Sortie de tunnel pour les trains d'aménagement du territoire ?
Par nicole rouaire le dimanche 21 novembre 2010, 10:46 - Actu - Lien permanent
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Au 1er janvier 2011 est créée à côté des TER et des TGV une nouvelle
catégorie de trains, les TET - Trains d'Equilibre du Territoire comprenant les
Corail inter-cités, les TEOZ et les trains de nuit LUNEA (1). L'Etat est
l'autorité organisatrice de ces 38 liaisons inter-régionales, mal aimées de la
SNCF car déficitaires. Ce statut devrait éclaircir un peu leur avenir. Les
régions comme l'Auvergne sont directement concernées
L'analyse de Pierre Pommarel, président de la Commission
"Environnement-Transports".
(1) ces trains ont longtemps été appelés les trains d'aménagement du territoire
Rappelons tout d'abord quel était jusqu'ici le statut des différentes
catégories de trains de voyageurs en France :
- Les trains régionaux TER ont une autorité organisatrice
(AOT) qui est le Conseil régional. Celle-ci définit les dessertes et les
services à assurer (par trains ou par cars). L'exploitation des trains est
confiée actuellement à la SNCF. Les relations entre l'AOT-région et
l'exploitant-SNCF sont régies par une convention d'exploitation qui fixe les
obligations de chacune des deux parties et prévoit la rémunération de
l'exploitant. La Région perçoit une dotation de l'Etat pour assumer
partiellement cette compétence. Celle-ci représente en Auvergne 67 M€ sur un
coût total de 85 M€, le reste étant donc financé par le contribuable régional.
La Région finance par ailleurs le matériel roulant qui est mis à disposition de
la SNCF.
- Les trains "grandes lignes" (aujourd'hui appelés "voyages
SNCF") comprenaient jusqu'à maintenant les TGV, les TEOZ et les trains Corail
inter-cités ainsi que les trains de nuit LUNEA. Ces trains sont actuellement
exploités par la SNCF, établissement public à caractère industriel et
commercial, à ses risques et périls, sans contribution publique et sous sa
seule responsabilité. Il n'existait, jusqu'ici, pas d'autorité organisatrice
pour l'ensemble de ces trains et la SNCF était donc libre de créer ou de
supprimer les trains en fonction de son seul intérêt commercial. Jusqu'ici les
TGV étaient les plus rentables mais cette rentabilité diminue désormais en
raison de l'augmentation importante des péages versés à Réseau Ferré de France
(RFF), le propriétaire des voies, et notamment pour les lignes à grande vitesse
où les péages sont désormais très élevés.
Au cours des deux dernières décennies, la SNCF a donc réduit
drastiquement le nombre des trains Corail classiques de jour et de nuit dont
les recettes ne couvraient pas les dépenses. En Auvergne, l'hécatombe a été
sévère :
- tous les trains Corail de jour Lyon – Nantes, sauf un, et le train de
nuit,
- les trains de nuit Lyon – Bordeaux, Paris – Béziers et Aurillac, Paris –
Nîmes,
- le Corail Lyon – Bordeaux Ventadour par Tulle sauf un jour par semaine,
- un des deux Corail Lyon – Bordeaux par Montluçon.
Malgré ces élagages sévères, l'ensemble des Corail inter-cités et LUNEA
représentent encore un déficit de 200 millions d'euros par an pour la SNCF,
qu'elle compensait jusqu'ici par les bénéfices réalisés sur les TGV. Et donc
des menaces récurrentes pesaient sur les survivants et notamment en Auvergne
sur le Cévenol (Clermont – Marseille) et l'Aubrac (Clermont – Béziers).
> Les T.E.T. en Auvergne :
Clermont-Ferrand – Marseille, via Langeac (Le Cévenol)
Clermont-Ferrand – Béziers, via St-Flour (L'Aubrac)
Lyon – Nantes
Clermont-Ferrand – Bordeaux, via Tulle (Le Ventadour)
Montluçon – Paris
Lyon – Bordeaux, via Gannat – Montluçon - Limoges
Ce qui change au 1er janvier 2011 :
Il est créé une nouvelle catégorie de trains, les Trains d'Equilibre du
Territoire (TET) comprenant les Corail inter-cités, les TEOZ et les trains de
nuit LUNEA. L'Etat est désormais l'autorité organisatrice pour ces 38 liaisons
et il est signé pour 3 ans une convention entre Etat et SNCF. Un financement de
210 M€ par an est prévu : il proviendra pour 35 M€ (17%) d'une taxe sur
les autoroutes (taxe d'aménagement du territoire) et pour 175 M€ (83%) d'une
taxe sur le chiffre d'affaire de la SNCF provenant des services non
conventionnés (soit essentiellement les TGV). La SNCF en sera donc toujours le
financeur essentiel mais cette fois obligé (via la taxe) et pas exclusif. (Dans
le futur, les nouveaux entrants pour les liaisons internationales, désormais
ouvertes à la concurrence, paieront aussi pour les TET). En contrepartie, la
SNCF sera autorisée à relever ses tarifs en 1ère classe. Par ailleurs, 100 M€
par an pendant 3 ans seront investis pour rénover le matériel roulant (plus de
2000 voitures Corail et 340 locomotives).
Notre appréciation sur cette évolution est :
- Très favorable sur le principe qui permet de clarifier
enfin les responsabilités de chacun. C'est l'Etat qui décide de l'offre et
c'est la SNCF qui exploite par convention pour les 3 années à venir avec un
financement compensant le déficit. Celle-ci n'aura donc plus intérêt à laisser
péricliter ces liaisons, voire à les euthanasier comme elle a trop eu tendance
à le faire ces dernières années (cf. le Cévenol et l'Aubrac !). Au contraire,
la SNCF aura intérêt à se montrer inventive et à montrer son savoir-faire afin
de se positionner positivement en vue de l'ouverture future des délégations de
service public pour les TET qui se profilent à l'horizon de 3 à 5
ans.
- Réservée sur la répartition du financement qui fait
insuffisamment contribuer les transports routiers et en particulier le système
autoroutier dont le développement forcené au cours des trois dernières
décennies a très largement contribué à déstabiliser les TET. C'est bien
l'usager du TGV qui va payer l'essentiel de la note ; ce n'est pas
logique. Pour nous, les proportions auraient dû être 2/3 autoroutes, 1/3
TGV.
- Inquiète sur l'absence de financement du renouvellement du
matériel qui deviendra inéluctable car la plupart des voitures Corail
ont plus de 30 ans. Mais la rénovation permettra d'attendre que la situation se
clarifie en matière de DSP (délégation de service public), les futurs candidats
devront sans doute financer le matériel.
- Déçue sur l'absence de perspectives de développement, les
créations ou plutôt les rétablissements de liaisons d'équilibre du territoire
qui ont été injustement sacrifiés ces dernières années, je pense en particulier
aux trains de nuit et de jour Nantes – Lyon et Bordeaux.