INTERVENTION SUR LE SPORT PROFESSIONNEL ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

photo

Monsieur le président,

Monsieur le secrétaire d’État,

Mes chers collègues,

Je tiens d’abord à saluer le travail approfondi et consensuel mené par la mission commune d’information, même si je m’apprête à exprimer quelques nuances concernant certaines de ses conclusions.

Le sport représente 5 % environ du budget des communes. Toutefois, 70 % de son financement est assuré par les collectivités territoriales. Quel équilibre entre le sport spectacle, le sport de haut niveau et le sport pour toutes et tous ? Quelle équité entre les diverses disciplines sportives ? Comment favoriser la transparence dans les critères d’attribution des subventions ? Ce sont ces questions auxquelles répond en partie le rapport de la mission commune d’information.

Nous partageons le diagnostic selon lequel le financement du sport professionnel par les collectivités est aujourd’hui un « système à bout de souffle ». Ce financement important est diffus, parfois désordonné et délégitimé aux yeux de certains de nos concitoyens en période de crise budgétaire, même si la passion pour le sport professionnel reste vive.

Pour prendre un exemple local et pour le moins paradoxal de ces financements, la Mairie de Paris, sauf erreur de ma part ou changement récent, continue à verser chaque année des subventions importantes au PSG, au PSG Handball et à la Fondation PSG. J’ai également appris par la presse que le budget versé par un certain pays au PSG approcherait désormais le demi-milliard d’euros annuel.

Dans un tel contexte, on ne peut que se poser la question de la compatibilité entre certains financements et ceux qui émanent des collectivités territoriales.

Nous saluons plus particulièrement la proposition visant à cibler une collectivité de référence, probablement l’intercommunalité, pour le financement du sport professionnel. C’est un bon moyen de clarifier, de simplifier et, surtout, de rendre le financement plus transparent.

Toutes les mesures contenues dans le rapport qui sont de nature à favoriser la transparence, notamment via des bilans annuels exhaustifs publiés par les collectivités, inciteront également davantage au débat public et, sans doute, à un comportement plus responsable.

Par ailleurs, le rapport envisage la suppression des subventions pour les disciplines parvenues à maturité. Il s’agit d’une question de fond. Les structures professionnelles vivent-elles de leurs activités professionnelles ? Ont-elles encore besoin de subsides publics pour fonctionner ?

Enfin, la question du soutien aux fondations, dont le rapport ne fait pas l’économie, constitue une autre manière d’ouvrir le débat, même si nous nourrissons sur ce sujet un certain nombre de réserves.

La proposition visant à encourager l’acquisition des stades par les clubs professionnels, qui permettrait de trouver une sortie par le haut, est à double tranchant. Elle s’apparente selon nous à une fausse bonne idée.

D’un côté, on favorise l’autonomie des clubs, l’émergence d’un autre business plan pour le sport professionnel, et on réduit fortement, à terme, les dépenses des collectivités. À cet égard, la perspective est séduisante.

D’un autre côté, la collectivité perd la maîtrise d’un équipement public et les possibilités de réguler l’utilisation de l’enceinte, la politique tarifaire, la gestion énergétique du bâtiment et son partage entre les différents clubs du territoire.

Ainsi, si nous ne pouvons que saluer l’avancée apparente que constitue cette solution, nous constatons que, de fait, la collectivité risque de perdre ainsi la main sur de nombreux enjeux locaux importants. C’est sûr, on ne peut pas tout avoir !

Certes, il existe un modèle en apparence très réussi, celui des clubs de football allemands, qui s’inscrivent dans une dynamique vertueuse : propriétaires de leur stade, nombre de ces clubs ont réussi à consolider leurs finances sur des bases tout à fait saines et leurs résultats sportifs sont enviables. C’est toute la question de la poule et de l’œuf : nous envions ce modèle, mais avons-nous les moyens, ne serait-ce que sportifs, de l’adopter ?

Les premières initiatives en matière de construction de grands stades en France nous invitent d’ailleurs à la plus grande prudence: Je ne vous interrogerai pas de nouveau, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous avez fort bien répondu en commission, sur le stade du Mans, une très bonne initiative qui ne s’est pas forcément bien terminée.

Il n’est donc peut-être pas opportun de généraliser ce modèle de clubs propriétaires de leur terrain, qui témoigne d’un bon diagnostic, mais n’apporte pas une solution susceptible d’être dupliquée à l’infini.

Par ailleurs, extrêmement défavorables aux partenariats public-privé, nous, écologistes, ne pouvons que saluer la proposition n° 18 du rapport. Ces contrats sont, à long terme, trop coûteux – Philippe Séguin parlait de « crédit revolving » de l’État et des collectivités territoriales –, ces collectivités étant responsables in fine de l’équilibre financier du projet.

Plusieurs propositions du rapport posent cependant réellement problème.

Je ne rallumerai pas ici la polémique sur la FFT et le stade de Roland-Garros, même si, nous aimons tous le tennis. Je rappelle simplement que, si la Fédération française de tennis souhaite légitimement s’étendre, c’est au risque de buter sur le jardin des serres d’Auteuil, site classé à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques.

Si la FFT nourrit un tel projet d’extension, pourquoi n’envisage-t-elle pas d’aller ailleurs, dans une zone où l’installation pourrait être concertée, afin de rééquilibrer, au sein de la région d’Île-de-France, les infrastructures, plutôt que de donner une grosse structure de plus à une capitale déjà richement dotée.

Un autre point a appelé notre attention : la construction d’une salle de sport francilienne d’environ 10 000 places gagnerait également à être envisagée en périphérie, là où sont les spectateurs potentiels et les pratiquants.

Enfin, concernant l’organisation des jeux Olympiques à Paris, débat qui a animé une partie de la mission, nous considérons que c’est au mouvement sportif d’étudier la pertinence d’une candidature, via les ateliers qui viennent d’être constitués. Comme vous le savez, nous ne sommes pas fanatiques des grands travaux illimités et du BTP !

Enfin, j’aurais un regret très personnel à formuler : la question du sport professionnel féminin n’a absolument pas été abordée dans le rapport. Toutefois, nous avons pu constater au cours de votre audition, monsieur le secrétaire d’État, que vous accordiez à cette question une grande attention.

Nous espérons qu’une partie des conclusions de ce rapport pourront être suivies d’effets, même si, je le répète, celles qui concernent les grandes constructions, notamment d’un stade de rugby dans l’Essonne, ne recueillent pas notre aval, puisque nous pensons qu’il faut sortir d’une logique productiviste du BTP. Nous devrions réfléchir à des structures plus petites et, de ce fait, plus écologiques et mieux adaptées aux besoins des usagers.

(Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)

Pour aller plus loin, le site dédié à la mission ici

Remonter