Préserver le milieu marin, développer une filière d’algues alimentaires en Bretagne
Session du Conseil régional de Bretagne du 11 octobre 2012
Breizh’alg
Intervention de Janick moriceau pour EELV
Le Conseil régional de Bretagne affirme son ambition à développer la filière des algues alimentaires. C’est une bonne nouvelle. Cette filière demande une forte exigence quant à la préservation de l’environnement marin, il faudra donc mettre en cohérence les politiques publiques pour que nos océans soient préservés. Malgré la volonté affichée des doutes et questions demeurent quand aux modes d’exploitation des algues.
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Que le Conseil régional de Bretagne affirme son ambition à développer la filière des algues alimentaires, c’est une bonne nouvelle.
Que ce développement mette en mouvement partenaires économiques, scientifiques, centres techniques et collectivités territoriales est aussi une bonne nouvelle.
Que le secteur des algues collectées soit pleinement intégré dans le projet également.
La création d’un comité d’orientation, le souci d’un développement s’appuyant sur une gestion intégrée de la zone côtière respectueuse des activités maritimes existantes témoignent d’une préoccupation démocratique que nous apprécions.
Nous ne pouvons ignorer ce que les algues ont représenté et représentent pour l’économie bretonne, pour tout le secteur halieutique, pour notre environnement littoral. La biodiversité exceptionnelle dont nous bénéficions, est pour nous, une grande responsabilité mais constitue aussi une formidable opportunité trop peu valorisée.
Ces dernières années ont montré que les équilibres marins sont fragiles. Nos activités, le réchauffement climatique peuvent générer de profonds dérèglements des écosystèmes avec le développement d’algues invasives qu’il s’agisse des phyto-planctons toxiques, des algues vertes ou brunes.
Construire une filière économique algue alimentaire d’excellence demande donc une forte exigence quant à la préservation de l’environnement marin, de nos eaux littorales et doit s’appuyer sur une bonne connaissance du fonctionnement des écosystèmes littoraux. Les écologistes que nous sommes s’en félicitent.
Je comprends le souci d’aborder progressivement le chantier « Breiz’Alg » en commençant par la filière alimentaire mais n’y a t-il pas un problème de cohérence : de nombreuses espèces produites et collectées ont de multiples usages et de ce fait, le maillon production est partagé entre plusieurs filières ou tout du moins les territoires concernés sont communs. Ne serait-il pas nécessaire pour une gouvernance efficace de décloisonner le maillon production?
Au regard de ce rapport je me permettrai de vous poser six autres questions auxquelles je n’ai pas trouvé de réponse dans le texte proposé :
1 – Je sais que certains ne verraient aucun inconvénient à transformer les baies bretonnes en vaste bassin d’incubation d’algues vertes et de faire de ces dernières, une matière première industrielle. En ce qui nous concerne, nous ne pouvons imaginer qu’un tel scénario, incompatible avec le maintien d’autres activités littorales et maritimes, puisse être retenu. Le Conseil régional envisage-t-il d’aller en ce sens ?
2 – Parmi les six axes prioritaires le second prévoit de développer la biomasse algale d’intérêt économique ce qui se traduit un peu plus loin par : « produire massivement les macro-algues d’intérêt alimentaire ».
Pour nous une biomasse d’intérêt économique n’est pas corrélée à « production massive » mais bien à une valeur ajoutée importante, une activité riche en emploi et c’est sur ces deux aspects que les efforts doivent se porter. Une production industrielle d’alginates à partir de macro-algues ne répond pas aujourd’hui, dans le contexte mondial, à ces deux enjeux.
Qu’entendez vous par production massive ? Pensez vous qu’elle est synonyme de développement durable ? ne pensez vous pas que c’est une annonce qui ne facilitera pas l’acceptabilité pour les autres usagers de la mer des futurs champs d’algues ?
3 – Nous pouvons arguer de la plus grande biodiversité algale au niveau mondial. Cela constitue une responsabilité importante et une chance au regard des résultats des recherches actuelles en particulier sur la santé humaine.
Le développement d’activités économiques dans le secteur des algues doit pouvoir s’appuyer sur une bonne connaissance de l’existant au niveau macro et planctonique.
Qu’est-il envisagé en parallèle de ce programme dans le domaine de l’inventaire, de l’observation ?
Aujourd’hui, les organismes scientifiques y sont présents de manière marginale dans ce domaine et les programmes que nous soutenons en font l’impasse.
4 – La transcription réglementaire de la législation européenne sur la qualité des eaux marines est à l’ordre du jour et le conseil régional est sollicité pour avis. Le projet Breizh algues affiche clairement la volonté d’une labellisation exigeante notamment biologique – en lien direct avec la marché – et dont le corollaire est une réglementation exigeante sur la qualité des eaux marines.
L’avis du Conseil régional sera-il discuté en session, sinon est-il envisagé qu’il soit ambitieux en cohérence avec une filière algues destinée à l’alimentation humaine?
5 – La sensibilisation des consommateurs sur l’intérêt en terme de santé de la consommation des algues y compris de manière condimentaire est aujourd’hui réelle. Depuis de nombreuses années avec bien des difficultés de très petites entreprises travaillent sur la transformation d’algues à destination alimentaire et voient aujourd’hui leur horizon s’améliorer. Pour autant, ils n’ont pas tous loin s’en faut les moyens humains leur permettant d’intégrer des groupes de travail régionaux, de participer à des programmes de recherche et développement.
Envisagez vous un dispositif d’observation et de soutien spécifique adapté aux TPE afin notamment de conforter et d’accompagner le développement de ces entreprises ?
6 – Des secteurs fortement porteurs, riches en valeur ajoutée sont en émergence qu’il s’agisse, par exemple, de la pharmacologie ou des matériaux bio-sourcés.
A moyen terme, avez vous la volonté de mieux accompagner ces nouveaux secteurs d’avenir?