La campagne
L’Aquitaine est-elle encore le pays de l’eau ?
L’agriculture a mal à son revenu avec moins de 20 à 30 % de baisse ces deux dernières années. Comment dans ce contexte là ne pas comprendre les manifestations de mauvaise humeur à l’annonce de règles restrictives dans le domaine de l’irrigation ?
Avec Midi Pyrénées, l’Aquitaine est la région qui a le plus développé l’irrigation ces dernières décennies. Nous en sommes bientôt à 40% des terres arables irriguées , près de 80% de l’eau utilisée va à l’agriculture et la plus grande partie pour produire du maïs. On a depuis trente ans couvert l’Aquitaine de cette plante magnifique, certes, mais exigeante en eau à une période de l’année ou il y en a le moins. Et pourquoi les paysans ne l’auraient ils pas fait puisque on subventionne les retenues d’eau, les équipements et l’Europe aide le plus fortement les hectares de maïs irrigué : jacpot !
Europe, État, Région, Départements tout le monde met la main au portefeuille, le nez sur le guidon. Pendant ce temps le climat se réchauffe , les sécheresses sont de plus en plus fréquentes, la qualité de nos sols se dégrade, les exploitations s’agrandissent, les cultures vivrières reculent. Il faut donc encore plus de retenues d’eau (petites, que dit la Région...pour ne rien changer), pomper dans nos rivières, nos nappes phréatiques etc... dans cette logique infernale, toute mesure de restriction sur l’eau est une menace sur le revenu de nombreux paysans.
Alors que faire ?
Il faudrait commencer par changer en profondeur la politique agricole commune en revenant à un soutien fort à la diversification, la pratique de l’assolement, et l’autonomie alimentaire de nos élevages (rompre avec l’exclusivité maïs/soja). L’échéance de 2013 en sera-t-elle l’occasion ? rien n’est moins sur !
Au niveau de l’État il faut mettre en place un système solidaire de compensation de revenu en cas d’accident climatique autrement plus efficace que la caisse actuelle de calamité.
Mais puisque nous sommes a des échéances électorales régionales, Que peut-on faire en Aquitaine ?
Réserver la culture du maïs aux zones les plus favorables de la Région et en culture de proximité pour certains élevages.
Exclure sa culture pour les agro-carburants, fussent-ils de deuxième génération.
Encourager des assolements diversifiés et adaptés à notre climat, structurer les commercialisations correspondantes. Mettre en place un plan protéine Aquitaine.
Remonter le taux de matière organique de nos sols(au trois quart perdu depuis 30 ans) par un travail adapté et le recyclage généralisé de tout ce qui est compostable, élément clé de résistance au manque temporaire d’eau.
Soutenir la recherche variétale en semences paysannes pour une meilleure adaptation à nos conditions pédologiques et climatiques.
Cibler les aides à l’irrigation sur les cultures vivrières avec un plafond de surface pour éviter les concentrations.
Développer l’agriculture biologique qui intègre ces pratiques agronomiques et la protéger des dérapages productivistes.
Telles sont les orientations de nature à sortir des impasses ou nous sommes, telles sont les pratiques pour que l’Aquitaine redevienne le pays de l’eau.
De l’agriculture dépend notre alimentation, la qualité de l’eau, la biodiversité , nos paysages, et sa contribution au ralentissement du réchauffement climatique, sans parler de la vitalité du milieu rural. Voilà pourquoi l’écologie est l‘avenir de l’agriculture, voilà pourquoi elle est l’objet de toutes nos attentions.
Bernard Péré, Europe écologie Aquitaine