Déchets dangereux. Enfin, un plan régional de prévention et de valorisation.

La Bretagne exporte 72% de ses déchets dangereux et ne dispose d’aucune Installation de Stockage de Déchets Dangereux (ISDD). Lors de cette session, le Plan régional de prévention et de gestion des déchets dangereux (PRPGDD) est soumis au vote. Les écologistes EELV y sont favorables et redisent ici leur volonté de privilégier le principe de proximité dans la prévention et la valorisation de ces déchets.

 

———————

Anne-Marie Boudou

Anne-Marie Boudou

 

Si nous ne nous occupons pas sérieusement de déchets dangereux dont la toxicité n’est pas toujours complètement connus mais au moins reconnue comme certaine, ils pourraient constituer une bombe à retardement. Or nombre d’entre eux ne sont ni traités ni stockés correctement, faisant peser des impacts sanitaires, environnementaux et financiers sur les générations futures qui risque d’être lourd. Ces substances qui, si elles sont rejetées dans l’environnement, peuvent pénétrer dans le corps humain par le biais de l’air, de l’eau ou de la nourriture et causer de graves dommages à la santé.
C’est pourquoi nous nous réjouissons que ce Plan régional de prévention et de gestion des déchets dangereux (PRPGDD), dont l’élaboration fut longue depuis les premières réunions en 2010 et au gré des évolutions réglementaires, soit enfin soumis au vote de notre assemblée.
Et si le plan intègre bien un volet santé et environnement et établit le lien avec le Programme Régional Santé Environnement Bretagne (PRSE), nous aimerions qu’une meilleure articulation soit faite entre les deux documents qui pour l’instant se résume à la fiche 12, même bien faite. En effet, les études scientifiques montrent au fur et à mesure les effets multiples et graves sur la santé humaine et animale et les milieux, dont des rapports parlementaires se font l’écho comme celui sur les pesticides.
Etant donné les difficultés de connaissance de la totalité du gisement et des différentes filières de collecte, de valorisation et d’élimination, il est essentiel, comme vous le faites, de choisir comme axe prioritaire du plan l’amélioration de la connaissance des gisements et des filières, en particulier des déchets diffus. C’est un préalable pour structurer la meilleure stratégie de prévention et de gestion de ces déchets. D’autant que de nouveaux déchets apparaissent, comme les nanoparticules, dont la méconnaissance des effets ne peut que nous inquiéter et sur lesquels l’industrie communique peu, s’abritant derrière le secret industriel et commercial.
Comme le signale le CESER le « volet maritime du plan ignore la question des macro et micro-déchets échoués. Il conviendra, dans le déploiement du plan, de sortir de l’état embryonnaire des connaissances sur ces gisements conséquents dont les effets contaminants et délétères sur les écosystèmes et les réseaux trophiques sont de mieux en mieux connus ».
La proposition du CESER d’engager activement une réflexion sur la valorisation de l’ensemble de ces déchets d’origine maritime, nous semble tout à fait digne d’intérêt.
Comme pour l’ensemble des politiques sur les déchets le terme « élimination » a fait place à « la prévention et la valorisation » ce qui change fondamentalement l’orientation stratégique ouvrant, en particulier, sur la perspective d’une économie circulaire.
L’importance de l’évolution réglementaire sur la valorisation des déchets dangereux « gros producteurs »  qui a progressé en Bretagne de 23 à 42% entre 2006 et 2011 montre la nécessaire volonté politique de l’Etat pour accompagner les Régions qui doivent se contenter d’un rôle d’animation, de concertation et de coordination. Aujourd’hui, seul l’Etat possède le droit de contrôle. De plus, nous nous inquiétons des moyens qui seront alloués aux services concernés de l’Etat en région dans la tendance générale de diminution des budgets.
Nous sommes évidemment d’accord avec la volonté de privilégier le principe de proximité dans la prévention et la valorisation de ces déchets.
Ce principe doit également être appliqué au stockage, or la Bretagne exporte 72% de ses déchets dangereux et ne dispose d’aucune Installation de Stockage de Déchets Dangereux (ISDD). Mais cette installation ne doit pas être démesurée et doit être réfléchi en concertation avec la population.
Il est donc essentiel d’augmenter la part traitée de nos déchets dangereux en région, dont seuls 38% sont aujourd’hui valorisés et de réduire la quantité de déchets dangereux.
Or ce plan fixe comme objectif de les réduire de 10% à l’horizon 2026, ce qui est nettement insuffisant face aux différents enjeux.
Il est urgent de diminuer notre consommation de matières premières et donc de recycler tous les déchets dans le cadre d’une stratégie d’économie circulaire.
Une autre approche « du berceau au berceau » nous paraît indispensable à prendre en compte. Elle copie sur les temps de la nature qui s’organisent sous la forme de cycles de durées diverses régulant son existence. Ces cycles entraînent un flux continu de transformation de la matière, qui garantit l’évolution. La matière n’est jamais détruite mais convertie, la fin d’une matière permettant à une autre de croître. Elle doit intégrer aussi l’écoconception, l’obsolescence programmée et l’analyse des cycles de vie pour optimiser l’empreinte environnementale.
Enfin, nous vous demandons quels seront les moyens financiers et humains consacrés au plan d’action et ceux destinés à accompagner les territoires, car le budget de la mission VI nous paraît bien maigre pour parvenir à le mettre en œuvre efficacement.

 

A propos de l’Avis sur les déchets non dangereux du Finistère.

 

L’évaluation à mi-parcours du plan départemental des déchets du Finistère fait apparaître plusieurs points positifs et certains résultats sont allés au-delà des objectifs fixés : par exemple, la baisse des volumes de déchets ménagers et assimilés collectés et la diminution du tonnage d’ordures ménagères résiduelles. Cependant, en choisissant des objectifs faibles, il est plus facile de les atteindre.

Ce projet de plan pour la période 2015-2018 a établi un certain nombre de fiches-action qui vont permettre d’améliorer la collecte, le tri des déchets et la valorisation des déchets.

Cependant, nous sommes en désaccord avec plusieurs choix d’orientation.

Concernant la production d’ordures ménagères résiduelles et la collecte sélective, des scénarios de l’impact de l’application de la tarification incitative ont été étudiés.

Le scénario retenu « intermédiaire » (S2) « prévoit que 44 % de la population du département soit concernée par la tarification incitative à partir de 2016 », c’est-à-dire une mise en œuvre sur 14 des 28 EPCI. Cette tarification est un des éléments essentiels et prouvé permettant une baisse des ordures ménagères résiduelles de 30 à 40 %. Ce pourcentage de réduction prévu est donc nettement insuffisant. Mais évidemment, quand le département choisi de ne fermer aucun incinérateur, il faut bien continuer à les alimenter !

Pourtant, en 2013, quatre collectivités finistériennes, représentant 11% de la population départementale, ont déjà mis en œuvre une fiscalité incitative en matière de gestion des déchets.

Concernant les biodéchets, le plan national des déchets (2014-2025) prévoit une dynamique de tri à la source allant à la généralisation à l’horizon 2025.

En 2013, aucun EPCI du Finistère n’avait mis en place cette collecte sélective des biodéchets, hors huiles alimentaires. L’objectif que 5 EPCI mettent en œuvre cette collecte en 2018 est totalement insuffisante.

D’autre part, pour des raisons de coût de mise aux normes, le choix a été fait de ne garder qu’une unité de valorisation organique sur la Communauté de communes du Pays Bigouden Sud. Mais d’autres unités de compostage pourraient être réalisées pour transformer ces biodéchets sans coût excessifs. Comme par exemple les compostages citoyens en bas d’immeuble ou mutualisés sur une ou plusieurs communes et gérés par une structure légère de l’économie sociale et solidaire.

Certes pour les 200 kg de déchets verts produit annuellement par habitant il est prévu de diminuer les tonnages en déchetteries en incitant les usagers à remplacer leurs pratiques d’apport systématisé par une gestion de proximité de leurs déchets verts.

La nouvelle cible 2018 de production d’ordures ménagères résiduelles vise une baisse supplémentaire, dans les trois prochaines années, d’environ 43 000 tonnes d’apports d’OMr dans les unités de traitement. Mais au lieu de fermer un ou deux incinérateurs, le département choisi comme enjeu prioritaire l’optimisation des quatre usines d’incinération, joliment appelées unités de valorisation énergétique des déchets (UVED). Et pour réduire cette surcapacité, il fait le choix de ne plus orienter aucun tonnage d’ordures ménagères brutes vers le stockage et de valoriser énergétiquement l’ensemble des refus de tri sur le département.

Si nous sommes d’accord avec le fait de ne plus stocker des ordures ménagères brutes qui devraient être triées et valorisées, détourner les flux actuellement stockés vers l’incinération est contraire à notre souci de protection de l’environnement, de pollution de l’air et de la santé des habitants.

Même si toutes les usines d’incinération du Finistère ont été mises aux normes en 2005 et 2006, réduisant les émissions de dioxines et furannes, l’absence d’effet des faibles doses de ces substances cancérigènes sur la santé humaine n’est pas prouvée.

De plus, aujourd’hui faute de capacités suffisantes, 42 %, soit 28 237 tonnes, des déchets sortants des UVED sont exportés : deux territoires exportent leurs mâchefers dans le Morbihan et en lle et Vilaine et 6 315 tonnes de refiom et 2600 tonnes de cendres, le reste est exporté en Mayenne chez Séché.

Les refiom et les cendres concentrent tous les polluants très toxiques et les mâchefers dispersés en sous-couche routière comportent un risque de contamination des eaux à terme. Ses déchets d’incinération représentent encore la moitié du volume entrant dans l’incinérateur !

Le CESER dans sa dernière publication sur les déchets en Bretagne écrit dans sa synthèse que « Diminuer les quantités incinérées et poursuivre l’amélioration des rejets des incinérateurs (fumées, cendres, résidus et mâchefers) » est prioritaire.

Le fait de valoriser l’énergie produite en électricité et/ou en chaleur ne peut suffire pour justifier cette non prise en compte des problèmes sanitaires et de pollution de l’environnement.

L’évaluation environnementale fait totalement l’impasse sur ces impacts. Ni mesure, ni étude sanitaire n’est prise en compte, mais existent-t-elle ?

Enfin, l’absence de création de 2 installations de stockage de déchets non dangereux pourtant prévu dans le plan actuel pour respecter le principe de proximité, alors que l’ensemble des déchets non dangereux stockés en dehors du département est d’environ 136 200 t, dont 58 % sont produits par les activités économiques. Les lois issues du Grenelle de l’environnement prévoient également de créer au moins deux installations de ce type dans chaque département.

Le département précise qu’une politique volontariste engagée depuis 2001 n’a pas pu aboutir à ces créations. Nous avons bien conscience des difficultés géologique et hydrologique du territoire. Mais l’essentiel des problèmes vient des oppositions possibles des populations et pour les résoudre, les seuls moyens sont de diminuer les volumes à enfouir par une réduction des déchets à la source, une politique de prévention plus affirmée, le soutien au tri et au recyclage, la mise en place de la tarification incitative et d’une réelle économie circulaire. Et aussi, de mettre en œuvre dès le départ, une vraie participation de la population et non pas une simple consultation seulement au moment de l’enquête publique.

Au vu des points que je viens de développer, nous nous abstiendrons.

Remonter