29 juin 2012 : intervention générale liminaire
Intervention de Jacques Fernique
Monsieur le Président, chers collègues
Monsieur le Président, j’ai bien entendu votre disposition politique affirmée ce matin. Je vous cite de mémoire : « Il s’agit (après la présidentielle et les législatives) de montrer notre capacité à dépasser les querelles et les clivages pour nous concentrer sur l’essentiel. » Et bien, j’y souscris, Monsieur le Président et je souhaite que déjà le climat du débat de ce matin et les mots employés par les uns et les autres soient au diapason de cette disposition.
A l’issue de cette longue phase au cours de laquelle le suffrage universel a parlé et a choisi, notre Alsace est à présent face à un choix. Celui du blocage ou celui du mouvement.
Maintenant que le mouvement du changement s’engage sur les fronts de l’emploi, de la revitalisation industrielle, de la conversion écologique, de l’égalité territoriale et des transports durables, notre Région et nos départements n’ont certes pas à renier l’attachement politique particulier qu’ils viennent de renouveler, mais ils ne peuvent pas pour autant se calfeutrer, s’immobiliser dans une posture mécanique de refus, et surtout pas se borner à servir de porte-voix régional à une UMP nationale en phase de reconstitution et de réparation.
Non, chers collègues, sur le front de l’économie, de l’emploi et de la formation, nous ne pourrons pas nous payer le luxe de regarder passer les trains que j’espère bien cadencés des politiques nouvelles. Quand le chômage massif et le différentiel important avec nos voisins mettent l’Alsace en situation critique, c’est une mobilisation sans arrière-pensée politicienne qui s’impose : l’Alsace doit être à l’initiative et tirer pleinement partie des opportunités, des outils qui vont être mis en place.
Certains jadis avaient cru en une nouvelle croissance alsacienne dont le Bioscope aurait été figure de proue : nous tournons la page de cette erreur : il s’agit à présent de construire un projet partagé dans lequel les Alsaciens puissent se reconnaître et se projeter. L’échec du Bioscope est sans doute aussi celui d’un certain autisme, d’un entêtement parfois aveugle : ne reprenons pas ces chemins qui ne mènent à rien.
Autre défi particulièrement critique, celui de COOP Alsace. Les logiques portées par ceux qui sont aux commandes de la Coop et ceux qui aspirent à en récupérer des parts consistantes ne sont pas tout à fait celles de l’intérêt général, celles du bien commun. Notre Région, nos collectivités ont à faire bouger les lignes si nous voulons éviter que le seul souci de rentabilité engendre un déficit social d'envergure et mette à mal les actions et filières développés par plusieurs axes politiques de notre collectivité :
- par la perte ou la précarisation de nombreux emplois,
- par l'affaiblissement des filières courtes,
- par l'appauvrissement de l'offre de services de proximité sur nos territoires,
- par la rupture d'un lien de solidarité avec les populations vulnérables (les personnes âgées, les personnes à mobilité réduite, les ménages pauvres).
Pour Coop Alsace, notre Région doit donc faire preuve de son exigence et de sa cohérence : nous n’aidons pas d'une main, pour laisser faire, de l'autre main, la destruction. Le Conseil Régional peut aussi jouer un rôle irremplaçable en contribuant à la mise en cohérence des documents d’aménagements commerciaux.
La page se tourne après 40 ans sur ce vain projet qu’aura été le Grand Contournement Ouest : allons-nous perdre notre temps à ressasser des illusions, à tester des slogans caricaturaux pour les municipales à venir, ou bien saurons nous co-construire les bases d’un aménagement du territoire fondé sur des transports et une urbanisation non seulement maîtrisés mais aussi profondément réorientés au regard des impératifs du développement durable. Non, notre collectivité ne peut pas s’enferrer dans le blocage, dans la politique de la chaise vide comme elle l’a fait hier. La décentralisation va entrer dans une nouvelle phase qui verra se renforcer considérablement la Région comme autorité organisatrice des domaines clés de l’aménagement du territoire : l’Alsace va-t-elle donc décliner cette grande opportunité ?
Sur le front de la transition énergétique, notre Région va pouvoir conforter, renforcer son implication pionnière. Pas en freinant le mouvement de fermeture des 2 réacteurs de Fessenheim, mais bien plutôt en soutenant la mutation de l’efficacité énergétique et la montée en puissance des renouvelables. C’est ce que nous allons faire aujourd’hui en approuvant le schéma climat air énergie : il s’agit de maintenir ce cap. C’est celui de l’emploi et de la vitalité économique.
Enfin s’il est un chantier où l’Alsace ne doit pas manquer, c’est celui du nouvel acte de décentralisation. La question est simple : après le changement de majorité nationale, notre résolution au Conseil Unique est-elle assez solide pour se maintenir et pour réussir ? Il va falloir de grandes qualités de coopération, de dialogue, de détermination aussi pour mener à bien cette fusion, cette décentralisation différenciée, cette avance que l’Alsace et d’autres régions aussi aspirent à prendre. Les forces du blocage n’ont pas dit leurs derniers mots, les conservatismes de tous bords s’accrocheront à toutes les difficultés, à tous les malentendus, à toutes les mauvaises fois : à nous de tenir et d’être résolument dans le mouvement.
Je vous remercie de votre attention.