Projet de loi de programmation des finances publiques : réaction de Eric Alauzet et Eva Sas

Réactions d’Eva Sas, députée EÉLV, vice-présidente de la Commission des Finances et Éric Alauzet, député EÉLV, membre de la Commission des Finances, au projet de loi de finances 2013 et au projet de loi de programmation des finances publiques

Un budget courageux en matière de justice fiscale, mais encore très en deça des ambitions affichées par le gouvernement en matière de transition écologique

Nous tenons d’abord à saluer l’effort de redressement des comptes publics que traduit ce budget. Cet effort est nécessaire car nous ne saurions faire peser notre niveau de vie d’aujourd’hui sur les générations futures. Nous sommes particulièrement sensibles au fait que cet effort soit réalisé dans un souci clair de justice fiscale et de maintien des moyens de l’action publique dans certains domaines prioritaires. Et nous tenons à dénoncer les commentaires des députés de l’UMP qualifiant de « confiscatoire » l’effort de rétablissement de la progressivité de l’impôt, et appelant à un effort plus rigoureux encore de réduction des dépenses.

Néanmoins, ce projet de loi de finances pose nécessairement question sur l’ampleur, et le rythme choisi pour la réduction des déficits.

L’impact éventuel sur l’emploi, que l’OFCE estime pouvoir aller jusqu’à 300 000 destructions, est particulièrement inquiétant, même s’il sera atténué par les 100 000 emplois d’avenir prévus dans ce budget. Nous serons également particulièrement vigilants sur la perspective dans laquelle ce budget s’inscrit, et notamment sur l’effort à produire en cas de non atteinte des prévisions de croissance en 2013 et 2014, prévisions encore trop optimistes : 0,8 % en 2013, alors que le consensus des économistes de la Commission Economique de la Nation s’établir à 0,3 %. Et 2 % en 2014, alors que rien ne permet aujourd’hui de penser que nous échapperons à la baisse structurelle des taux de croissance que nous observons depuis les années 70. Nous ne pouvons pas ne pas questionner ce choix de faire reposer les équilibres budgétaires et les créations d’emplois uniquement sur un retour hypothétique de la croissance, alors même qu’aucun investissement majeur dans une économie durable n’est prévu à ce budget.

Par ailleurs, ce budget laisse malheureusement la question de la transition écologique en suspens.

Au-delà des équilibres budgétaires globaux, nous nous étonnons que ne soient pas utilisées les marges de manœuvre des niches fiscales anti-écologiques. Pourquoi dans une situation de restriction des finances publiques, continuer d’une main à subventionner les pesticides, le diesel, le transport aérien, les transports routiers, alors même que de l’autre, nous consacrons des budgets au développement des activités durables. Nous rappelons que la Cour des Comptes elle-même a préconisé la mise en cohérence du budget de l’Etat sur ce sujet, et le réexamen de l’ensemble des dépenses fiscales défavorables à l’environnement, qu’elle avait identifié comme une piste de convergence dans son rapport sur « Les prélèvements fiscaux et sociaux en France et en Allemagne » de mars 2011. Nous rappelons notamment que celle-ci avait estimé que ce réexamen « fournirait donc des marges de manœuvre très importantes (jusqu’à 19,3 milliards d’euros) qui permettraient aisément d’équilibrer le volet fiscal du Grenelle. » Nous nous étonnons en particulier que cette réduction des dépenses fiscales anti-écologiques ne soient pas même amorcée au travers de la loi de programmation.

Nous nous inquiétons également de l’évolution des budgets des missions Agriculture et Ecologie, et notamment de la baisse des subventions à l’Agence de Financement des Infrastructures de Transport. Les écologistes restent plus que vigilants sur l’évolution des crédits consacrés globalement aux alternatives au véhicule individuel, et particulièrement aux transports collectifs, tant nos concitoyens souffrent de l’obsolescence de certaines lignes de transport, ou de la mauvaise desserte de certaines zones.

Enfin le gouvernement annonce vouloir « amorcer une fiscalité écologique », mais rien ne semble envisagé à ce jour en dehors des deux mesures que sont l’augmentation de la TGAP Air et du malus automobile. Nous tenons à faire remarquer que la France accuse un retard très significatif dans ce domaine. Or à la lecture de ce budget, nous restons pour l’instant sur notre faim, et attendons des mesures fortes en matière de fiscalité écologique, conformément à l’engagement du Président de la République de faire de la France, la « Nation de l’excellence environnementale. »

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