Financement de la Sécu : « pour une politique qui fait dos aux pressions des lobbies et des marchés »

Financement de la Sécu : « le tournant d’une politique qui fait dos aux pressions des lobbies et des marchés »

Seconde lecture de la loi de financement de la sécurité sociale 2013 : « L’approche globale qui doit être la nôtre en matière de santé doit marquer le tournant d’une politique qui fait dos aux pressions des lobbies et des marchés ».

Vous trouverez ci-dessous le texte de  l’intervention de Christophe Cavard pour le groupe écologiste, lundi 3 décembre 2012 ainsi que la vidéo disponible sur le site internet.

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Monsieur le Président,

Madame la présidente de la commission, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues,

L’adoption de notre loi de finance de la sécurité sociale aura marqué les véritables enjeux qui nous attendent dans les prochains mois.

Les débats entre nos deux assemblées n’ont pas réussi à aboutir sur des positions de consensus du fait notamment d’une alliance pour le moins contre nature entre le groupe communiste et la droite. Nous ne pouvons que regretter cette attitude sur un sujet aussi important que le financement d’un des socles de la solidarité nationale.

Car ce texte, mes collègues l’ont répété à cette tribune tout au long des étapes de son adoption nous semble être une première étape positive dans la voie d’une politique de santé publique privilégiant la solidarité.

Cette solidarité, Madame la ministre passe par différentes mesures que nous, groupe écologistes avons porté dans nos propres programmes.

La plus emblématique peut-être est la mise en place du praticien territorial pour lutter d’une manière souple contre les déserts médicaux en incitant les jeunes généralistes à s’installer moyennant une garantie de revenue.

Cette politique marque un véritable tournant dans notre volonté de s’attaquer à ce problème qui constitue un véritable handicap pour l’attractivité des territoires ruraux.

Les autres mesures importantes sont celles qui vont favoriser l’égal accès pour tous à une sexualité choisie. La prise en charge à 100 % des interruptions volontaires de grossesse et les réflexions engagées sur la question de la contraception chez les mineures montrent un volontarisme politique qui souhaite dépasser les postures idéologiques et accepte de regarder sans honte ces problèmes dont on sait qu’ils touchent davantage les milieux défavorisés socialement.

Mais ce vote appelle quelque réserves qui je l’espère seront levées dans les prochains mois, vous l’aurez compris.

Ces réserves viennent de la prise en compte pour le moins discrète de la dimension éducative de la santé publique et des rejets systématiques des mesures que nous, groupe écologiste souhaitions mettre en œuvre pour lutter contre les facteurs environnementaux de mauvaise santé.

Les deux amendements sur l’aspartame et l’huile de palme ont pourtant un objectif que nous partageons tous a priori. Permettre à chaque français de vivre vieux et en bonne santé !

Or nous savons aujourd’hui que nombre de productions de l’agro-alimentaire privilégiant les logiques de profits à la santé des consommateurs mettent en œuvre des produits dont on sait la nocivité à terme.

C’est le cas de l’huile de Palme qui a le double désavantage de provoquer des problèmes de santé publique dans les pays du Nord et des ravages sur l’environnement dans les pays du SUD. En somme c’est obésité et problèmes cardiovasculaires au nord et déforestation et pollution des sols au sud.

Comme le rappelait dans le Midi libre du 9 septembre 2011, votre collègue Arnaud Montebourg l’année dernière à Narbonne, sur le site  d’un projet d’huile de palme qui heureusement n’a pas vu le jour, à la place d’une industrie agro-alimentaire polluante il faut « investir dans la révolution verte », concourir « à un rapprochement des lieux de production et de consommation », et « à une réconciliation de l’écologie et de l’économie ». Nous ne pouvons que nous faire l’écho de cette approche !

Concernant l’aspartame dont le brevet a été racheté par la firme Monsanto en 1985, il a été démontré sa nocivité même à faible dose.

L’aspartame augmente les risques de naissance avant terme. En outre, il existe de très fortes présomptions que la consommation d’aspartame entraîne un risque accru de cancers. C’est notamment ce qu’a conclu l’étude menée par la Fondation européenne Ramazzini, institut italien privé de recherche en cancérologie environnementale.

L’amendement que nous avions déposé créait une taxe additionnelle sur l’aspartame, prévue pour augmenter chaque année jusqu’en 2016. En effet, le premier objectif est d’inciter les industriels à substituer à l’aspartame d’autres édulcorants, naturels ou de synthèse. A cette fin, il convient de lui supprimer son avantage concurrentiel, qui ne repose que sur le fait que le coût des dégâts sanitaires qu’il occasionne est externalisé et supporté par la collectivité. De ce point de vue, la progressivité est indispensable car elle permet d’aboutir à terme à une taxation dissuasive tout en laissant aux industriels le temps de s’adapter aux produits de substitution. Les importations seraient évidemment également taxées.

Comme pour l’huile de palme, ici encore il s’agissait d’œuvrer pour la réduction de l’aspartame afin de permettre à l’assurance maladie de développer une nouvelle recette et d’anticiper les risques de dépenses supplémentaires dues à des maladies favorisées par cet édulcoran

D’autres sujets de santé environnementale auraient mérité également d’être traités. Je pense particulièrement au diesel qui est responsable de l’émission de grandes quantités de particules très fines qui s’infiltrent aisément dans l’appareil respiratoire. Ces particules sont ainsi à l’origine de cancers et de maladies respiratoires ou dégénératives, ce qu’a officiellement confirmé l’OMS dans un rapport rendu public en juin 2012 à la suite d’une étude de longue durée.

Lors de l’examen des crédits de la mission Santé du PLF, madame la ministre a affirmé que les maladies chroniques ne sont pas un simple enjeu mais sont le cœur même des politiques de santé publique. Nous ne pouvons que vous rejoindre sur cela. Elle rappelait, à juste titre, qu’elles représenteront très prochainement 75 % des dépenses de l’Assurance maladie.

Madame la Ministre a évoqué à de nombreuses reprises dans nos débats un souci de cohérence et a réaffirmé une ambition pour une santé publique qui soit le fer de lance de la solidarité. En renvoyant nos amendements à une future loi de santé publique vous nous avez placé, nous groupe écologiste, ainsi que de nombreux français dans une attente forte.

À l’heure où nous savons que les crises que nous traversons sont avant tout systémiques et qu’elles mélangent tout autant les problématiques environnementales ou sociales qu’économiques ou financières, l’approche globale qui doit être la nôtre en matière de santé doit marquer le tournant d’une politique qui fait dos aux pressions des lobbies et des marchés.

Le groupe écologiste appelle donc à voter en dernière lecture ce texte et prend rendez-vous pour le débat que vous allez ouvrir dans les prochains mois.

Je vous remercie.

Pour le groupe écologiste, 

Christophe Cavard

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