Voilà grosso modo, sous une version humoristique propre à Bridget Kyoto, comment s’est déroulé le sommet de Rio. Un sommet qui accouche une fois de plus d’une souris, d’un accord qui ne fait que réaffirmer des engagements déjà pris, quand ils ne marquent pas un recul par rapport à l’existant. Bref c’est bel et bien sur la base d’un « texte faible » selon les propos de Nicole Bricq, qu’un compromis a minima s’est dégagé à Rio. Remarquez, c’est plus facile de s’entendre sur un texte mou, régressif, vide de tout engagement, que sur un véritable programme, que certains n’hésitaient pas encore il y a peu de temps à qualifier de « plan Marshall de l’écologie » !

Là où le bât blesse, c’est qu’il aura fallu tout de même une quarantaine de pages, et 283 paragraphes de bonnes intentions, là où 4 mots auraient pourtant suffit : « Nous ne ferons rien ! ».

Sans objectif ou engagement contraignant, avec des échéances évasives, et sans moyen cela va de soi, l’accord se contente de dresser des propos incantatoires sur l’équité, l’égalité, le droit d’accès à l’eau et à l’énergie, la transformation écologique, la souveraineté alimentaire, ou encore la nécessité de préserver la biodiversité.

En définitive, tout au long de ces pages laborieuses, la déclaration se borne ainsi à des élucubrations sur le verdissement de l’économie, en gardant, ce n’est pas une surprise, le marché comme boussole et la préservation des intérêts nationaux de court terme. Serait-ce en partie la faute aux 1500 chefs d’entreprises et lobbies industriels présents à la conférence, et trois fois plus nombreux que les délégations de tous les Etats réunis ? Serait-ce la faute à cette vision nauséabonde d’une crise écologique et systémique perçue exclusivement sous l’angle des opportunités financières qu’elle recèle, et d’une pseudo croissance verte ? Mauvaise langue Agnès, mauvaise langue ! Tu ferais mieux de te remettre momentanément dans la peau de Bridget Kyoto !

« Avec la peinture verte on peut tout repeindre, la publicité, l’industrie, les discours politiques, vous pouvez même repeindre la croissance oui ! La croissance verte, c’est ce qui permet de faire croire qu’on a tout compris, alors qu’on a rien compris du tout ! C’est comme la pollution propre, le nucléaire sûr, le réchauffement frais. Plus c’est con, plus ça passe !

Le problème avec la croissance verte, ce n’est pas la couleur, c’est la croissance. En effet, sur une planète aux ressources finies, une croissance infinie est impossible, même verte. Alors la croissance, quelle que soit sa couleur, il faudra bien l’arrêter un jour. Le problème, c’est que c’est devenu un dogme. Quand il n'y en a plus, on est en manque, alors c’est la crise. Et comme il est trop compliqué de changer de dogme, de se désintoxiquer, on reprend la même, et on change le vernis ! » . C’est ça la croissance verte !

Avec une telle vision, nous venons de perdre 20 ans. 20 ans durant lesquels le changement climatique s’est intensifié, la perte de biodiversité s’est accélérée, les ressources naturelles se sont épuisées un peu plus, sans qu’une répartition plus juste des richesses sur la planète n’ait vraiment vu le jour.

Alors peut-être que les écologistes ont tort finalement de s’inquiéter pour la planète et ses habitants, de vouloir chercher la résilience et des chemins expiatoires pour éviter le point de rupture et les conflits. Peut-être aussi que Jean-Paul Delevoye, le président du CESE, n’est pas dans le vrai lui aussi lorsqu’il interpelle François Hollande devant son assemblée lors de l’entre deux tours des législatives, en proclamant la chose suivante : « Sacrifier l’avenir pour prolonger le confort du présent ne nous honore pas », ajoutant une interrogation des plus lucides, qui se suffit à elle même pour résumer les aboutissants de la crise écologique : « les hivers de nos démocraties succèderont-ils aux printemps arabes ? ».

Avec 18 députés à l’Assemblée Nationale, les écologistes feront tout ce qui est en leur pouvoir pour faire comprendre ces enjeux, et appeler leurs partenaires de l’hémicycle à l’action et à la responsabilité collective.

Le chemin sera long. Certains diront que nous n’en faisons pas assez, que nos députés seront pieds et mains liés par l’accord passé avec le PS et la majorité absolue qu’il détient à l’Assemblée Nationale. D’autres au contraire, diront que nous en faisons trop, que nous sommes des idéologues jusqu’au-boutistes, que l’environnement c’est bien gentil, mais c’est avant tout une contrainte supplémentaire, et qu’en filigrane les profits et les intérêts d’aujourd’hui valent bien mieux que la dette écologique et morale qui nous incombe.

Chacun sera bien libre de penser ce qu’il veut, de dresser son propre bilan, mais aujourd’hui une chose est sûre : l’écologie politique est bien présente au Sénat, à l’Assemblée Nationale, et dans le gouvernement. Elle avance progressivement, elle se construit parce qu’elle est constructive, même si les réalités qu’elle aborde ne font pas toujours plaisir à entendre.

Avec 18 députés, un groupe parlementaire qui est le seul à respecter strictement la parité, une députée écologiste du Puy-de-Dôme que je félicite une fois encore pour son résultat, et pour avoir mis fin à de longues décennies de Giscardisme, l’écologie politique sort grandie de ces élections. Il faut compter avec nous. Et quand bien même tous les enjeux environnementaux ont été largement mis au ban ou sous-estimés par les autres forces politiques et les médias, nous avons malgré tout reçu l’assentiment de plus de 800 000 citoyens, aux présidentielles comme aux législatives. Je les en remercie.

Notre assise politique et notre électorat ne sont bien sûr pas suffisants, mais ils sont constants sur ces deux élections, car nos électeurs ont compris que nous n’étions pas attachés à des mandats, mais à des valeurs, des principes, des combats. Ils votent pour des idées écologistes, de gauche, et ils refusent la personnification de ces élections trop souvent encouragée par es candidats. La France a trop souffert ces dernières années du présidentialisme d’un homme aujourd’hui porté disparu, pour retomber dans ce genre de travers.

La politique, telle que nous la concevons chez les écologistes, ce n’est pas de servir la soupe aux citoyens, qu’elle soit fraîche ou réchauffée, c’est bel et bien de prévoir, d’anticiper tous les corps et les domaines d’une société. La protection de l’environnement fait partie de ces priorités.

Alors non, ce serait bien mal nous connaître que de croire que nous resterons silencieux si la tournure des évènements ne nous plaît pas. Un accord politique n’est pas un accord moral béat où le suivisme muet ferait office de ligne de conduite.

Les écologistes n’accepteront pas que l’environnement serve de variable d’ajustement, ce qui semble malheureusement déjà être le cas en quelques semaines. 2 exemples :

- le maintien de toutes les compétences relatives à la « forêt » au sein du ministère de l’agriculture, une décision qui fera certes plaisir aux forestiers privés, mais qui ne permettra sûrement pas d’engager les transformations nécessaires pour protéger, valoriser et mobiliser la filière forêt-bois en France

- Puis, le jeu de chaises musicales dans le gouvernement, en pleine conférence internationale de Rio+20. Nicole Bricq a cédé sa place après avoir perdue son arbitrage ministériel sur les forages en Guyane contre Arnaud Montebourg, à la tête d’un ministère dont l’appellation fait froid dans le dos, le "redressement productif". Les forages pourront bientôt reprendre sans que le code minier soit réformé, mais avec une rente plus élevée pour l’Etat, de quoi se plaint-on chez les écolos ?

Quel que soit le niveau de pouvoir dans lequel se trouvent les écologistes, nous resterons vigilants et soucieux de faire-valoir nos convictions.

Nous le serons demain pour le tracé et l’utilité de la LGV POCL, comme nous le sommes aujourd’hui à l’occasion de cette Session, puisque notre groupe refusera de voter en faveur du contournement de Vichy et surtout du parc d’activités Logiparc sur les communes de Montbeugny, Yzeure et Toulon sur Allier.

Nous ne pouvons pas accepter que dans un contexte budgétaire aussi morose, la Région vienne dépenser plus d’un million d’euros dans un projet que l’on aurait presque l’outrecuidance de nous présenter comme un projet « écolo ». Ces 200 000€ de bonus de développement durable pour ce projet relèvent de la tartufferie écologique ! Où se situe le développement durable dans ce projet mes chers collègues ?

- Dans la destruction de centaines d’hectares d’espaces naturels et agricoles ?

- Dans la destruction de prairies, de haies, de landes, d’étangs, d’une zone humide de plus d’un hectare ?

- Dans l’anéantissement des espèces d’intérêt national et européen ?

- Dans l’analyse environnementale incomplète de ce projet, amenant l’inventaire faune flore à ne pas avoir été réalisé complètement avant l’enquête publique ?

- Dans le fort potentiel d’une voie ferrée qui traverserait le parc d’activité alors qu’il s’agit actuellement d’une voie unique, non électrifiée, qui n’est pas en bon état ?

- Dans l’utilisation des énergies renouvelables, alors qu’une étude sur son potentiel de développement est seulement en cours ?

En l’état, ce projet est une aberration écologique, et son utilité sociale pour l’Auvergne est du même niveau que la dissuasion nucléaire pour la France ! Loin d’être indispensable !

Je vous remercie,