Brigitte Allain ne se doutait pas que l'amendement au projet de loi pour l'égalité homme-femme qu'elle a déposé mardi soir à l'Assemblée nationale allait trouver un tel écho. Emmenés par l'élue du Bergeracois, 17 députés Europe Écologie-Les Verts (EELV) ont demandé la suppression de l'expression "en bon père de famille" présente dans divers textes du droit français.
Un amendement qui fait réagir, tant du côté de ceux qui y sont favorables, que des autres. Mais pour Brigitte Allain, il faut le replacer dans son contexte. "Nous l'avons déposé dans le cadre d'un texte de loi important sur l'égalité entre les hommes et les femmes, dans tous les aspects, aussi bien humains que sociaux."
- "Nous faisons autre chose"
À ceux qui prétendent qu'il ne s'agit que de "sémantique", l'élue de Bouniagues oppose un "non" catégorique et cite la devise "Liberté, égalité, fraternité". Et aux autres, qui se demandent si les députés n'ont rien d'autre à faire, elle sait aussi répondre. "Mais nous faisons autre chose aussi. Je travaille sur la loi d'avenir agricole, sur un autre texte traitant du développement de la solidarité internationale, et nous allons présenter un projet de loi sur la limitation des pesticides." Pour elle, "c'est le travail du législateur d'intervenir sur les grands sujets de société".
- À 21 ans déjà
Brigitte Allain balaie donc les critiques et se justifie. "À 21 ans, j'ai refusé de signer un acte de fermage à cause de ce terme. Le notaire m'a dit que je ne pouvais pas faire autrement. C'est parti de là. Je n'imaginais pas qu'un jour je serais à l'Assemblée nationale pour le faire supprimer. Et, plus récemment, j'ai été amenée à signer un autre acte comme quoi je m'engageais à gérer les biens de quelqu'un dont je vais devenir la tutrice, ‘‘en bon père de famille''." Une expression présente dans de nombreux textes, précise la députée EELV. "On la trouve dans le Code rural, dans celui de l'urbanisme." Elle devrait être remplacée par "raisonnablement".
L'expression incriminée est populaire, certes, mais "discriminatoire vis-à-vis du genre, qui sous-entend que la femme n'est pas capable de gérer". Et puis, Brigitte Allain estime que les termes font "l'amalgame entre un lien affectif, éducatif, et la notion de bonne gestion, ce qui n'a rien à voir". Et l'élue d'illustrer son propos : "On peut être une bonne mère de famille et ne pas savoir gérer un budget ou une exploitation, par exemple. Tout ça n'est pas en opposition."
Brigitte Allain estime qu'une telle décision était "nécessaire". "Il faut reconnaître la place de la femme dans la société. Et cela passe par les expressions. Notre société est fortement marquée par des années de patriarcat et de machisme. Il faut se donner les moyens de changer cela", conclut l'élue.