« J’ai tourné tous les miroirs dans mon appartement. Je ne veux plus voir ma tronche, ça me fait pleurer » déclarait Wilfred de Bruijn sur France 5, mardi soir dans l’émission C’est à vous. Comme de nombreux Français j’ai découvert il y a quelques jours le visage tuméfié de cet homme courageux, « celui de l’homophobie » décrit-il lui-même. Un visage qu’il a choisi d’exposer, d’abord sur son profil Facebook puis relayé rapidement dans les grands médias. Un visage qui a été « utilisé comme un ballon de foot » par des agresseurs, ouvertement homophobes, samedi soir dans le 19ème arrondissement, alors qu’avec Olivier, son compagnon, il rentrait chez lui bras dessus bras dessous.

Selon les médias, depuis plusieurs jours les agressions homophobes sont en augmentation en France. Ce regain de violence glace le sang au moment même où l’on se félicite que le Sénat adopte l’article 1 du projet de loi sur le mariage homosexuel, le plus emblématique car c’est celui qui ouvre le mariage aux personnes de même sexe.

Et si cet article a été adopté par 179 voix contre 157, résonnent malgré tout encore les nombreuses interventions acides des représentants de la droite française durant des débats le plus souvent houleux.
Ce vote devient donc définitif, sauf rejet du projet de loi à l'issue de son examen par le Sénat. Et après ? Quel goût nous restera-t-il de ces âpres débats ? Ces relents homophobes souvent distillés dans un discours poli. Des paroles, comme le souligne Wilfred de Bruijn, qui sont suivies d’effet dans les actes : « Les mots sont très importants, ce sont des professionnels de la parole (…) ils disent « vous n’êtes pas comme nous » » Car oui, être élu c’est porter la responsabilité de ses discours et des actes qui en découlent. En cela je rejoins son point de vue lorsqu’il attaque ces « gens qui savent ce qu’ils disent au public, c’est leur métier ».

En tant qu’élu parisien cette agression me choque profondément. J’ai peut-être pensé à tort que le combat contre l’homophobie à Paris était presque gagné. On baisse la garde, et la réalité de cette violence inénarrable arrive toujours à vous surprendre. Alors, lorsque j’entends Wilfred de Bruijn sur France Inter ce matin dire que « Même à Paris, il faut toujours faire gaffe [si on veut se tenir la main dans la rue]», je ne peux le tolérer, je ne peux que m’indigner. Je m’interroge surtout pour les petits Parisiens dont j’ai la charge aujourd’hui, qui seront pour beaucoup les Parisiens de demain, dont une partie sera homosexuelle. Dans 20 ans, pourront-ils se prendre la main, s’embrasser, s’aimer sans avoir peur de se faire molester ?

Etre présent au rassemblement de ce soir, Place de l’Hôtel de Ville, est un devoir en tant qu’élu parisien, pour dénoncer la haine déversée depuis des mois contre les LGBT par les opposant-es au projet de loi, une haine qui s'est intensifiée ces dernières semaines, une haine inacceptable, impardonnable en France au 21ème siècle.

A ce soir donc,