Cher nucléaire …

Xavier Gorce argumenteIl faudra un peu de temps pour tirer tous les enseignements du rapport que la Cour des Comptes a consacré aux comptes de la filière nucléaire (http://www.ccomptes.fr/fr/CC/documents/RPT/Rapport_thematique_filiere_electronucleaire.pdf). Mais en parcourir le résumé de conclusion est déjà bien intéressant.

Ainsi, en page 280, il est indiqué «qu’on peut estimer à 55 Md€ les dépenses totales de recherche faites dans le domaine de l’électricité nucléaire, soit environ 1 Md€ par an.» On ne peut s’empêcher d’imaginer ce qu’auraient pu réaliser ces sommes investies en recherche sur la performance énergétique ou les énergies renouvelables !

Mais ce qui m’a le plus frappée, dans cette première lecture, c’est le nombre impressionnant de fois où les auteurs indiquent que, tout simplement, on ne sait pas ! «Une incertitude importante sur le coût de gestion à long terme des déchets» (p 272) ; «Des coûts qui diffèrent sensiblement en fonction des différentes approches du calcul» (p 273) ; en matière de démantèlement «les devis ont tendance à progresser dans le temps malgré les progrès des méthodes d’élaboration du fait de la nouveauté de ces sujets et du manque de retour d’expérience dans ce domaine » (p 277).

Enfin, la Cour des Comptes pointe un dernier aspect qui donne à penser. Tout automobiliste est obligé de contracter une assurance et sait bien que, même s’il choisit de ne s’assurer qu’au tiers, la prime pèsera lourdement dans son budget auto annuel. Pour les entreprises aussi les assurances représentent une part conséquente du budget. Et bien pas pour celles du nucléaire ! En page 287, les auteurs expliquent que «en matière d’assurance, la filière nucléaire est dans une situation très particulière» puisque «il est certain qu’en cas d’accident notable, les plafonds de garantie actuels à la charge des exploitants en matière de responsabilité civile, fixés par des conventions internationales, seraient rapidement atteints et probablement dépassés.» Donc il est comme acquis que seul l’Etat peut garantir la prise en charge du coût des réparations d’un dommage nucléaire et de ses conséquences. «Cette garantie est apportée aujourd’hui de manière gratuite aux opérateurs.»

Au total, on sent bien que la « facture » sera bien plus lourde que le « devis », alors même que des postes essentiels (gestion des déchets, assurance du risque) sont pourtant gravement minimisés.

Décidément, avec une filière où de tels risques sont avérés et quand la rentabilité n’est même pas au rendez-vous, il est légitime, et urgent, de réfléchir à d’autres scénarios énergétiques !

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