Avancée du programme « Gares »: intervention de Jérôme Bourlet
Je crois que l’ensemble de ces différents projets de réfection des gares ferroviaires haut-normandes, présentés par M. le Vice-président aux Transports, montrent que nos concitoyens sont prêts à prendre d’autres voies que celle du tout-voiture pour leur mobilité.
Pourtant certains décideurs regardent encore l’avenir avec des yeux d’hier, et pense que l’avenir de la mobilité reste la voiture.
Mais les faits sont têtus et quelques rappels ne laissent aucun doute.
1) Concernant le coût du déplacement en voiture par rapport aux transports collectifs
Sur des grands trajets comme Paris –Caen, le coût en voiture s’élève à 14,70€ de carburant et 15,10€ de péage. Et je ne parle pas ici du coût annuel d’entretien d’une voiture qui varie entre 400 et 600 €. Pour le même trajet en train, le billet coûte entre 28 et 35 euros selon la période de réservation, on voit donc bien que le train est plus avantageux, et cela serait encore plus visible dans le cas d’abonnements notamment pour des trajets internes à la Haute-Normandie.
Si l’on précise ces données sur les coûts comparés des modes de transports en reprenant les chiffres issus d’une étude récente de la FNAUT[1], on voit bien que les écarts sont significatifs :
Coûts liés aux déplacements de proximité :
Le coût moyen du TER en 2011 est de 8 centimes par v.km (par voyageur par kilomètre). Le coût moyen du transport collectif est de 10 centimes par v.km et 11 centimes (hors transport scolaire) par car.
Le coût complet moyen d’un déplacement en deux-roues à moteur est de 33 centimes, le coût marginal moyen de 8 centimes par v.km, la distance moyenne parcourue de 9 km.
Enfin, la dépense moyenne de l’automobiliste est 27 centimes pour les trajets de proximité (77% des trajets effectués toutes distances confondues), dont 9,5 centimes pour le coût marginal (carburant + stationnement).
Coûts liés aux déplacements longues distances
– Autocar
Le transport routier de voyageurs couvre le transport régulier non subventionné (trafic international et trafic de cabotage associé) et le transport occasionnel (tourisme, manifestations sportives, culturelles ou politiques). Pour le transport régulier, le coût moyen pour le voyageur en 2011 été estimé sur la base des tarifs Eurolines, soit 7 centimes par v.km.
– Train
Les recettes des trains Grandes Lignes ainsi que le trafic en millions de v.km ont été fournis par la SNCF. Il en ressort un coût moyen de 11 centimes par v.km pour le TGV et de 9 centimes par v.km pour les trains Intercités. Le coût moyen du transport collectif terrestre est de 10 centimes par v.km.
– Voiture
Toutes distances confondues, le coût complet moyen de la voiture est de 24 centimes par v.km. Compte tenu du taux de remplissage plus élevé du véhicule lors des longs trajets (1,74 occupants contre 1,28 pour les trajets de proximité), il est de 19 centimes pour les trajets de plus de 80 km dont 6,5 centimes pour le coût marginal (carburant + péages).
2) Concernant les effets de la voiture sur la santé
Avec le lien certain entre l’émission des particules fines et le développement du cancer, comment faire avec un parc qui est composé à 80% par des véhicules diesels, qui est le mode de motorisation qui en produit le plus ? Alors je me pose la question, qui demain prendra en charge les dépenses de santé publique imposées par le traitement des pathologies respiratoires liées aux microparticules provenant des échappements des voitures diesels ?
3) Concernant nos engagements de réduire nos émissions de gaz à effet de serre
Il faut rappeler que 26% des gaz à effet de serre sont produits par les transports routiers. Les engagements du Grenelle 1 stipulaient « La politique des transports contribue au développement durable et au respect des engagements internationaux de la FRANCE, d’émission de gaz à effet de serre et d’autres polluants ».
Or nous n’en prenons pas le chemin. En effet, les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports ont augmenté de 13% entre 1990 et 2010 et la courbe ne semble pas s’infléchir. Il est donc grand temps d’agir avec courage et ambition et détermination. Nous ne pouvons nous fixer comme objectif des objectifs inférieurs à ceux affichés par le Grenelle de l’environnement.
La politique d’infrastructures de transports doit donc répondre à cette ambition de lutte contre le dérèglement climatique. Mais elle doit aussi s’inscrire dans un souci constant et aigu d’efficacité de la dépense publique. En effet dans le contexte actuel de tension budgétaire, il faut faire un choix entre une infrastructure routière comme le Contournement Est de Rouen, qui coûtera plus de 1 milliard d’euros, et des projets de développement du transport collectif.
Pour servir ces deux objectifs, 3 priorités doivent être à notre sens, au cœur de la politique d’infrastructures de transport:
– priorité au ferroviaire sur la route ;
– priorité à la mobilité du quotidien ;
– priorité au renouvellement et à la modernisation des réseaux existants.
Hélas les actions mises en œuvre pour aller dans ce sens restent insuffisantes : pour prendre l’exemple du transport de marchandises, la part du trafic routier a continué à progresser, passant de 76,5% en 1990 à 89% en 2011.
Pire encore nous voyons refleurir le serpent de mer du Contournement Est de Rouen comme solution.
Mais cette fois le consensus entre les élu-e-s n’est plus existant et la conférence de presse de la semaine dernière le prouve. Je tiens ici à applaudir la position de la commune de Val de Reuil qui propose de compléter le Contournement Ouest de Rouen plutôt qu’impacter encore notre territoire.
Pour conclure, nous voyons que nous sommes à un carrefour : soit le développement et l’accélération de l’accès aux transports collectifs, soit continuer à soutenir un modèle de mobilité à bout de souffle.
En mettant en avant le point d’avancement du programme Gares, nous voyons la direction à suivre. Ne nous laissons pas tenter par nos vieilles lunes du passé!