Loi sur le bénévolat, le spectacle vivant menacé
En préambule, nous tenions à féliciter l’exécutif régional qui ne rogne pas sur le budget culturel dans une période économique difficile. En revanche, nous ne pouvons qu’être inquiets par le projet de loi dédié au spectacle vivant porté par le Ministère de la Culture. Il a, en effet, pour but d’interdire le bénévolat. Dans tous les cercles et festivals qui existent partout dans la région, il y a des amateurs. Le texte était exactement le même que celui présenté en 2006, sous l’ère de Christine Albanel. En 2008, sous la pression, il a été retiré et voilà que 5 ans après, on nous ressort la même loi ! Nous devons nous opposer fermement à ce projet qui mettrait en péril toute l’architecture de la culture populaire en Bretagne.
Retrouvez l’intégralité de l’intervention de Yannik Bigouin sur la politique culturelle lors de la session budgétaire du Conseil régional.
Vous faites le choix d’aider, dans la durée, des festivals inscrits dans les réseaux, avec une ligne artistique et du partenariat. C’est un choix intéressant même si parfois on peut se demander comment innover tout en étant reconnu ? Comment avoir la confiance de la collectivité tout en travaillant à construire son événement culturel ? Cela risque aussi de pousser à soutenir « ceux du milieu », « ceux qui connaissent les tuyaux » et pas nécessairement ceux qui osent, ont des idées, une vision, mais ne connaissent pas nécessairement les institutions et ne souhaitent pas nécessairement s’y inscrire d’ailleurs. Comment innove-t-on si on doit déjà « s’instituer » ?
Sur l’aménagement concerté du territoire en équipements culturels par un soutien à travers l’entrée territoriale. Si il y a bien une politique culturelle qui n’est pas concertée c’est bien celle là ! Je regarde sur mon propre territoire : en un an, sur la même communauté de communes, il y aura trois nouvelles salles culturelles construites dans un rayon de 20 kilomètres dont une qui peut accueillir 900 personnes assises pour une commune de 6300 habitants – à Plouguerneau pour tout vous dire- et la région y a laissé 900 000 euros ! Aucune concertation sur la programmation et la mutualisation de moyens avec un maire qui annonce évidemment, en cette période électorale, que la salle servira pour le repas annuel des anciens. Est-ce cela une vision globale cohérente en faveur d’une politique culturelle d’investissement ? Nous nous posons la question. A minima, la réalisation d’un schéma régional des salles culturelles me semble opportun. Ajouter à cela une incitation à une programmation commune par pays ou par bassin de vie, avec des publics ciblés pour certaines d’entre elles, des lieux de résidence aussi. Nous trouvons que cette politique de co-financement des salles culturelles est légère, elle manque de sens.
Sur la politique autour de l’image et de l’audiovisuel.
Je tiens à souligner la pertinence de toute la politique autour du livre, le soutien aux libraires et aux éditeurs. C’est un geste fort de la région pour ces professionnels qui sont bien plus que des vendeurs de livres mais bien des acteurs culturels à part entière. Bravo pour ces actions, continuons !
Vous faites une focale sur la Cinémathèque de Bretagne en pleine, je cite : « crise sociale, financière et de gouvernance ». Je trouve, pour ma part, que ce n’est pas vraiment le lieu de tel propos ou alors il faut aller plus loin et nous alerter clairement de la fin de cette institution régionale. En tous les cas vous m’accorderez que ce n’est pas encourageant pour les bénévoles de les stigmatiser ainsi. Cette difficulté que j’espère passagère doit nous servir à élever le débat et nous interroger. Comment monter en compétence pour faire vivre la démocratie associative, l’efficience en matière de gestion et une direction des ressources humaines performante comme dans toutes les organisations de droit privé ? Quelle efficience dans le management pour faire en sorte que les salariés soient bien leurs baskets et que les administrateurs soient bien dans leurs rôles politiques ?
D’un autre côté, d’autres associations régionales culturelles sont en crise mais pour une autre raison : le retrait de la Région de leur financement alors même que notre institution a pu en être à l’origine il y a 15 ou 20 ans. Là, ce n’est pas les bénévoles qu’il faudrait incriminer mais la région elle-même qui devrait être mise à l’index pour non assistance à emplois en danger. Des questions sont à ce poser là aussi et prendre du recul : est-ce qu’une association soutenue par la Région doit devenir son satellite et donc son « vassal » ? Si la région veut porter une politique, qu’elle le fasse elle-même dans ce cas ! Je mets en garde contre l’instrumentalisation du monde associatif et je vous invite à vous interroger sur le lien collectivité/association. Ce travail est a mener avec les têtes de réseau, la CPCA et la CRESS par exemple. Pour notre part, nous pensons que nous devons donner des signes forts de réaffirmation du soutien à la vie associative, libre de son projet et de sa gouvernance. Le projet de loi du Ministre à l’ESS, Benoît Hamon, nous apporte quelques réponses comme une définition précise du régime de la subvention qui n’existait que par une circulaire pour réaffirmer la contribution des associations à l’intérêt général et au bien commun, et pour renforcer la légitimité de la subvention par rapport aux appels d’offres.
Enfin, comme tous les ans à la même époque je vais vous poser ma question, toujours la même. A chaque fois j’ai une réponse positive et pourtant… rien ne se fait. Peut être que cette année cela changera…
Je souhaite que le conseil culturel de Bretagne puisse venir présenter en session ses travaux annuels et son mode de fonctionnement. Nous finançons et animons, par des membres du service culture, cette chambre qui se réunit ici avant chaque session et qui nous donne critiques, vœux et regards acérés sur nos dossier. Pourtant, il n’y a jamais eu de présentation formelle ici, en session plénière, et ce, depuis les 5 années qu’elle est installée. Je vous remercie par avance de votre engagement.
Pour conclure, mais vous le savez peut-être, un avant projet de loi secoue les associations culturelles bretonnes notamment celles dédiées au spectacle vivant. Le Ministère de la Culture et le Ministère du Travail souhaitent, en effet, interdire le bénévolat à travers « les groupements d’amateurs de spectacles vivants en fonction de leur fréquence et de leur importance ». Dans tous les cercles et festivals qui existent partout dans la région, il y a des amateurs. Le texte était exactement le même (mots pour mots) que celui présenté en 2006, sous l’ère de Christine Albanel. A l’époque, il avait provoqué une levée de boucliers et des manifestations importantes (15 000 personnes à Nantes). En 2008, sous la pression, il a été retiré et voilà que 5 ans après on nous ressort la même loi ! Cela veut dire qu’il faudra verser un salaire à tous, c’est impossible car nos associations n’enont pas les moyens. Comme dit Bob Hasle, « être amateur c’est aussi le reflet d’une envie, j‘ai déjà un travail, si je fais ça, c’est pour mon plaisir, je ne le fais pas pour gagner de l’argent, on devient professionnel plus tard, en ayant été amateur, si on est doué, si cela marche. »
Je souhaiterai que les services de la Région et vous, élus de l’exécutif puissiez bloquer ce projet de loi par vos entrées parlementaires qui mettrait en péril toute l’architecture de la culture populaire en Bretagne.