Taxe poids lourds et agriculture : Brigitte Allain regrette une réponse technique du Gouvernement à une question politique
Taxe poids lourds et agriculture : Brigitte Allain regrette une réponse technique du Gouvernement à une question politique
Brigitte Allain, Députée de Dordogne, lors de la séance des questions au Gouvernement du mardi 29 octobre, a alerté le Premier Ministre sur la nécessaire réorientation de l’agriculture française. Réagissant à l’annonce de la suspension de la taxe poids lourds, « détonateur de l’expression de la crise du modèle agroalimentaire », elle a soutenu que cette mesure était un des leviers pour la territorialisation de l’agriculture. Elle cite également les leviers du soutien aux exploitations économes et autonomes et du maillage du territoire par les outils de productions.
Les écologistes regrettent « ce mauvais signe, traduisant une inconstance gouvernementale, une perte de confiance, voire de défiance ». Ils demandent au Premier Ministre de mener une politique cohérente avec une ligne ferme, de long terme, accompagnant la transition pour un avenir meilleur.
Le Ministre en charge de l’agriculture, Stéphane Le Foll, a répondu de façon très technique à une question politique, s’arrêtant uniquement sur l’agriculture bretonne et le plan présenté il y a quelques semaines par le gouvernement, dont l’épine dorsale serait la méthanisation, qui permettrait, à elle seule : « si les mesures étaient bien mises en œuvre, de supprimer les algues vertes dans 10 ans ».
Brigitte Allain conclu : « Un tiers des paysans a disparu ces dix dernières années, si l’on doit attendre encore 10 ans pour rénover le modèle, il ne restera plus grand
Ma question :
Monsieur le premier Ministre,
La suspension annoncée de la taxe poids lourd est un mauvais signe. Cette inconstance se traduit par une perte de confiance, voire de défiance.
La taxe poids lourd a servi de détonateur à l’expression de la crise du modèle agroalimentaire breton, mais les causes, nous le savons tous, sont ailleurs.
Les responsables de cette crise sociale et de la disparition d’un tiers des paysans et salariés en dix ans sont ceux-là même qui conduisent les manifestations aujourd’hui !
En 2012, 750 000 porcs étaient transportés vers l’Allemagne pour être abattus privant la Bretagne, du GAD par exemple, de ses emplois.
Nous ne voulons pas de mesures au coup par coup, pas de reculs. Nous voulons que le Gouvernement mène une politique cohérente avec une ligne ferme, de long terme, accompagnant la transition pour un avenir meilleur.
Vous parlez de dialogue et de partenariat, nous espérons qu’ils permettront la sagesse de l’opportunité de la reconversion écologique.
Nous, les écologistes, savons où nous voulons aller : Mener la politique agricole européenne et française pour la dynamique de développement rural, de maintien des agriculteurs, de valorisation par la transformation locale des productions et de lutte contre les pollutions, notamment les algues vertes.
La taxe poids lourds est un des chemins pour y arriver, permettant de donner un signal en direction de la territorialisation des productions.
Mais il est loin d’être le seul levier.
Je pense au soutien aux fermes économes et autonomes et au maillage du territoire par les outils de transformation, qui sont le support d’une véritable dynamique rurale.
Ce n’est pas la direction que vous semblez prendre avec l’agrandissement des ateliers d’élevage porcins ou l’autorisation de la ferme des milles vaches.
Monsieur le Premier Ministre, le maintien sous perfusion et sans orientation du système existant détruit des emplois et grève le potentiel de rebond de l’agriculture française.
Quel choix politiques allez-vous prendre pour restaurer la force et la durabilité sociale et environnementale de notre agriculture?
revoir la vidéo sur : http://videos.assemblee-nationale.fr/questions-au-gouvernement
1 commentaire(s)
Madame le député,
je suis extrêmement surpris que vous souteniez, ou à défaut ne dénonciez les conditions du montage de l’écotaxe, comment se fait t’il que vous laissiez associer votre nom a une magouille d’élus de droite qui continuent a plonger la main dans le pot de confitures.
Aux élections nationales, j’ai voté pour une magistrate, il serait bon que le mouvement vert même s’il défend une taxe bonne sur le fond prenne ses distances avec ce qui a été signé par le précédent gouvernement et qui n’a de vert que le titre, sinon c’est « tous pourris ».
J’ai suivi ce dossier depuis plusieurs années, en effet Mediapart vous a devancé, c’est très dommage pour la démocratie.
Quote :
L’État devrait verser 800 millions d’euros de dédit à la société privée Ecomouv, chargée de la mise en place de cette taxe, si jamais il revenait sur sa décision de l’implanter dans les conditions arrêtées par le contrat.
800 millions d’euros ! La somme a sidéré l’ensemble des Français. « Il n’y a pas un scandale de l’ écotaxe, il y a un scandale Ecomouv », a dénoncé Joël Giraud, député radical de gauche lors de la séance des questions d’actualité. Le sénateur PS François Rebsamen demande une commission d’enquête parlementaire pour mettre au clair les conditions d’attribution de ce partenariat public-privé. Il avoue avoir des « doutes sur la création de cette société censée collecter l’écotaxe ».
Jusqu’alors déterminée à utiliser sur tous les tons politiques le thème du ras-le-bol fiscal, prête à dauber sur le énième recul du gouvernement, la droite se tient silencieuse. C’est elle qui a imaginé, porté, choisi les modalités de la mise en œuvre de l’écotaxe, accepté les termes de la société Ecomouv. Même si le contrat a été officiellement signé le 20 octobre 2011 par le directeur des infrastructures, Daniel Bursaux, la signature a été précédée d’un accord écrit de Nathalie Kosciusko-Morizet, alors ministre de l’environnement, Valérie Pécresse, ministre du budget, François Baroin, ministre de l’économie et des finances.
Mais, brusquement, les uns et les autres se dégagent de toute responsabilité. Tout semble s’être passé ailleurs, sans eux. « Nathalie Kosciusko-Morizet a bien signé. Mais elle ne s’en est pas occupée. Tout était déjà bouclé », assure sa porte-parole, éludant la question de savoir si elle aurait pu remettre en cause le projet. « Moi, je n’ai rien signé. Le seul texte que j’ai approuvé est le décret pour l’application de l’écotaxe, le 6 mai 2012 (le jour même du second tour de l’élection présidentielle – ndlr) », semble presque se féliciter Thierry Mariani, alors ministre des transports et normalement chargé de la gestion du dossier. Lui aussi dit qu’il n’avait aucun pouvoir de modifier les choses, « tout avait été arrêté avant ».
Tous les regards se tournent vers Jean-Louis Borloo, qui a occupé auparavant le poste de ministre de l’environnement. C’est lui qui a lancé l’écotaxe, seul résultat tangible du Grenelle de l’environnement. Très bavard au lendemain de la révolte bretonne, critiquant la mauvaise gestion gouvernementale, l’ancien ministre de l’environnement se tait désormais. Il n’a pas retourné nos appels. Quant à Dominique Bussereau, ministre des transports qui a supervisé lui aussi le lancement du projet, il a disparu des écrans radars.
Le jeu de défausse des responsables de droite traduit leur inquiétude. Les uns et les autres flairent le danger. Tout est en place pour un scandale d’État. Car il n’y a pas que les 800 millions d’euros de dédit qui sont hors norme. Des choix du contrat aux conditions d’implantation en passant par la sélection de la société, tout a été fait dans des conditions extravagantes, au détriment de l’État. Sous couvert d’écologie, le gouvernement de Nicolas Sarkozy et l’administration ont accepté des mesures exorbitantes du droit commun, allant jusqu’à revenir sur le principe républicain que seul l’État perçoit l’impôt. Chronique d’un naufrage.
DANS L’OPACITÉ DU PPP
Cela n’a jamais fait l’objet d’un débat. D’emblée, il était évident pour Jean-Louis Borloo que la mise en place de l’écotaxe se ferait dans le cadre d’un partenariat public-privé. « Il y a un consensus dans la haute fonction publique sur ces contrats. Elle ne jure que par eux, avec toujours les mêmes arguments. D’abord, le privé est toujours mieux et sait toujours mieux faire. Et maintenant, l’État est ruiné. Il ne peut plus s’endetter pour mener les projets par lui-même. Désormais, tout passe par les PPP. Cela a coûté dix fois plus cher, comme l’a démontré la Cour des comptes, engagé la Nation et les finances publiques pour des décennies, et on continue. Depuis dix ans, on est ainsi en train de découper tranquillement tous les biens publics pour permettre à des privés de se constituer des rentes à vie », explique un ancien trésorier payeur général.
Dans le cadre de l’écotaxe, un autre argument est ajouté : celui de la technicité. Il faut implanter des portiques de détection, diffuser des équipements embarqués à bord des camions pour permettre de les identifier, gérer les données, percevoir la taxe. Tout cela demande des équipements, des hommes, des logiciels, des traitements de données. Qui mieux que le privé peut gérer une telle complexité ? s’interroge le ministre de l’écologie, qui pas un instant n’imagine faire appel à des prestataires de services au nom de l’État. Toute la charge doit être déléguée au privé.
Il y a bien un problème, malgré tout. C’est la perception de l’impôt. Depuis la Révolution, l’impôt ne peut être perçu que par l’État. Mais si le privé n’est pas assuré de mettre la main sur les recettes, jamais il n’acceptera de participer au projet. Qu’à cela ne tienne, on habillera le procédé d’un nouveau terme en novlangue : on parlera « d’externalisation de la collecte de l’impôt ». Une grande première qui sera confirmée dans les articles 269 à 283 quater du Code des douanes. Jamais l’État n’a confié au privé la perception des impôts. « C’est le grand retour des fermiers généraux », dénonce Élie Lambert, responsable de Solidaires douanes, qui redoute le précédent.
Très tôt, le syndicat s’est élevé contre les conditions obscures et léonines de ce partenariat public-privé en décortiquant avec précision tous les enjeux de ce contrat, mais sans rencontrer jusqu’à maintenant beaucoup d’audience (lire ici son analyse). « Non seulement, ce contrat tord tous les principes républicains. Mais il le fait dans des conditions désastreuses pour l’État. En exigeant 240 millions d’euros par an pour une recette estimée à 1,2 milliard d’euros, le privé a un taux de recouvrement de plus de 20 %, alors que le coût de la collecte par les services de l’État, estimé par l’OCDE, est d’à peine 1 %, un des meilleurs du monde », poursuit-il.
Unquote : La suite sur Mediapart.