La Bretagne « éco-pionnière » ? Chiche !
Pour l’année 2014, la Région souhaite intégrer le développement durable dans la politique régionale et réaffirme son ambition de la campagne des régionales de 2010 que la Bretagne soit une Région « éco-pionnière », pourtant il reste du chemin à faire… Selon Anne-Marie Boudou, la culture du développement durable s’installe dans les services de la région, mais le portage politique reste minimaliste ; les outils sont créés, mais ils restent dans les tiroirs…
En premier lieu, nous voulons féliciter les services de la région pour la qualité du travail, pour sa richesse et sa lisibilité et saluons la volonté de progression des documents.
Pour l’année 2014, le rapport d’activité par programme s’intitule rapport d’activité et de développement durable et non rapport annuel de développement durable. Nous avons bien remarqué cette subtilité sémantique et nous approuvons votre retenue. Car même si vous tentez d’intégrer le développement durable dans la politique régionale et réaffirmez votre ambition de la campagne des régionales de 2010 que la Bretagne soit une Région « éco-pionnière », il reste du chemin à faire ! Un pionnier, dans la définition du dictionnaire (Le Robert) est : « Une personne qui est la première à se lancer dans une entreprise, qui fraye le chemin ». Ce n’est pas ce que nous constatons. Il y a quelques velléités dans certains secteurs, en particulier pour les lycées à travers l’éco-référentiel, mais votre orientation politique de développement durable reste trop souvent un affichage sans traduction dans les actes.
Nous espérions que l’Agenda 21 seconde génération, traduit à travers PADUS et sa grille de questionnements deviennent le vrai guide de vos choix d’orientation politique et de financement pour améliorer la prise en compte du développement durable dans toutes les missions de la région. Mais à l’usage, ce nouvel Agenda 21 ne semble pas trouver réellement sa place dans la majorité de vos choix.
Les petits zooms PADUS parsemés au fil des missions ne peuvent suffire à justifier la prise en compte du développement durable. Et qu’en est-il de PADUS au sein de BDI, car il semble que la grille de questionnements ne fait pas partie des critères de cet organisme pour orienter ses choix de financement. Les dossiers de demande de subvention ne sont pas sélectionnés en commission permanente en fonction d’objectif de développement durable et de diminution d’émission de gaz à effet de serre !
Nous l’avons souvent répété, le développement durable est transversal et doit donc imprégner toutes les politiques de la région. Nous n’avons d’ailleurs aucune analyse de la prise en compte du développement durable par les structures dépendantes et financées par le conseil régional pour mettre en œuvre ses orientations stratégiques. Il nous paraît donc indispensable que leurs rapports annuels rendent compte du niveau d’intégration du développement durable dans leurs réalisations.
Quant aux indicateurs, ils sont parfois inadaptés et leur nombre est insuffisant pour analyser les résultats de la politique régionale et ne permettent pas d’apprécier la dimension qualitative des programmes.
Par exemple, dans le programme 612 concernant les économies d’énergie, aucun indicateur sur le nombre de m² rénovés et sur les économies d’énergie réalisées dans le bâtiment.
Dans le programme 611, en 2014 seulement 56 % des exploitations des 8 baies algues vertes sont engagés dans une charte d’évolution de pratiques ou de système, c’est insuffisant même si vous viser 80 % en 2015. Et ce seul indicateur ne permet pas d’apprécier les effets de cette politique.
Certes, vous cherchez à être synthétique, mais cette préoccupation ne doit pas occulter l’objectif qui est de vérifier la « performance » des stratégies régionales et d’informer les bretons et les bretonnes sur l’utilisation du budget régional au regard du développement durable.
Concernant le dispositif Eco-Faur, vous avez décidé de l’intégrer dans les contrats de partenariat avec les pays, ce qui peut apparaître comme une bonne idée pour faire que les critères de sélection du développement durable deviennent la norme et donc obligatoirement pris en compte. Mais nous sommes septiques au vu des contrats de partenariat dont nous avons eu connaissance. Ce dispositif se retrouve dilué dans ces contrats et nous craignons que l’efficacité et l’ambition qui étaient réelle sur quelques projets, ne disparaissent ou soient amoindries.
Nous avons également ces inquiétudes à propos de la mise en œuvre du Plan bâtiment durable breton. Certes, certains objectifs de ce plan sont intégrés dans les contrats de partenariat et les plate-formes locales de rénovation de l’habitat se mettent en place, mais c’est loin d’être suffisant au regard des objectifs du SRCAE, et en particulier de 45 000 logements rénovés par an. Vir-volt Ma maison devait être l’exemple de mise en œuvre de la rénovation thermique pour une généralisation à la Bretagne que nous attendons toujours.
L’accompagnement financier pour mettre en œuvre la rénovation thermique des bâtiments, que nous réclamons depuis 4 ans, vient de faire l’objet d’un rapport par la CCI qui minimise l’intérêt du tiers-financement et laisse la part belle au secteur privé et au secteur bancaire.
Tout cela est en fait bien utile pour continuer à retarder la baisse de la consommation d’électricité en Bretagne et à confirmer les chiffres du Pacte électrique breton qui justifient la construction de la centrale gaz à Landivisiau que nous considérons toujours comme aberrante.
Concernant le bilan des émissions de gaz à effet de serre des compétences de la région, nous tenons à signaler l’efficacité de l’action menée par la vice-présidente en charge des lycées et des services avec l’appui technique de l’éco-référentiel. La réduction de ces émissions et de la consommation énergétique dans les lycées est effective, mais encore très relative vu le nombre de lycées encore à rénover y compris les internats. Au regard de ces enjeux et à l’instar du CESER, nous nous interrogeons sur la baisse des dépenses dédiées à l’isolation thermique.Aussi, nous nous inquiétons de la baisse conséquente des investissements dans ce domaine pour poursuivre cette politique qui a pourtant prouvé son efficacité.
Pour conclure, une culture du développement durable s’installe dans les services de la région, mais le portage politique reste minimaliste ; vous créez des outils, mais ils restent dans les tiroirs.