QUELLES LEÇONS TIRER DE L’ÉTUDE SUR LE MAÏS TRANSGÉNIQUE NK 603 ? les parlementaires s’y penchent
L'audition organisée par l'OPECST, l'Office parlementaire d'étude des choix scientifiques et technologiques, lundi 19 novembre, avait pour objectif de tirer les leçons du traitement de l'étude de Gilles Eric Seralini sur les OGM.
Organisée sous forme de table-ronde, l'audition a réuni tout l'après-midi plus de 20 intervenants, essentiellement des scientifiques et des journalistes.
Stéphane Le Foll a introduit la réunion avec ses mots encourageants mais contournant quelque peu le débat du jour : « Quand j’ai vu cette publication, j’ai jugé qu’il fallait qu’elle soit expertisée, mais j’estimais aussi que quels que soient les résultats de l’expertise, il y avait des questions posées depuis longtemps ; il existe depuis longtemps un débat sur comment on peut faire évoluer les règles concernant les OGM… Ce débat doit être porté à l’échelle européenne, notamment en ce qui concerne les études sur 90 jours. Je pense que les OGM proposés aujourd’hui ne sont pas la bonne solution… Il faut être objectif mais on doit ouvrir un débat plus large sur le développement agronomique et l’agro-écologie. »
Lors de la première partie, sur le fond, les scientifiques invités ont exposé que si l'étude de Gilles Eric Seralini est insuffisante pour démontrer à elle seule et de manière certaine les effets nocifs de la combinaison du Round Up et du NK 603", en revanche ses résultats sont troublants et appellent d'urgence à la réalisation d'études complémentaires sur des échantillons plus significatifs statistiquement et plus longtemps.
Gilles Eric Seralini a fait passer quatre messages principaux durant l’après-midi :
1. Il regrette que le débat de l’OPESCT et plus globalement le débat scientifique ne porte pas sur le lien pesticide Roundup et OGM, mais seulement sur les OGM. Car on ne peut pas dissocier l’un de l’autre, puisque les OGM sont créés pour être résistants aux pesticides ou en contenir eux-mêmes. Cependant les scientifiques s’appliquent à distinguer les deux : études sur OGM d’un côté et étude sur toxicité des phyto de l’autre, alors que c’est la combinaison des deux qui est dangereuse ! Quand les « effets cocktails » seront étudiés, on découvrira encore de nombreux scandales. Ce message ne reçoit pas encore un bon accueil. Il faudra encore d’autres lanceurs d’alerte.
2. Il demande des études à long terme. Son étude est la plus fouillée et la plus longue sur le sujet. Cela est entendu y compris par l’ANSES et le HCB qui demandent la même chose. A ce sujet il convient de distinguer les deux organismes, l'ANSES étant plus mesurée et constructive dans ses analyses tandis que le second porte ses jugements de manière plus partisane en portant des critiques sur l'étude mais aussi sur la personne de G.E.S.
3. Il demande la publication des données brutes, et la transparence. Il propose à la firme Monsanto d’aller déposer ses études chez l’Huissier, il a fait de même, afin de comparer ce qui est comparable.Il faut veiller et œuvrer à donner des moyens à la recherche pour réaliser d'autres études de long terme et imposer la même exigence et rigueur scientifique aux industriels et privés que ce qui a été demandé à G.E.S. Cet aspect a été tout à fait entendu par M. le Déaut, qui a insisté sur ce point à diverses reprises.
4. Il préfère exiger une expertise contradictoire à une expertise indépendante (qui est irréaliste, selon lui).
G.E.S. a permis de porter la controverse sur les OGM sur le terrain réservé jusqu’à lors aux promoteurs des OGM : la science ; auparavant le débat se situait sue le plan politique, sociétal, éthique. C’est une grande victoire que d’avoir insinué ce doute, dans la communauté scientifique spécialisée, bastion de la défense des OGM. Son étude a été publiée dans une revue scientifique internationale à comité de lecture (garantie de sérieux dans la conduite du projet de recherche) et elle est la première étude de long terme à étudier effets combinés du pesticide et d'un OGM. En ce sens, il a réussi son coup en provoquant le débat, en pointant les biais et la partialité des études réalisées par les industriels, les conflits d’intérêt et en gênant suffisamment pour faire appeler à la réalisation d'études complémentaires, et de remise en cause des processus d’évaluation européens.
Les écologistes soutiennent M. Seralini dans son rôle de lanceur d'alerte. Ils ont pu exprimer ce soutien à diverses reprises, lors des auditions réalisées à l'Assemblée ou au Sénat; Comme vient de le rappeler l'adoption de la proposition de Loi sur les "lanceurs d'alerte" par le Sénat, les Parlementaires ont un rôle à jouer pour permettre aux scientifiques (et autres experts) de jouer un rôle citoyen.