François Maugis, président de l’association Energie Environnement de La Réunion intervient régulièrement auprès des institutions et dans les médias pour défendre une réforme de notre modèle énergétique. Fervent défenseur de la filière hydrogène énergie notamment, il est convaincu que notre île peut-être à la pointe de la transition énergétique. L’un de ses nombreux et riches plaidoyers est ici présenté.
Les hasards de l’histoire et de la géographie ont déjà fait de l’île de La Réunion le territoire du Monde où l’énergie solaire est la plus présente. Les récentes évolutions technologiques vont lui permettre de s’affranchir presque totalement du charbon et du pétrole et vont ainsi en faire la première région verte du Monde.
Notre soleil abondant est à l’origine de ce miracle, mais pas seulement. Une conjonction d’intérêts semble se dessiner en faveur d’investissements conséquents pour que ce petit territoire soit en pointe dans la transition énergétique souhaitée par les cinq grands continents.
Tout le monde s’accorde à dire qu’il va falloir rapidement trouver de nouvelles énergies pour prendre le relais de nos réserves de pétrole en cours d’épuisement et de notre nucléaire en fin de vie. Oui, mais qui va ouvrir le bal ? Quelques pays d’Europe du Nord et quelques autres se sont lancés dans cette direction, mais les énormes investissements à débloquer tardent à venir.
« Décarboner notre électricité insulaire »
La révolution économique et industrielle générée par cette transition a en effet de quoi refroidir les meilleures volontés. Il en est tout autrement d’un petit territoire insulaire. Et le succès quasiment garanti de cette première opération terminera de convaincre les investisseurs continentaux pour se lancer dans l’aventure. Le programme d’équipement de l’île pour parvenir à ce résultat est connu dans ses grandes lignes. La première priorité est bien sûr de décarbonner notre électricité insulaire, autrement dit de supprimer pétrole et charbon de nos sources d’approvisionnement en énergie. Une fois encore, la chance nous sourit puisque notre relief et notre situation géographique sont particulièrement favorables. L’installation en altitude de réserves d’eau sur toute l’île est une garantie d’obtenir en permanence une réserve d’énergie hydraulique pour alimenter notre réseau lorsque le soleil ne brille pas.
Une panoplie de moyens à disposition
Par contre, en cas de surproduction d’énergie solaire, en particulier aux heures les plus chaudes, l’énergie électrique inutilisée pourra être injectée, soit pour remonter l’eau dans ces réservoirs d’altitude, soit pour alimenter divers dispositifs de stockage, soit enfin pour faire l’électrolyse de l’eau et produire ainsi l’hydrogène nécessaire à l’alimentation des piles à combustible des voitures électriques nouvelle génération. Les voitures électriques urbaines, quand à elles, pourront, sans complexe s’approvisionner en énergie sur le réseau électrique insulaire décarbonné sans crainte d’augmenter notre consommation d’énergies fossiles. Il restera bien sûr à installer des équipements complémentaires pour des réglages plus fins du débit électrique. Certains types de batteries sont particulièrement adaptés, mais il existe toute une panoplie d’autres moyens que nos ingénieurs savent parfaitement maitriser : volant inertiels, air comprimé, etc.
Cerise sur le gâteau, les stocks d’hydrogène constitués pour la mobilité (voitures, poids lourds, bateaux, etc. équipés de piles à combustible), pourront aussi être utilisés pour réguler notre réseau électrique au moyen de piles à combustibles de plus grande dimension, adaptées à cet usage. Enfin il faut ajouter au crédit de cette technique de stockage d’énergie que, contrairement à l’exploitation hydraulique classique qui perturbe durablement le cours de nos rivières, la technique du STEP (Stockage d’Energie par Pompage) n’a aucune incidence environnementale puisque les réservoirs d’eau sont remplis une seule fois lors du démarrage de l’installation qui fonctionne en circuit fermé.