Alain Cordier

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2012. Les licenciements se multiplient en Bourgogne. Pour certains de ceux qui ont un emploi, stress et souffrances s’aggravent, jusqu’à la maladie parfois. Malgré des exceptions notables, à contre courant, la règle est à la dégradation des milieux naturels, des ressources et de la biodiversité. Des surfaces déraisonnables sont artificialisées chaque année dans la région. Et après des décennies de politiques de l’eau, assez coûteuses, il reste de nombreux points noirs, métaux lourds, PCB, pesticides. Ce n’est pas encore demain que l’on pourra se baigner dans la Saône ! Le bilan d’un élu régional est à replacer, avec une grande modestie, dans ce contexte difficile.

2012. En gagnant la Présidence de la République et l’Assemblée Nationale, le Parti Socialiste maîtrise, seul, à peu près tous les leviers du pouvoir. Dans les scrutins majoritaires, les écologistes ont à nouveau réalisé un petit score global au niveau national. Avec courage, au gouvernement, dans les régions, dans les villes où ils siègent, ils travaillent néanmoins à l’émergence de vrais changements. Le bilan d’un élu régional singulier n’a de sens que dans ce contexte d’un travail collectif cohérent de tout un groupe, de tout un mouvement.

L’année écoulée a permis des avancées ponctuelles importantes dans notre région, sous notre impulsion souvent, avec notre appui toujours. Nous avons ainsi mené des actions à contre courant des grandes tendances, mais le véritable tournant qui peut répondre aux crises n’est pas encore pris: la réforme territoriale s’annonce bien timide, la transition énergétique piétine, les grands choix en matière d’aménagement du territoire et de politique économique sont encore sous l’influence de modèles anciens. Pour faire avancer l’écologie, il faut continuer à conjuguer l’action institutionnelle dans les assemblées où nous sommes élus, et l’action sur le terrain, au côté des syndicats et des associations.

Transports

Quand certains accumulent les demandes localistes, parfois contradictoires, chacun réclamant son TGV avec une gare proche de sa ville, les écologistes ont coordonné réflexions et actions au niveau national grâce à la commission transports d’EELV, et grâce à de nombreuses réunions de concertation entre régions voisines. Nous défendons donc avec cohérence un rééquilibrage en faveur du rail et des transports collectifs attractifs. L’état bien médiocre de notre réseau ferroviaire et les contraintes budgétaires commandent d’investir en priorité dans l’amélioration et la modernisation du réseau existant. On obtiendrait ainsi des reports importants vers le rail dans les trajets les plus nombreux, ceux du quotidien tout en améliorant rapidement la qualité de vie des usagers.

Certains tronçons à grande vitesse sont à envisager pour l’avenir s’ils consolident un réseau cohérent ; d’autres sont ineptes, coûteux en finances et en impacts sur l’environnement, ou bien leur réalisation éventuelle est tellement lointaine qu’on perd son temps et son argent à financer des études précises dès maintenant. Nous sommes sur ces sujets moins isolés que l’an dernier, l’avis récent du Conseil Economique Social et Environnemental sur les infrastructures de transports va dans ce sens. Nous votons cependant sur ces questions souvent seuls contre l’ensemble des autres forces politiques. Le nouvel audit de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), rendu en octobre 2012, nous conforte aussi dans cette analyse d’une priorité à donner à la sécurisation, à l’amélioration du réseau existant, et l’annonce du ministre Cuvillier sur le passage de 1,7 milliards d’euros à 2 milliards par an pour le renouvellement des lignes est un signe encourageant. Mais l’effort aurait pu être plus net, plus fort.

En réclamant la VFCEA (Voie Ferrée Centre Europe Atlantique) parmi les 4 projets prioritaires, dans le projet d’avis sur les infrastructures de transports qu’il nous a proposé, le Président du Conseil Régional va dans notre sens et nous appuyons sans réserve cette demande. La VFCEA est un élément qui peut contribuer à construire un réseau solide pour les transports des bourguignons.

En revanche, placer les deux Lignes à Grandes Vitesses (LGV) POCL (Paris Orléans Clermont Lyon) et RR (Rhin Rhône) dans ce projet d’avis diminue beaucoup la force de cette première demande ! Les milliards investis dans les LGV seront perdus pour les milliers de transports quotidiens des travailleurs, des étudiants, des malades…

Il y a eu surenchère, tournant historique, changement brutal – et provocation ? – à demander la réalisation entière de la LGV RR, alors qu’il y a peu de temps, devant le Conseil régional, le Président Patriat déclarait peu crédible la réalisation des branches Ouest et Sud !

Par ailleurs, notre région est la dernière à financer les routes, tout à fait en dehors de sa compétence. Toutes les autres régions refusent d’investir un euro dans le goudron. Les écologistes sont les seuls à s’y opposer avec constance en Bourgogne, refusant encore six millions d’investissement pour les rocades de Beaune et Sens lors de la session d’octobre 2012, le prétexte étant parfois des engagements pris autrefois par J.P. Soisson, qui avait ainsi recueilli les fruits de promesses aux élus locaux sans prévoir le financement. Notre groupe demande – et finira par obtenir, parce que ce sera difficile de s’entêter dans l’erreur – l’arrêt dès le budget 2013 et pour l’avenir, du financement des routes. Seuls aussi, nous votons contre les largesses accordées aux quelques passagers intéressés par des commodités nouvelles en matière de transport aérien. Sur un de ces votes nous avons été rejoints par une partie du groupe communiste.

J’appuie les demandes des usagers et des cheminots qui refusent les dégradations du service, diminution d’horaires d’ouverture des guichets et suppressions de trains. Je travaille avec l’association SOS TER Bresse pour le rétablissement des trains au niveau de l’offre de 2011 et pour la promotion de la ligne Dijon-Bourg, avec le soutien de nombreux élus locaux et des forces économiques de la Bresse. Des travailleurs ont dû renoncer au train après les suppressions survenues fin 2011, qui ont permis à la région d’économiser à peine un trentième de ce qu’on donnait avec largesse aux routes et aux transports aériens ! Je défendrai ces idées sur le réseau ferroviaire en Bourgogne et sur les axes Paris-Méditerranée lors d’un déjeuner qui réunira début décembre à Paris six à dix élus écologistes et Guillaume Pépy, qui dirige la SNCF.

Territoires

Depuis bien longtemps les écologistes proposent d’organiser les institutions locales de façon plus démocratique, plus simple, plus lisible. L’empilement des structures actuelles complique la tâche des élus et rend les démarches intercommunales totalement opaques pour les citoyens. Devant la commission Balladur en 2009, nous proposions de passer de 8 niveaux territoriaux possibles à « un système très simple articulé autour de 3 niveaux de collectivités locales qui correspondent à l’avenir : les communes, les communautés et les régions, avec un mode de scrutin identique… Ces communautés prendraient le nom d’agglomérations, en zone urbaine, ou de pays, en zone rurale ou péri-urbaine ». Il faut conserver et respecter l’échelon communal, qui a sa pertinence pour des missions de proximité, il faut aussi renforcer les régions sur les compétences où elles permettent des progrès, et entre ces deux échelons, il faut simplifier vraiment et aller à l’efficacité que donnerait un unique niveau de gouvernance, pays ou agglomération.

Ces propositions sont confortées par l’évaluation des actions qu’ont pu mener les pays, malgré un contexte administratif lourd. Ils ont constitué la seule innovation des dernières décennies pour nos territoires ruraux, la seule remise en cause d’ un système archaïque et clientéliste qui ne répond plus aux exigences actuelles en matière de cohérence de l’action publique, de développement soutenable, de démarche de projet, de démocratie participative.

J’ai défendu ces propositions dans la commission de Saône-et-Loire chargée, sous l’autorité du Préfet, de revoir la carte de l’intercommunalité, et je suis intervenu dans les débats sur la réforme territoriale conduits par le Sénat. A Lyon, devant le congrès de l’association des régions de France, la ministre Marylise Lebranchu a malheureusement conclu par un discours sans grand contenu. Quelques compétences actuelles des régions seraient renforcées, accompagnement des PME et formation, les moyens financiers restent dans le flou, ira-t-on vers une réformette sans envergure ?

Je consacre beaucoup de temps au Pays de la Bresse bourguignonne, que je préside depuis 2006. Le travail collectif que nous y menons depuis sa création en 2004 a permis bien des avancées qui auraient été impossibles sans l’action unie et cohérente de ces 88 communes. Nous préparons une journée de réflexion et de proposition qui réunira le 14 décembre 2012 les Pays de Bourgogne.

Energie et environnement

J’ai conservé de nombreuses missions sur ces sujets, qu’il est impossible de développer dans le cadre de cet article.

  • Concernant la biodiversité, j’ai été élu à la présidence comité de suivi de deux sites Natura 2000 concernant les prairies alluviales de la Saône et de la Grosne. Cette année, on y a achevé l’étude cartographique des milieux ouverts et des haies, soixante contrats ont été passés avec des agriculteurs, essentiellement pour arrêter la fertilisation et pour des retards de fauche permettant la nidification au sol d’espèces fragiles, une étude a été réalisée sur les populations de chauve souris forestière. L’établissement EPTB Saône-Doubs, dans lequel j’assure, au bureau, la mission du suivi des affaires financières, est chargé de la gestion de ces sites.
  • J’appartiens aussi au comité de bassin Rhône Méditerranée, et nous défendons une politique de l’eau ambitieuse dans ce cadre avec mes collègues écologistes des autres régions. Le refus des grands partis d’agir vraiment sur les causes des dégradations et des pollutions rend néanmoins les progrès très coûteux, et très lents. Nos rivières restent dans un état souvent médiocre, la pollution par les PCB notamment n’a pas trouvé de solution satisfaisante. J’apprécie et je soutiens sur ces problèmes d’eau et d’environnement, la qualité de l’action de la CAPEN, qui fédère avec efficacité les associations environnementales de Saône-et-Loire. J’espère qu’il sera possible prochainement de créer cette grande fédération bourguignonne de l’environnement qui serait un bon interlocuteur pour le Conseil régional, avec une reconnaissance et des moyens de fonctionnement nous rapprochant de la situation de Rhône-Alpes.
  • En Bresse, nous avons continué à défendre bocage et chemins ruraux, avec insistance, sur le terrain et auprès du Préfet. Une journée consacrée aux milieux naturels a permis au Pays de la Bresse bourguignonne et au Conservatoire de faire le point et d’envisager des protections nouvelles, une publication résumera débats et conclusions. Nous préparons la longue mise en place d’un schéma de cohérence territoriale. Un point info énergie a été renforcé pour le conseil aux particuliers en matière d’économie et d’énergies renouvelables.
  • Sur la transition énergétique, j’ai animé des réunions publiques de présentation du projet « Négawatt », basé sur des propositions d’experts et des technologies existantes. J’ai aussi participé aux mobilisations locales ou nationales contre le nucléaire.
  • L’idée d’un parc national de zone humide dans la basse vallée du Doubs m’avait opposé à une présentation apocalyptique du projet par la chambre d’agriculture. J’ai souhaité reprendre des relations apaisées avec la chambre de Saône-et-Loire, pour mener le débat sur les mutations indispensables des politiques agricoles, sans gommer nos divergences mais en ne bloquant pas tout contact après ce très vif conflit autour du parc. J’ai ainsi été invité par le président de la chambre aux débats du premier trimestre 2012 sur l’avenir de l’agriculture dans le département, et mon travail en commission, mon expression publique devant des centaines d’agriculteurs ont été pris en compte, on a compris je pense qu’en défendant la santé des producteurs et des consommateurs nous voulions redonner toute sa noblesse à la profession agricole.

Ceux qui de tous côtés caricaturent notre action doivent comprendre que participer à la vie démocratique du pays, entrer dans ses institutions, c’est donner de l’ampleur à nos indispensables actions de terrain. Il serait facile de rester un groupuscule pur et dur, ne participant à aucun exécutif, il serait facile à l’opposé de rentrer dans le rang et de renoncer à celles de nos propositions qui rencontrent encore les plus vives oppositions. Le chemin entre ces deux écueils est étroit, mais nous prouvons chaque jour qu’il existe.

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