Accueil 12ème arrondissement Bercy-Charenton : quatre interventions déposées en Conseil de Paris pour un vrai urbanisme écologique

Bercy-Charenton : quatre interventions déposées en Conseil de Paris pour un vrai urbanisme écologique

Crédit : APUR

Crédit : APUR

Lors de ce Conseil de Paris des 8, 9 et 10 juillet, sera présentée une délibération qui décidera des objectifs de la ZAC (Zone d’Aménagement Concerté) à venir dans le secteur de Bercy Charenton (12ème).

Les enjeux d’aménagement du site tels que décrits dans la délibération sont « d’améliorer les liaisons entre les communes de Paris et de Charenton-le-Pont, proposer une offre mixte de logements, de programmes à caractère économique, d'équipements publics et de services urbains ; de faciliter l'accueil de nouveaux modes de transport, et de transformer l'environnement du site et les espaces publics. »

A l’heure où les dernières grandes emprises foncières parisiennes disponibles sont en passe d’être aménagées (Paris Nord Est, Batignolles), se pose la question des marges de manœuvres qui restent pour influencer les politiques urbaines à Paris, des évolutions possibles et des territoires concernés : le projet de Bercy Charenton est en cela, pour nous écologistes, une des dernières grandes opportunités d’aménagement capable de devenir un laboratoire urbain de transition écologique.

Des initiatives dans ce domaine sont certes réalisées par la Ville (collecte pneumatique des déchets à Batignolles, par exemple) mais l’équipe municipale actuelle semble considérer l’écologie comme un simple habillage. Or, nous pouvons promouvoir un autre mode de fonctionnement : en structurant la démarche, l’impératif écologique implique de repenser totalement le projet d’urbanisme en termes de méthodologie (démocratie, itération, retours d’expérience) et de programmation (objectifs de performance énergétique et environnementale).

Les enjeux de réaménagement

Sur Bercy-Charenton, les enjeux sont multiples :

•    Il est tout d’abord métropolitain. Avec son territoire de 63 hectares, ce projet de réaménagement est le chaînon manquant entre Paris et Charenton, un véritable symbole de la construction métropolitaine que j’appelle de mes vœux. Il est nécessaire aujourd’hui d’engager un mode de production urbaine réellement métropolitain, partagé avec Charenton ; sur la concertation, bien entendu, mais aussi sur le financement et l’identification des besoins partagés par les deux communes.

•    Permettre et concrétiser l’urbanisme durable à Bercy Charenton : les trames vertes, par exemple, permettent de relier deux éléments majeurs de dimension métropolitaine que sont la Seine et le bois de Vincennes. Une programmation à taille humaine, avec des activités offrant notamment des emplois locaux, des équipements et des commerces de proximité forgeraient à ce quartier à venir une qualité de vie excellente pour ses futur-e-s riverain-ne-s.

•    L’enjeu du logement : pour répondre à la demande des parisien-ne-s, nous devons absolument favoriser le logement dans ce secteur, tout d’abord en y consacrant 50% de la programmation, et en y intégrant par ailleurs des habitats très sociaux. Les pratiques actuelles de la municipalité tendent à favoriser les logements sociaux à destination des ménages les plus aisés (logements PLS [i]).

Afin de faciliter l’accès au logement pour tous – y compris dans le parc privé – nous devons innover, et développer une nouvelle conception de l’habitat, fondée sur une maîtrise partagée du foncier et sur l’usage de la propriété pour contrer la spéculation. Ces expérimentations pourraient être liées à des projets d’habitat participatif qu’il serait heureux de promouvoir dans cette future ZAC.

Des tours à venir pour Bercy-Charenton

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La délibération DU 212 présentée lors de ce conseil inscrit clairement l’intention de la municipalité de permettre la construction de tours sur le futur site de Bercy-Charenton : « compte tenu des caractéristiques des sites de Bercy Charenton et de Masséna-Bruneseau, de leur situation en bordure de grand paysage de la Seine et du boulevard périphérique, des immeubles d’une hauteur supérieur au plafond actuel de 37 m seront envisagés. »

Cette petite phrase en page 6 signifie clairement que la ZAC va déplafonner les hauteurs sur ce secteur, et que par conséquent des tours de grande hauteur vont être construites. Disons-le tout net : les  immeubles de grande hauteur (IGH) ne sont pas une solution au problème de logement que connait la métropole parisienne.

En termes d’urbanisme, les arguments complexes en faveur d’une construction durable font souvent face à des propos réducteurs. Un clivage semblant opposer « vieille école » à « modernité » divise les opinions sur la création des IGH. Ainsi, selon certaines conceptions, hauteur serait synonyme de densité, et tour équivaudrait à création architecturale. C’est notamment l’avis de Mme Hidalgo, première adjointe à l’urbanisme, que je ne partage bien évidemment pas, loin s’en faut.

L’esprit de modernité appliqué à la ville d’aujourd’hui, c’est bien de construire de façon dense, compacte et écologique ; soit l’exact opposé d’un urbanisme fait de barres et de tours.

Les tours ne permettent pas de répondre à l’impératif de densité nécessaire dans une métropole. De l’aveu même de l’APUR, la densité moyenne dans un quartier composé de tours est de 100 hab/ha, alors que la forme urbaine de type haussmannien est de 300 hab/ha. Par ailleurs, la tour gèle le foncier aux alentours (respect de la règle des prospects, notamment [ii]).

Les IGH sont extrêmement énergivores. De par l’utilisation de matériaux à forte résistance - acier et béton principalement - l’énergie grise[iii] consommée par le bâtiment est très importante, ce qui rend son bilan carbone [iv] désastreux. Les déperditions thermiques sont par ailleurs proportionnelles à la surface des parois en contact avec l’extérieur, et induisent une consommation supplémentaire d’énergie proportionnelle à la hauteur du bâtiment. Ainsi, les tours de la Défense oscillent entre 350 et 400 KWT/M²/AN. Les tours les plus étudiées permettraient d’atteindre 130 KW/M²/AN. Dans tous les cas, nous sommes bien loin des mesures imposées par le plan climat, qui fixe la norme à 50 KW/M²/AN.

Les tours sont ingérables et coûteuses. Les surcoûts de construction pour ce type de bâtiment se chiffrent en moyenne à 30% du coût initial. La tour achevée, les charges représentent souvent un second loyer (consommation d’énergie, entretien des ascenseurs et des réseaux, mais aussi toutes les difficultés liées à la grande hauteur). Au-dessus de 50 mètres, une permanence des pompiers est exigée par la loi. Dans les faits, seul un opérateur de logements de luxe ou de bureaux peut économiquement et financièrement assumer la gestion d’un immeuble de grande hauteur.

Car les tours se posent dans un usage mono-fonctionnel : l’impératif économique, le coût de construction et de gestion de ces barres rendent une mixité d’usage et de population impossible et non rentable pour des promoteurs. Une tour mixte emploi/habitat serait ainsi un leurre : même si la faisabilité en termes de promotion et de gestion était avérée, elle ne ciblerait que du logement de standing, et ne répondrait donc d’aucune façon pas à la demande parisienne.

La réponse aux problématiques de logement n’est donc certainement pas la construction de tours, mais bien des formes urbaines intermédiaires, facteur de convivialité citadine et paysagère, moins couteuses pour la collectivité [v].

Amendements et vœux déposés concernant cette délibération

En réaction à cette délibération, j’ai donc déposé deux amendements et deux vœux.

Par le premier amendement, je souhaite qu’une étude soit lancée pour réaménager et simplifier l’échangeur autoroutier de la porte de Bercy, et que soit envisagée la mise en place d’un Bus à Haut Niveau de Service (BNHS[vi] ) qui pourrait emprunter la future rue Baron le Roy prolongée, relier la gare de Lyon, la gare de Bercy et le pôle intermodal de Maisons-Alfort Ecole Vétérinaire.

Le deuxième amendement proposé inscrirait dans le délibéré que le prolongement de la rue Baron le Roy serait réservée exclusivement aux modes doux : transports en commun, vélo, piétons, et ce conformément aux orientations du PLU voté en 2006 par le Conseil de Paris. Ainsi, la rue Baron le Roy ne serait pas un axe de transit supplémentaire dans Paris.

Le premier vœu s’attache à demander une étude de faisabilité concernant la création d’un lieu dédié aux foires et aux cirques dans l’aire métropolitaine. Cette étude serait évidemment menée en lien avec Paris Métropole et permettrait la relocalisation de la Foire du Trône, ce qui préserverait la pelouse de Reuilly, durement malmenée par la Foire et assez dégradante pour le bois de Vincennes (déchets, stationnement anarchique…) Une autre étude pourrait être envisagée pour permettre la mise en relation de la trame verte du site Bercy-Charenton avec le bois de Vincennes, garantissant ainsi la continuité de la trame verte, et un accès facilité pour les riverains du quartier.

Enfin, le second vœu que j’ai déposé part du constat que la part du logement dans les opérations d’aménagement reste aujourd’hui minoritaire par rapport aux programmations de bureaux, et que très peu d’équipements de proximité sont prévus dans le secteur.
Je souhaite donc que la programmation de la future ZAC respecte un équilibre en faveur de la production de logements, à savoir 50% de la planification dédiée à l’habitat, et 50% de commerces, bureaux et services. Il est actuellement prévu un ratio de 40% de logements pour 60% de bureaux.


Notes explicatives :
[i] PLS : Prêt Locatif Social. Les logements PLS sont destinés en particulier aux classes moyennes. Le plafond de ressources est d’environ 2900 € par mois pour une personne seule et près de 6800 € pour un couple avec 2 enfants. Le loyer de base des logements PLS créés à partir du 1er juillet 2007 s’élève à 9,14 €/m², hors-charges.
Source : http://www.comite-actions-logement.org
[ii] Un prospect est une règle d’urbanisme se fondant principalement sur des considérations telles que les ouvertures visuelles ou les apports de lumière et qui règlemente l’écart à respecter entre les bâtiments. Ces règles de prospect permettent d’interdire de construire sous les fenêtres d’un immeuble en en obstruant la vue.

Source : http://douceville.unblog.fr/2012/05/21/2-quest-ce-quune-regle-de-prospect/

[iii] L’énergie grise est la quantité d’énergie nécessaire à la production et à la fabrication des matériaux ou des produits industriels. En théorie, un bilan d'énergie grise additionne l'énergie dépensée lors :
-          de la conception du produit ou du service
-          de l'extraction et le transport des matières premières
-          de la transformation des matières premières et la fabrication du produit ou lors de la préparation du service
-          de la commercialisation du produit ou du service
-          de l'usage ou la mise en œuvre du produit ou lors de la fourniture du service
-          du recyclage du produit
Source : http://www.techno-science.net/?onglet=glossaire&definition=10423
[iv] La méthode du bilan carbone permet de comptabiliser les émissions, directes ou indirectes, de gaz à effet de serre d’une activité ou d’un site. Cette méthode développée par l’Ademe se base uniquement sur des données facilement accessibles. C’est la première étape du diagnostic climat d’une activité ou d’un site. En hiérarchisant les différents postes d’émissions en fonction de leur
importance, elle facilité la mise en place d’actions prioritaires de réduction de ces émissions.
Source : http://www.futura-sciences.com/magazines/environnement/infos/dico/d/developpement-durable-bilan-carbone-5889/
[v] Emblématique de cette politique municipale pro-tours, le projet de la Tour Triangle  - auquel nous nous opposons fermement – s’inscrit dans le débat sur l’urbanisme du paysage urbain.Nous avons demandé qu’un référendum soit organisé afin de donner la parole aux parisien-ne-s sur le déplafonnement des hauteurs.
[vi] Les initiatives de Bus à haut niveau de service (BHNS) - un système de transport moderne qui allie la flexibilité du transport en bus à la vitesse, au confort et à la fiabilité du transport ferroviaire - jouissent d’une popularité  croissante à travers le globe. Le BHNS offre un service plus rapide, plus écologique, plus sûr et plus efficient qu’un bus ordinaire. Les partisans du BHNS disent de ce système qu’il joue un rôle similaire à celui d’un métro « de surface », mais à un coût nettement inférieur à l’investissement requis par une véritable ligne de métro.
Bénéficiant de voies en site propre dotées d’aires de services, de stations offrant des technologies avancées et de systèmes de traçabilité par GPS, le BHNS propose un service de transport de masse complet à moindre coût. Le coût de construction d’une seule voie ferrée équivaut au coût d’aménagement de nombreuses lignes de BHNS.
Source : http://www.busandcoach.travel/

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