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Marche pour la paix

Vous trouverez la lettre ouverte au FLNC du 22 Octobre par l' APTC et la lettre aux Musulmans de Tahar Benjelloun

  1. Lettre ouverte au  FLNC du 22 octobre

 

 

L’Association Populaire des Tunisiens de Corse et Amis (APTC) a pris connaissance de votre communiqué par la presse et tient à vous répondre.

 

Tout d’abord permettez nous de vous exprimer notre surprise à la lecture du message de menace que vous adressez aux islamistes radicaux : «  Sachez que toute attaque contre notre peuple commanderait de notre part une réponse déterminée sans états d’âme » ; c’est cette seule menace qui a d’ailleurs été reprise en boucle et diffusée dans les médias. Nous avons été surpris pour deux raisons :

1-Nous pensons qu’appeler à faire justice soi même est une erreur grave. Cela risque de donner carte blanche à tous les racistes corses – et il y en a hélas en Corse aussi- pour développer leur haine de l’Arabe.

Nous nous permettons de vous rappeler tous les drames issus des luttes fratricides du mouvement nationaliste corse, liés au concept de se faire justice soi même. Et d’ailleurs c’est seulement cet aspect qui a été mis en avant par les médias, lesquels ont toujours un problème à régler avec la Corse, car ils n’ont pas abordé le contenu de votre analyse que nous trouvons très pertinente.

 

2- Sortir ses muscles et menacer Daech, constitue à nos yeux une perche tendue à Daesh pour inciter un de ces fou d’Allah à commettre l’irréparable, afin de provoquer par une tension intercommunautaire, une situation dramatique dans notre ile.

 

Sur le fond de votre communiqué il y a beaucoup de points que nous approuvons, en particulier :

-la distinction importante que vous faites entre musulman  et islamiste, pour éviter les amalgames.

- Votre condamnation de« ceux qui chez nous se sentent des affinités avec des partis ou des associations d’extrême droite corses ou françaises »

Nous aurions tant voulu lors des manifestations aux jardins de l’empereur, que vous alliez plus loin : nous pensons qu’il est tout a fait juste de soutenir les pompiers agressés mais qu’il n’est pas acceptable dans le même temps de ne pas condamner les personnes qui ont manifeste aux cris de « mort aux Arabes » et qui ont terrorisé les pauvres gens de tout un quartier. Ce n’est pas cette communauté de destin là que nous souhaitons construire.

 

Nous sommes reconnaissants à la Corse de nous avoir accueillis, adoptés en ouvrant ses écoles à nos enfants, ses hôpitaux à nos malades, en nous permettant de vivre sur son sol où nos enfants sont corses de fait parce qu’ils y sont nés.

De notre côté nous lui avons apporté notre force de travail en emmenant bien sûr dans nos bagages nos traditions et nos croyances religieuses. Nous avons combattu pour la Corse aux côtés des corses, et versé notre sang pour vaincre le nazisme, et de nombreuses plaques commémoratives en témoignent à travers toute l’île.

A notre tour d’adopter ce qui nous a adoptés  et de rendre à la Corse ce qu’elle nous a donné. Son hospitalité nous impose de respecter ses coutumes, son mode de vie, de vivre ensemble en partageant des valeurs communes. Cela se fait progressivement et à notre sens l’intégration de la minorité maghrébine de culture arabo berbère est en marche comme en témoignent les centaines de mariages mixtes inter communautaires dans l’île.

 

Mais nous sommes conscients de devoir lutter contre certains comportements de replis communautaires qui, sous couvert de religion,  développent les positions d’un islam rétrograde. C’est ainsi que nous condamnons par exemple le fait qu’un gamin à Porti- vecchio se soit fait tabasser d’abord par ses camarades ensuite par le père de l’un deux, parce qu’ il mangeait un steack de bœuf  non hallal. De même, nous ne pouvons non plus accepter qu’un imam, aux jardins de l’empereur, refuse de serrer la main aux institutrices parce que ce sont des femmes ; ce genre de pratiques sont inacceptables car une parmi les valeurs communes à partager avec le peuple corse, c’est l’égalité homme-femme ; nous devons condamner ces comportements et faire un travail éducatif auprès des populations concernées. Ce genre de d’attitude développe hélas un terreau propice à l’expansion du salafisme, fut-il étiqueté quiétiste. Les salafistes, comme les crabes, veulent avancer en reculant, retourner à la vie du temps du prophète, à un islam du passé idéalisé ; ce qui les maintient en repli à l’écart de la société. Pourtant ils ne sont pas honnêtes avec leurs propres idées car ils ne viennent pas travailler à dos de dromadaire comme au temps du prophète, au contraire ils sont bien intégrés au monde contemporain avec internet, portables, voitures, tout ce qui se fait de mieux dans le monde moderne. Alors ?

Nous pensons aussi qu’une campagne permanente contre la barbarie islamiste doit être menée partout, et nous sommes solidaires pour cette lutte avec tous nos concitoyens ; elle ne dépend pas que de nous et nous en sommes les premières victimes comme vous le dites fort justement. Peut être devrons nous à l’avenir être plus vigilants et plus attentifs à ce qui se passe dans tous les lieux de culte musulman. Ne pensez vous pas que c’est une goutte d’eau dans l’océan quand voit ce qui se passe sur la toile des réseaux sociaux, facilitant tant de vocations djihadistes !

 

C’est uniquement si nous faisons le « ménage «  dans nos communautés respectives que nous pourrons bâtir cette communauté de destin et comme vous le dites si bien

« la communauté de destin n’est pas un vain mot aujourd’hui plus que jamais nous avons le devoir de rechercher la capacité à faire que ce peuple petit par le nombre, soit grand  sur le projet de vie commun »

 

Le président Mohamed Jouablia et a l’unanimité des adherents présents a Ajaccio.

 

 

Le Monde daté samedi 30 juillet 2016 publie cet appel que je lance aux musulmans. Lettre aux musulmans

Par Tahar Ben Jelloun

L’islam nous a réunis dans une même maison, une nation. Que nous le voulions ou non, nous appartenons tous à cet esprit supérieur qui célèbre la paix et la fraternité. Dans le mot « islam » il y a la racine du mot « paix ». Cet aspect a été gommé. C’est violence et brutalité qui apparaissent. Même si c’est le fait d’un seul individu, les musulmans sont embarqués dans l’ouragan de la barbarie. La notion de paix est trahie, déchirée et piétinée par des individus qui prétendent appartenir à notre maison et qu’ils ont décidé de la reconstruire sur des bases d’exclusion et de fanatisme. Pour cela ils ont recours à l’assassinat d’innocents. Aucune religion ne permet un tel détournement, une telle cruauté. Aujourd’hui, une ligne rouge a été dépassée : entrer dans une église, dans une petite ville de Normandie, et s’en prendre à vieil homme, un prêtre, l’égorger comme un vulgaire mouton, puis essayer la même chose avec une deuxième personne, la laisser gisant dans son sang, entre la vie et la mort, crier le nom de Daech puis mourir, c’est une déclaration d’une guerre d’un genre nouveau, une guerre de religion. Nous savons combien ça dure et comment ça se termine. Mal, très mal. Alors, après les massacres du 13 novembre à Paris, ensuite le massacre de Nice et d’autres crimes individuels, voilà que la communauté musulmane, vous, moi, nos enfants, nos voisins, pratiquants ou pas, croyants ou pas, sommes sommés de réagir. Il ne suffit pas de s’insurger verbalement, de s’indigner encore une fois et dire « ça, ce n’est pas l’islam », non, cela n’est plus suffisant et de plus en plus de gens ne nous croient pas quand on dit que l’islam est une religion de paix et de tolérance. Nous ne pouvons plus sauver l’islam, ou plutôt si nous voulons le rétablir dans sa vérité, dans son histoire, si nous voulons démontrer que l’islam ne consiste pas à égorger un prêtre, alors il faut sortir en masse dans les rues et s’unir autour du même message : dégageons l’islam des griffes de Daech. Nous avons peur parce que nous sommes en colère. Mais notre colère est le début d’une résistance, voire d’un changement radical de ce qu’est l’islam en Europe. Si l’Europe nous a accueillis, c’est parce qu’elle avait besoin de notre force de travail. Si la France a décidé le regroupement familial en 1975, c’est pour donner à l’immigration un visage humain. Alors, il faudra nous adapter aux lois et droits de la république. Nous devons renoncer à tous les signes provocants d’appartenance à la religion de Mahomet. Nous n’avons pas besoin de couvrir nos femmes comme des fantômes noirs qui font peur aux enfants dans la rue. Nous n’avons pas le droit d’empêcher un médecin homme d’ausculter une musulmane. Nous n’avons pas le droit de réclamer des piscines rien que pour des femmes. Nous n’avons pas le droit de laisser faire des criminels qui ont décidé que leur vie n’a plus d’importance et qu’ils l’offrent à Daech. D’autre part, nous devons parler, mettre en garde ceux parmi nous qui sont tentés par l’aventure criminelle de Daech. Ce n’est pas de la délation. Au contraire c’est un acte de courage pour assurer la sécurité de tous. Vous savez bien que dans chaque massacre, des musulmans innocents sont parmi les victimes. Notre vigilance doit être tout azimut. Alors que les instances religieuses bougent et fassent descendre dans la rue des millions de citoyens appartenant à la maison de l’islam, qu’ils soient croyants ou pas, et qu’ils disent haut et fort que cet ennemi qui égorge un prêtre fait couler le sang de l’innocent sur le visage de l’islam. Si nous continuons à regarder passivement ce qui se trame devant nous, nous serons tôt ou tard complices de ces assassins. Nous appartenons à la même nation, ce n’est pas pour autant que nous sommes « frères ». Mais pour le moment, pour prouver que cela vaut la peine d’appartenir à la même maison, la même nation, réagissons, sinon il ne nous restera plus qu’à faire nos valises et retourner dans le pays natal.