Ce mercredi 26 mars, le président américain Barack Obama se rendra pour la première fois dans la capitale belge. Il y sera question du TAFTA, l’accord très décrié qui vise à réglementer la future zone de libre échange Europe – État-Unis.
Barack Obama se déplace à Bruxelles à l’occasion du sommet entre l’Union Européenne et les États-Unis. Au programme de la journée, une réunion avec le président du Conseil de l’Union Européenne Herman van Rompuy et une entrevue avec le président de la Commission Européenne José Manuel Barroso. Les discussions devraient principalement porter sur l’accord de libre échange transatlantique TAFTA (acronyme anglais pour transatlantic free trade agreement). Également connu sous le non de TTIP, le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement est négocié depuis juillet 2013. Il figure en bonne place sur les agendas européens et américains.
François Hollande veut « une conclusion rapide »
Preuve que le dossier est important, en février lors de son voyage au États-Unis, François Hollande avait appelé à « une conclusion rapide » de l’accord de libre-échange. En guise de prélude au sommet Europe – États-Unis, Bruxelles a accueilli entre les 10 et 14 mars le quatrième round des négociations sur le commerce et les investissements entre les deux superpuissances. Le négociateur en chef américain Dan Mullaney est sorti satisfait de ce nouveau cycle de pourparlers. Son homologue européen, Ignacio Garcia Bercero a lui insisté sur le fait que « rien ne remettra en question la législation européenne sur la sécurité alimentaire ». Ces négociations ont été la cible de critiques. La société civile américaine, plusieurs syndicats européens, des partis politiques et des associations de défense des consommateurs reprochent un manque de transparence et les pressions exercées par les lobbies américains. Plusieurs manifestations ont eu lieu devant la Commission Européenne.
TAFTA : un accord contesté sur le non-tarifaire
Le futur partenariat a pour but l’établissement de normes communes. Il y a quelques années, ce sont les droits de douanes qui posaient problème des deux côtés de l’Atlantique. Aujourd’hui réduite à hauteur de 3% sauf exceptions, cette barrière douanière n’en est plus une. Le principal point d’achoppement commercial entre l’Europe et les États-Unis ce sont les normes. C’est donc sur les questions non tarifaires que se base le TAFTA. Les partisans de l’accord mettent en avant que l’établissement d’une telle zone de libre échange aurait pour conséquence une hausse de la croissance mais aussi des créations d’emploi. Selon plusieurs études, plus de 100 000 emplois pourraient être crées en France et l’augmentation des exportations européennes atteindrait, à terme les 28%.
Sur ce marché potentiel de 820 millions de consommateurs, qui pèse la moitié du PIB mondial, les opposants se font aussi entendre. Le risque de délocalisation des entreprises est un des arguments qui revient souvent. La législation relative au droit de la vie privé est aussi très discutée. En Octobre 2013, suite aux révélations des pratiques d’espionnage menées par la NSA, le Parlement Européen avait exprimé des doutes concernant la zone de libre échange. Réuni à Strasbourg les députés européens avaient d’ailleurs réclamés la suspension de plusieurs accords. La Commission Européenne n’y avait pas donné suite.
Les citoyens européens auront-ils leur mot à dire ?
Plusieurs points sont particulièrement sensibles en Europe. Les normes de traçabilité alimentaire seraient menacées en cas d’adoption du TTIP. Ainsi, l’arrivée de la ractopamine, anabolisant interdit en Europe mais largement utilisé dans les exploitations agricoles nord américaines pourrait susciter un véritable tollé. La question des OGM ferait son retour sur le devant de la scène. Une fois l’accord commercial transatlantique signé, l’importation de produits fabriqués aux Etats-Unis contenant des organismes génétiquement modifiés pourrait être généralisée. Pour ses détracteurs, l’accord fait aussi l’impasse sur l’ensemble des questions environnementales. On évoque ainsi une généralisation du recours au gaz de schiste une fois le TAFTA ratifié. Les vingt huit s’inquiètent aussi d’une possible privatisation croissante des services. L’association des maires allemands a déjà fait part de sa crainte d’une concurrence déloyale concernant la distribution d’eau ou d’électricité mais également concernant l’éducation. Enfin sur le plan culturel, l’exception française défendue ces dernières années pourrait elle aussi être remise en cause.
Les citoyens européens sont pour l’instant les grands absents de ces négociations. Pour y remédier, une consultation publique a été annoncée par Karel de Gucht, le commissaire européen au commerce. Elle ne concernera cependant que le volet protection des investissements du texte. La finalisation de l’accord était initialement prévue pour 2015, on annonce désormais l’année 2016 comme échéance.