Pour favoriser le «manger local» dans la restauration collective publique, l’Assemblée nationale a adopté jeudi à l’unanimité une proposition de loi écologiste prévoyant notamment, d’ici 2020, 40% de produits issus de l’alimentation durable, locaux, de saison.
Porté par Brigitte Allain, députée de Dordogne et agricultrice de profession ayant publié en juillet un rapport intitulé «Et si on mangeait local...», ce texte cherche à «favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation» et à répondre à «une attente citoyenne». Une pétition en ce sens lancée par Agir pour l’environnement a recueilli plus de 100.000 signatures.
«De nombreuses expériences ont démontré que manger local entraîne des comportements plus responsables: recherche de produits bio, réduction du gaspillage alimentaire, tri des déchets, etc...», alors qu’une «denrée alimentaire parcourt en moyenne 3.000 km avant d’atterrir dans nos assiettes», note l’exposé des motifs de la proposition de loi, évoquant un bénéfice «pour l’emploi, l’environnement et le lien social».
Une série d’orateurs, dont la coprésidente du groupe écologiste Cécile Duflot, ont insisté sur «la démocratisation d’une agriculture de qualité». Et le chef de file du Front de Gauche André Chassaigne, favorable à un «excellent texte», a appelé à «de nouveaux rapports de force au niveau européen» pour contrer les «logiques libérales».
D’ici au 1er janvier 2020, la composition des repas servis dans les restaurants collectifs publics devra inclure 40% de produits mentionnant la qualité et l’origine, issus de circuits courts, ou répondant à des critères de développement durable, notamment la saisonnalité, dont 20% issus de l’agriculture biologique.
L’observatoire de l’alimentation sera, entre autres, chargé de définir les outils méthodologiques pour permettre aux organismes publics et privés de restauration collective de définir ces 40%. Car, avec ces 40%, «parle-t-on de la valeur d’achat», de la «composition de chaque plat ou de l’ensemble du menu», et «quid du pain», s’est notamment interrogé le socialiste Hervé Pellois.
Jugeant que «cette proposition de loi apportera une étape supplémentaire à la stratégie du gouvernement» en la matière depuis 2012, le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a aussi relevé qu’un approvisionnement local de qualité et en quantité nécessitait des délais d’organisation.
- Lapin chinois dans des cantines -
«L’Etat a pris ses responsabilités dans ce domaine, au niveau de son administration, avec beaucoup de remise à plat des accords et négociations sur l’approvisionnement», a-t-il souligné.
Si plusieurs collectivités ont déjà engagé le mouvement, il y a du chemin à faire pour le «manger local», ont relevé plusieurs députés, évoquant notamment une proportion de 70% de viande importée dans les cantines, à l’opposé de l’Allemagne. «L’hôpital de Saint-Brieuc importait massivement il y a quelques mois de la viande polonaise», selon Marc Le Fur (Les Républicains).
Et, a relaté le radical de gauche Jean-Noël Carpentier, «dans les cantines de certains départements du sud-ouest (...), on servait aux enfants, il y a encore quelques mois, du lapin chinois» pour «réduire au maximum le prix des menus».
A l’inverse, a mis en garde Jean-Charles Taugourdeau (Les Républicains), «attention à ne pas créer des maraîchers totalement dépendants des cantines scolaires, donc de la fermeture ou non des classes».
Plusieurs retouches ont été apportées dans l’hémicycle pour aboutir à un «texte d’équilibre». L’objectif intermédiaire de 20% a ainsi été supprimé, via un amendement socialiste.
Le texte prévoit aussi que les grandes entreprises intègrent dans leur rapport sur leur Responsabilité sociale et environnementale (RSE) des informations sur leurs engagements en faveur de l’alimentation durable.
La droite, selon laquelle «les entreprises ne peuvent plus supporter de contraintes», a échoué à faire supprimer ce volet. «Comme c’est facultatif, on est dans quelque chose qui peut rajouter un élément positif à l’image des entreprises», a plaidé le ministre.
Par ailleurs, la proposition de loi étend, à la satisfaction de l’ex-ministre PS Benoît Hamon, le label «fait maison» à la restauration collective, publique ou privée, pour mieux informer les consommateurs et valoriser le travail des cuisiniers.