Réforme territoriale: pour que les élus ressemblent enfin aux citoyens

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Par Gwendoline Delbos-Corfield

Dans une tribune parue dans la revue Prospective Rhône-Alpes Méditerrannée,  Gwendoline Delbos-Corfield expose sa vision de la réforme territoriale : mode de scrutin unique, simplification du millefeuille de collectivités, statut de l’élu et refonte de la fiscalité, autant de moyens pour revitaliser la société et ouvrir la voie à des politiques publiques audacieuses.

Les politiques publiques sont-elles des leviers pour agir réellement sur les évolutions économiques, sociales et environnementales du pays et changer la vie quotidienne des citoyens ? La politique peut-elle apporter des solutions aux problèmes rencontrés par les habitants ? Tout nouveau pas de décentralisation doit commencer par cette question.

Peu nombreux sont ceux qui s’intéressent au choix des projets et des élus qui décident de l’utilisation de l’argent public aux différents échelons territoriaux. L’abstention augmente, et ce sont justement ceux qui auraient le plus besoin d’améliorations structurelles qui votent le moins.

Comment pourraient-ils avoir confiance ? Le personnel politique et l’organisation administrative ne représentent ni les citoyens, ni les logiques de territoires, ni les idées nouvelles de la société. Obsolète, la réalité politique et administrative de ce pays est profondément injuste, adaptée à une minorité seulement de la population. L’innovation est souvent freinée par ces édiles et ces collectivités conservatrices, inégalitaires, mal réparties sur le territoire.

POUR QUE LES ÉLUES RESSEMBLENT ENFIN AUX CITOYENS : UN MODE DE SCRUTIN UNIQUE

Observez une assemblée de conseil régional : diversité des âges, parité des sexes, reflet des vagues d’immigrations, mixité sociale (encore insuffisante) mais aussi mélange des apparences et des looks à l’image de la société. Penchez-vous maintenant sur une séance de conseil général : de 0 à 10% de femmes, 50 ans de moyenne d’âge, cheveux grisonnants impeccables, costume cravate de mise, …

A l’image des cénacles, des conseils d’administration des grandes entreprises, mais aussi malheureusement de nos parlementaires. Sauf à vouloir garder des privilèges d’oligarchie politique, une rénovation institutionnelle doit instaurer le scrutin de liste proportionnel. Voilà qui permettrait l’émergence de toutes les sensibilités sociales, culturelles et politiques de la société et la parité nécessaire.

POUR RENDRE NOTRE MODÈLE COHÉRENT AU NIVEAU EUROPÉEN, SIMPLIFIER LE MILLEFEUILLE AUTOUR DE LA COMMUNE, L’INTERCOMMUNALITÉ ET LA RÉGION

Le grand enjeu incontournable des prochaines décennies, c’est évidemment l’adaptation au changement climatique et le défi du partage de l’énergie sans pollution supplémentaire. Nous devons apprendre à mieux mutualiser sur un territoire, éviter les gaspillages et les superpositions, avoir des productions soutenables. Pour mettre fin aux baronnies et à la compétition des territoires, il faut aller progressivement vers la disparition des conseils généraux, incompétents à l’échelle européenne.

Comme chez nos voisins, la région, renforcée, aura un rôle stratégique de prévision du développement des territoires, avec des schémas directeurs en matière d’aménagements, de déplacements, d’économie. Partenaires de ces régions chef de file, les intercommunalités, correspondants à des bassins de vie, seront autorités organisatrices pour le logement, le transport, la gestion des grands équipements.

La commune, terrain de la démocratie locale, répondra aux exigences de proximité. Les pôles métropolitains, super-structures technocratiques, institutionnalisant l’abandon des territoires ruraux, n’ont d’intérêt que pour leurs futurs présidents cumulards, trop heureux d’être chefs de riches principautés.

MODERNITÉ ET ÉQUITÉ SONT POSSIBLES EN ÉCHO À LA VITALITÉ DE LA SOCIÉTÉ

Deux chantiers déterminent la réussite de nos réformes : la démocratisation du statut de l’élu et la refonte de la fiscalité. Il ne pourra y avoir démocratie exemplaire avec le statut de l’élu actuel. Plus d’élus choisis par leurs pairs comme dans les communautés de communes. Suffrage direct pour tous.

Plus de cumul qui empêche la confrontation d’idées et qui concentrent tout le pouvoir dans quelques mains. En revanche, les élus ont besoin d’une protection sociale, d’un accompagnement pour le retour à l’emploi et d’un droit réaffirmé à la formation. Sinon, ne resteront que les rentiers, les fonctionnaires, les professions libérales surreprésentés parmi les élus locaux.

Les impôts locaux sont injustes et n’ont pas été révisés, les collectivités territoriales n’ont pas d’autonomie fiscale, les systèmes de péréquation entre territoires riches et pauvres demandent à être renforcés. Aujourd’hui, les habitants de certaines zones en difficulté et moins protégées payent parfois plus d’impôts. Si les taxes locales étaient harmonisées, la redistribution était favorisée, et la fiscalité écologique existait, nous retrouverions autonomie et équité.

Le système actuel est conçu pour conforter ceux qui sont élus dans un conservatisme confortable et frileux, les innovations sociales et environnementales sont empêchées, et le mille-feuille apparaît au citoyen toujours plus incompréhensible. Avec une proportionnelle généralisée, des échelons clarifiés et simplifiés, un statut de l’élu et une réforme de la fiscalité, nous pourrons espérer des politiques publiques audacieuses, prospectives, en adéquation avec les besoins de la société et de la planète.

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