et qu’elles s’inscrivent dans une interdépendance respectueuse avec la création indépendante, les pratiques amateurs, le tiers secteur culturel.

    Il n’est plus possible d’accepter que de grands groupes s’arrogent de manière exclusive la diffusion et la distribution des oeuvres sans compensation pour les artistes ou les citoyens.

    Les collectivités locales ont en cela une grande responsabilité et doivent arbitrer leurs éventuels soutiens en regardant la production de richesses culturelle sur le temps long, et non pas sur de l’événementiel sans lendemain.

     

    4. Le développement de l’éducation artistique et culturelle à l’école est considéré unanimement comme une nécessité. est-ce l’outil premier d’une politique culturelle ?

    Le développement de l’éducation culturelle et artistique dès le plus jeune âge, et donc à l’école, est une nécessité pour l’individu comme pour la qualité de la société. Maîtriser une multitude de modes d’expression est une véritable condition de l’épanouissement de chacun et va aider à construire une société riche en possibilité et capable d’empathie.

    Cette éducation est donc un maillon décisif de la politique culturelle et l’on peut la renforce suivant deux axes:

    • réinventer un Ministère de la Culture, des Medias et l’Education populaire ;
    • développer l’éducation artistique de l’école maternelle à l’université, y compris dans les cursus « manuels » ou professionnalisant, avec de véritables moyens dédiés, consacrant une autonomie des équipes éducatives dans le choix des projets et de véritables résidences artistiques pour les équipes associées.

     

    5 . Les collectivités territoriales sont aujourd’hui les premiers financeurs de politiques culturelles publiques. Comment envisagez- vous l’avenir de la décentralisation culturelle et la coopération entre les collectivités et l’Etat ?

    La rue de Valois ne paye plus, a érodé les forces vives de ses DRACs, confond industries culturelles et culture… La page doit se tourner, pour l’instauration d’une véritable politique publique. L’Etat doit rester le garant de la diversité culturelle comme de la bonne irrigation de tous les territoires.

    L’Etat doit commencer par rééquilibrer ses subventions en faveur des Régions par rapport à l’Ile de France, abandonner les projets pharaoniques notamment sur Paris qui siphonnent les moyens en fonctionnement sur la durée et délocaliser les moyens des établissements publics culturels nationaux au service des territoires locaux.

    Il faut ensuite ouvrir une nouvelle étape de la décentralisation culturelle, en inscrivant la culture comme clause de compétence obligatoire dans la réforme des collectivités territoriales, mais en imaginant une répartition juste et partagée des attributions entre les différents niveaux, qui auraient la liberté de s’organiser librement à la suite d’assises territoriales de la culture dans chaque région ou bassin régional.

    Cela pourrait par exemple signifier:

    • Aux territoires locaux, l’expérimentation et les pratiques, l’éducation et l’enseignement artistique, l’aménagement du territoire, le soutien à l’émergence et aux pratiques amateurs…
    • A l’Etat, appuyé par les régions, la garantie de la transversalité et de l’équité des politiques culturelles, le financement de la conservation et de la diffusion du patrimoine culturel et de la création vivante, la protection du droit des artistes et la redistribution des investissements vers les esthétiques les plus fragiles, la protection des travailleurs culturels…
    • A l’Europe, la consolidation des Réseaux et des synergies, le soutien à la recherche, la mise en place d’un Erasmus Culturel, le soutien aux économies culturelles européennes et à la coopération interrégionale.

    Enfin, il est nécessaire de renforcer la déconcentration et le rôle des DRACs pour mieux accompagner la décentralisation et le transfert des compétences.

     

    6 . Nous vivons une profonde crise économique et financière. Dans ce contexte, comment justifier la dépense publique nationale en faveur de la culture ? Quelles seraient vos orientations budgétaires et fiscales ?

    La culture fait société. Cette dépense publique, souvent variable d’ajustement, est pourtant la dernière qu’il faut toucher en temps de crise, car elle tisse du lien et permet de s’exprimer autrement que par la violence. Nous entrons dans des mutations profondes qui vont mobiliser nos ressources de réflexion, d’innovation, de tolérance.

    Plus que jamais la culture doit trouver des soutiens qui ne sauraient se limiter à une dotation financière en faveur de grandes institutions… Il est tout à fait possible d’arbitrer en faveur de la culture, il s’agit avant d’une question de volonté politique.

    Il faut mettre sur pied une grande réforme de la fiscalité de l’art, qui favoriserait l’acquisition d’oeuvres d’artistes vivants, tout en taxant la spéculation sur les oeuvres d’art dans le circuit national et international. Le produit de cette taxe serait reversé à un fonds social de garantie à destination des artistes.

    Au delà, il faut lancer une mission nationale pour l’émergence de nouveaux indicateurs économiques et une fiscalité plus juste sur l’ensemble des champs culturels.

     

    7. Patrimoine. Quel avenir réservez-vous au patrimoine bâti protégé au moment où l’Etat et les collectivités territoriales s’en dégagent ?

    En préambule, je veux réaffirmer l’inaliénabilité du classement et de l’inscription des monuments historiques, et continuer l’inventaire des oeuvres architecturales, urbaines et paysagères sur l’ensemble du territoire français, y compris dans les Outres-Mers.

    Un grand chantier de concertation avec les collectivités locales doit pouvoir être mené afin de mettre en cohérence les exigences de protection du patrimoine et celles liées a l’inéluctable crise énergétique mondiale à laquelle nous allons être confronté.

    Cela nécessite dès à présent l’isolation thermique massive des immeubles anciens, et la mise en place d’alternative à la production d’énergie, si l’on ne veut pas voir se vider de ses habitants l’ensemble des centres-anciens de nos villes et villages. Il est possible de concilier les deux si tout le monde est autour de la table et c’est un enjeu à ne pas sous-estimer dans notre pays.

    Le patrimoine protégé doit donc pouvoir continuer à bénéficier de moyens à la hauteur de l’exceptionnelle richesse française, prioritairement en provenance de l’Etat.

    Les ZPPAUP doivent pouvoir être automatiquement transformées en AVAP, la caducité décrétée par le grenelle 2 des ZPPAUP a généré une zone dans les règlements d’urbanisme et impliquent des coûts supplémentaires pour les petites communes qui en avaient mis en oeuvre.

    Des études patrimoniales doivent par ailleurs être systématiquement menées sur les architectures industrielles en déshérence, les architectures vernaculaires et les ensembles paysagers ceci afin de conserver la mémoire d’un patrimoine d’une très grande valeur historique et cognitive pour notre société, notamment dans des régions ayant subi une très douloureuse désindustrialisation ou un exode rural massif.

     

    8. Cinéma. Face à l’émergence du ‘‘hors-film” permise par la mutation numérique, comment appréhender la probable transformation des écrans de cinéma en simples écrans aptes à diffuser des contenus non exclusivement cinématographiques (sport, spectacle vivant…)

    Les cinémas, particulièrement en région et dans les zones rurales, voient leurs écrans progressivement squattés par des contenus non-cinématographiques.

    C’est la conséquence d’un abandon progressif par l’Etat et les collectivités de la question de l’aménagement culturel territorial, mais également d’erreurs graves d’investissement sur un certain nombre de salles vers du numérique surdimensionné et la 3D… Il faut donc rentabiliser ces équipements par de l’événementiel, qui prend le pas sur la diffusion d’oeuvres de cinéma.

    Il faut se poser la question de la manière dont les collectivités sont en train de gérer ce passage au numérique. De grands chantiers de rénovation sont à l’oeuvre :

    Pourquoi ne pas en profiter pour mobiliser le CNC sur des travaux d’accessibilité aux handicapés? Quid des bobines qui ne seront jamais numérisées et représentent un précieux patrimoine? Le passage au numérique signifie-t-il la dématérialisation du transfert des données ou une plus grande facilité à accéder à tous les films, plus rapidement ?

    A cette dernière question, on est bien obligé de constater que non. Une fois de plus, l’innovation technique montre qu’elle n’est pas neutre en matière de culture et surtout, si ces innovations peuvent être un moyen, elles ne sont jamais une fin en soi.

    Il faut donc garder aux cinémas leur fonction première : diffuser des oeuvres de cinéma !

    Mais pour cela le CNC doit, en coordination avec les agences régionales de soutien au cinéma, accompagner les collectivités qui sont souvient bien seules pour prendre des décisions aux conséquences définitives, et soutenir les cinémas de 3 écrans ou moins à l’action culturelle et dans l’éducation à l’image, seul moyen de rassembler un public qui ne demande que de la diversité dans les propositions qui lui sont faites par les salles.

    Par ailleurs, il devient indispensable de redéfinir la notion d’art et essai pour la qualification des films. Les quotas de diffusion de ces films doivent par ailleurs être revus écran par écran et le nombre de copies des films doivent être limité pour permettre à toutes les oeuvres d’avoir la chance d’être vues.

     

    9 . Livre et lecture publique. la pratique de la lecture est en déclin constant puis 20 ans. la librairie indépendante est menacée. le numérique bouleverse l’ensemble de la chaîne du livre. Le droit d’auteur peine à s’adapter dans l’univers numérique. dans ce contexte, comment envisagez-vous l’action de l’Etat en faveur du livre et de la lecture publique ?

    Le modèle culturel français du livre s’appuie sur un réseau très dense et diversifié de librairies, c’est ce maillage et cette diversité qui permettent d’offrir des débouchés et garantit la richesse de la production éditoriale. C’est aussi aujourd’hui le commerce de détail le plus fragile économiquement.

    Soutenir la librairie indépendante c’est soutenir la production éditoriale et l’accès à des productions variées. Des mesures s’imposent :

    • mise en place d’une TVA réduite sur le livre : 2,1% à l’instar de la presse ;
    • renforcer les moyens du CNL – Centre National du livre – pour les aides à l’édition, la traduction, le soutien à la librairie ;
    • mise en place d’une taxe sur les ventes en lignes – qui, notamment dans le cas d’Amazon, en infraction avec la loi sur le prix unique du livre vend les ouvrages sans frais de ports – et menace gravement le réseau indépendant. De ce fait détruit des emplois, les missions culturelles de la librairie, la médiation et l’animation des centre-bourgs ;
    • rendre le label LIR pleinement efficient en accordant des allégements de charges sociales pour les librairies labellisées – pour obtenir le label, les charges de salaires doivent représenter au moins 12,5% du CA. Ce serait aussi une mesure en faveur de l’emploi.

     

    10. Musiques actuelles. les musiques actuelles sont depuis des années en grande fragilité. Quelles décisions pourraient favoriser, selon vous, les conditions d’une réelle reconnaissance de ce secteur ?

    Les musiques actuelles sont fragiles parce qu’elles sont aux confins de l’amateur et du professionnel, de l’activité culturelle publique et du marché.

    La rémunération des groupes n’intervient que très tardivement, et rares sont les aides publiques qui permettent de franchir le seuil difficile, tandis que les retours de droits d’auteurs se perdent dans la gourmandise des éditeurs phonographiques.

    L’action publique doit intervenir en amont, en favorisant l’accès à des studios de répétition et d’enregistrement, en soutenant les coproductions et l’accueil en résidence longue de création.

    Cette mandature doit aussi résoudre par un cadre légal adapté à l’équation impossible de la rémunération des groupes qui se produisent dans les cafés.

    Cependant, je suis très réservée concernant l’annonce de la création du Centre National de la Musique, et ce même avec les engagements pris auprès d’un certain nombre d’organisations concernant le soutien aux musiques vivantes et aux acteurs des petites scènes disséminées sur le territoire.

    En effet, je crois que la crise que traverse le ministère de la Culture est trop grave créer aujourd’hui une agence qui se voit déléguer par l’Etat de nouvelles responsabilités. il faut d’abord retrouver la confiance et la sérénité au sein du ministère et de ses services déconcentrés, réfléchir sereinement aux besoins du secteur et ne pas l’opposer avec d’autres, ni le mettre en concurrence, sous la pression des grands lobbies et industries du disque par exemple…

     

    11. Agenda21/développement durable. les grands tex- tes de référence actuels que sont la Charte pour la diversité de l’UNESCO, la déclaration de Fribourg sur les droits culturels et l’Agenda 21 de la culture modifient-ils votre approche des politiques culturelles publiques ?

    Bien évidemment et les écologistes ont été les militants de cette nouvelle approche. L’agenda 21 de la Culture répond à la crise des modèles nationaux de politique culturelle et à la stagnation des moyens des collectivités locales. Il répond à la recherche d’alternatives économiques pour les arts et la culture. C’est une clé aussi pour sortir des faux débats sur les identités nationales.

    L’agenda 21 permet de dépasser le face à face entre les élus et les professionnels : position monarchique, fait du prince. Il va remettre les habitants dans le jeu (conseils de quartier, de développement, associations, comités d’usagers)… Les arts et les cultures deviennent alors des pratiques de la citoyenneté locale.

    Je veux passer d’une politique culturelle pour ou de à une construction par. Il faut accepter la parole de «non experts», et accepter de passer de la figure du public et de l’usager à celui du citoyen et de la personne.

     

    12. Culture et numérique. Comment voyez-vous l’évolution des politiques culturelles face à la mutation des pratiques sous l’effet de la révolution numérique ?

    Les canaux de l’internet, les encodages numériques ne sont pas neutres: ces derniers, tout en offrant de nouvelles voies, et en les démocratisant, ont changé les contenus, le son par exemple.

    La duplication est à la portée de chacun, et tandis que les FAI font du téléchargement un argument de vente, les plateformes légales et leur identification ont pris un retard considérable. L’arsenal répressif entame les libertés sans même atteindre son but.

    Il est temps de mettre au débat des modèles de rémunération des auteurs plus actuels, plus transparents … Accompagnons les nouvelles pratiques de création et de diffusion culturelles en consolidant le développement de l’offre légale sur Internet afin de faciliter l’accès aux oeuvres à tous les publics.

    Nous voulons pour cela légaliser le partage non-marchand. Les lois qui criminalisent les utilisateurs, comme DAVDSI et HADOPI, seront abrogées.

     

    13. Culture scientifique. A l’heure où une véritable culture scientifique, sans cesse actualisée, semble nécessaire pour adopter ou émettre des points de vue raisonnés, quelle place doit-elle prendre dans l’action culturelle de l’Etat ?

    Ce fut un difficile combat, mené par les écologistes que de faire valoir le partage de la culture scientifique au ministère de la culture. Hélas pendant ce temps le ministère de la recherche dissolvait sa mission culture scientifique pour l’externaliser à UNIVERSCIENCES qui peinait déjà à rassembler deux institutions parisiennes aux personnels de statuts et de conception de la pédagogie différents.

    L’enjeu reste l’équité territoriale, car ce ne sont que des miettes qui vont aux associations de terrain. Nous devons de surcroit rester attentifs à ce que les CCSTI gardent des moyens suffisants pour rester indépendants: en matière de culture scientifique, les mécénats intéressés ont tôt fait de vous changer la présentation des OGM, de l’effet de serre ou de Fukushima, pour peu qu’ils se nomment GNIS, TOTAL ou AREVA…

     

    14. Relations internationales et francophonie. riche d’un patrimoine dense et d’une création vivace que ses politiques culturelles successives ont su préserver, la France a-t-elle une responsabilité particulière vis-à-vis de l’Europe et du monde ?

    La France doit retrouver une vraie présence internationale, non seulement pour diffuser ses créations, mais aussi pour faire vivre ce qui sous-tend la culture, c’est-à-dire l’échange, la confrontation artistique, le débat, la réciprocité. Il est souhaitable que les collectivités qui mènent des actions de coopération décentralisée, aient un volet culturel dans leurs projets, et que l’Institut français en tienne compte et les appuie.

    La francophonie est un fil conducteur particulier, intéressant parce qu’il facilite les échanges, ravive une mémoire commune, et nous interpelle sur le sort que nous faisons aux autres langues, dont les langues régionales.

    Enfin comment évoquer l’international sans parler d’Europe, qui ne serait pas en si mauvais état dans le coeur de ses habitants si elle s’était davantage préoccupée de culture. C’est un point non négligeable que je m’attacherais à faire vivre.

     

    15. Quelle serait votre première décision en matière de politique culturelle ?

    Je commencerais par, dans le cadre de l’abrogation de la réforme territoriale telle qu’elle a été décidée par Nicolas Sarkozy, lancer des assises décentralisées pour repenser la compétence culture avec l’ensemble des niveaux d’intervention, de l’Europe à la commune, en passant par l’Etat, les Régions, les départements et les intercommunalités.

    Je réformerais en profondeur la gouvernance du ministère de la Culture comme des institutions culturelles nationales, en proposant une charte éthique et démocratique pour sortir du « fait du prince » et permettre une meilleure représentativité de la diversité des cultures, qu’elles soient savantes ou populaires, émergentes ou patrimoniales.

    Je rassemblerai l’ensemble des acteurs culturels pour travailler avec eux sur une loi d’orientation pour l’emploi artistique et culturel qui visera à protéger ces activités artistiques et culturelles des obligations de mise en concurrence, d’appels d’offres, et de fiscalité commerciale.

    L’intermittence serait dans ce cadre profondément réformée pour s’attacher à sécuriser le parcours de travail de ces intermittents dans leur diversité, en faisant peser le cout de leur inhérente flexibilité sur les employeurs et non sur eux.

    Je créerai enfin un fonds de soutien pour encourager le dialogue interculturel et rééquilibrer les moyens en faveur de la promotion de la diversité sociale et culturelle.

     

    Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes meilleurs sentiments.

    Eva Joly.

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