Cinq ans et demi après le début de la crise financière, malgré l’émergence de l’Union Bancaire, l’Europe ne s’est toujours pas doté d’un véritable outil commun de régulation. Pourtant à la fin 2008, d’une seule et même voix les autorités financières, les banques centrales et les dirigeants des grandes puissances internationales s’étaient écriés : plus jamais ça.
En Europe, une taxe sur les transactions financières est sur la table. Sur le modèle de la taxe Tobin, elle concernerait 0,1% des échanges d’actions et obligations et 0,01% des produits dérivés. Si elle était appliquée, elle pourrait rapporter 57 milliards d’euros par an. Problème, cette idée est loin de faire l’unanimité. Seuls 11 pays européens sont pour. Conséquence, le montant des recettes est lui aussi presque divisé par deux : entre 30 et 35 milliards d’euros annuels escomptés. Même en France, le projet européen est contesté. Cet été, l’ancien ministre de l’économie et des finances, Pierre Moscovici l’avait jugé « excessif ». En coulisse, Bercy aurait même fait pression pour revoir à la baisse le projet d’une TTF européenne. Pas question pour le gouvernement français de voir émerger une taxe d’envergure. A chaque nouveau rendez-vous bruxellois, Paris exige de mettre en place des exceptions et toujours plus de conditions d’exemptions.
En France, on se souvient, lors de la dernière campagne présidentielle de l’engagement numéro 7 du candidat François Hollande. Il promettait une stricte séparation des banques de dépôt et des organismes tournées vers la spéculation. La réforme adoptée depuis n’est qu’une réponse très partielle au serment de l’actuel président. La taxe française sur les transactions financières ne touche qu’une infime partie des activités spéculatives. A la différence du projet européen, elle ne concerne que les sociétés qui dépasse le milliard de capitalisation, prévoit une retenu 0,2% du montant de l’achat d’actions et surtout épargne les règlements différés.
L’Union bancaire : union précaire
Au niveau Européen, l’annonce d’une Union Bancaire a pu faire croire à une prise de conscience, mais peu d’actions concertées impactent les dérives de la finance. A, la mi-septembre 2013 les parlementaires européens ont voté un droit de regard sur les grandes banques européennes. Conséquence, à partir de l’automne prochain, le MSU (mécanisme de supervision unique), sera le premier système européen de surveillance bancaire sous l’égide de la BCE.
Depuis le début de la crise qui a impactée la zone euro, le fond de résolution européen était un serpent de mer.Là aussi, son principe vient d’être validé. Il atteindra 55 milliards d’euros à terme, dans 8 ans. Le fond pourra faire office de pansement pour les établissements bancaires malades afin que la charge ne pèse pas sur les finances publiques. 55 milliards d’euros c’est un début, mais c’est peu quand on les compare avec les 12 milliards nécessaires à la recapitalisation du seul secteur bancaire du Portugal (sur les 78 milliards du plan de sauvetage portugais). Pour l’ONG Finance Watch, c’est une » goutte d’eau » dans l’océan du monde financier et « l’existence des banques too big to fail nuit la crédibilité du mécanisme « .
Les bonus enfin limités
Quand on évoque les problématiques liées au monde de la finance on pense aussi d’emblée aux super-bonus et à l’opacité des activités bancaires. Ces dernières années, Philippe Lamberts, eurodéputé belge Ecolo est souvent monté au créneau pour lutter contre ces dérives. La dernière directive européenne sur les fonds propres réglementaires (CRD IV) où il était rapporteur en est l’illustration. Voté en février 2013, l’accord qui devrait entrer en vigueur en 2015 va permettre de plafonner les bonus et d’en savoir plus sur les activités bancaires jusqu’alors dissimulées. Dans quelques mois, les banques auront l’obligation de diffuser le détail de leurs activités y compris les impôts et les subventions allouées. Les banques « géantes » seront également concernées avec une pression sur les fonds propres qui pourra, au cas par cas atteindre les 3,5%
Même si, depuis 2008, les actions menées par l’Union Européenne vont dans le sens d’un meilleur contrôle de la finance. Le vieux continent reste toujours assujetti aux aléas de la spéculation. Les risques persistants de dumping fiscal, la liaison dangereuse entre les banques et les gouvernements ou encore le flou qui entoure le shadow banking sont autant d’arguments qui font penser que l’Europe n’est pas encore prête à encadrer la finance de manière concertée.