A proposito di indipendenza
Voici en tribune libre un texte de Gianni Repetto (écrivain italien, auteur de romans et de pièces de théâtre à sujet généralement très engagées politiquement ) traduit en français par Guidu Benigni
A propos d’indépendance
Bien que couvant depuis longtemps, explose en ce moment la question de l’indépendance catalane. Vue l’inconciliabilité des parties, elle cours sur le fil du rasoir et tient en halène des miliions de catalans, d’espagnols et de citoyens de l’Union Européenne au sujet de possibles développements. Se déroule en ce moment un dangereux bras de fer entre le gouvernement central de Madrid et la Generalitat de Barcelone, cependant que dans le pays se sont constitués des antagonismes de populations, qui pour l’heure ont manifesté de manière pacifique, alternativement, et évitant par chance les risques d’affrontement physiques. Les gouvernementss de chacun des pays de l’Union Européenne ont pris nettement position en faveur de l’autorité légitime du gouvernement de Madrid (France et Allemagne), d’autres (parmi lesquesls l’Italie) sont restés plus évasifs affirmant qu’il s’agissait d’une question interne à l’Epagne et que la solution dépendait des seuls espagnols.
Nombre d’hommes politiques ont exprimé des points de vue plus préconçus et idéologiques que basés sur une entière connaissance des faits (combien d’entre eux connaissent la Constitution espagnole ?). Sur eux repose, plus ou moins encrée, la peur que la déclaration d’indépendance catalane ne donne naissance à un effet “domino” à l’échelle continentale, ce qui désintègrerait définitivement la notion d’appartenance de plus en plus contestée à l’Union Européenne. Avec toutes les consequences politiques, sociales et économiques que d’aucuns ne voudraient voir naître. Sont alors évoqués des scénarii apocalyptiques qui vont du retour à la guerre civile permanente sur le modèle de l’ex Yougoslavie, à un état de pauvreté diffus par la fuite des capitaux et des entreprises, à la réaffirmation viscérale des nationalismes désormais dépassés, à l’écroulement des institutions et des garanties démocratiques que l’Union Européenne a sanctionné sans dérogation dans sa Charte Constitutionnelle. Nous avons entendu les mêmes voix évoquer avec force ce “terrorisme”, médiatisé à l’époque du possible “Grexit”, qui contraignit Tsipras à accepter le diktat de la Troika économique et à hypothèquer l’avenir de son pays. Cependant quelques voix extérieures ont noté qu’elles n’étaient pas favorables, aujourd’hui, à ce pacte institutionnel face au désir d’indépendance des régions historiques du séparatisme européen et qu’il pouvait faire le jeu des hypernationnalistes, nostalgiques des frontières et qui ne veulent aucunement d’une Confédération des Etats d’Europe et d’une cession effective des pouvoirs à cet organisme Fédéral.
Mais si cela est le cadre apparent de la situation, y compris la suspicion que tout événement sera résolu une fois de plus par celui qui gouverne la politique et la finance mondiale (voir les agences de rating), nous nous posons toutefois la question de l’indépendance d’une toute autre manière : Mais quel sens a l’indépendance politique des minorités historiques à l’époque de la globalisation ? Ou mieux : le désir d’indépendance est-il aujourd’hui une question exclusivement politico-nationaliste ou bien, et aussi, et surtout, un choix radical de changement au plan économico-social en respect des politiques des Etats desquels ils veulent faire sécession ?
Si, de fait, obtenir l’indépendance veut dire l’accession de la part des élites locales, même si avec prosopopée populiste sur sa langue et ses traditions, à un pouvoir politique solidement lié à l’économie, à la finance et à la logique de développement du capitalisme mondial, nous n’arrivons pas à comprendre comment intéresser la masse des gens aujourd’hui en grande difficulté – comprendre que prolétaires et sous-prolétaires, mais aussi petits et semi agriculteurs, artisans et entrepreneurs qui ne réussissent plus à gérer la concurrence du marché global – à adhérer à un changement nominal qui n’irait pas vers une mutation substantielle de leur condition de précarité et de perte progressive des garanties sociales. “Francia o Spagna pur chì si manghja” disaient les paysans du “mezogiorno” à l’époque où l’Italie était terre de conquête. Et ce n’était pas une expression quelconque, mais le besoin essentiel de se nourrir avant toute chose.
L’indépendance aujourd’hui, pour avoir un sens concrètement communautaire et identitaire, doit être en mesure de proposer un modèle nouveau de développement qui, partant de la particularité historique locale, élabore un plan politico-social qui remette l’homme au centre de la vie d’un pays et non le marché, avec un parcours à contre courant du délire consumériste du commerce global. Et la condition indispensable pour réaliser cela est la récupération de ces savoirs millénaires qui ont façonné au cours des siècles les communautés et les territoires, produisant qualité plutôt que quantité, relation avant aliénation. Nécessaire donc, de mettre en marche un processus de décroissance solidaire qui tendrait à reconstituer des parcelles de communautés et à revitaliser socialement les activités de certains secteurs primaires et secondaires, que la production industrielle d’abord et le commerce global ensuite, ont quasiment fait disparaître. Mais c’est à proprement parler le travail qui doit être respecté comme antithèse de la logique industrialiste : non pas une coaction – surtout aujourd’hui avec moins de tutelle, mais paradoxalement le privilège du peu de respect au toujours plus vaste “exercice de réserve” de la main d’œuvre - mais un rôle opératoire partagé et reconnu, socialement et économiquement, qui consente à tous le droit de se sentir partie prenante d’une communauté de valeurs et d’entente.
Ceci est un parcours qui nécessite des choix drastiques, fortement éthiques, basés essentiellement sur le concept du bien commun, entendu concrètement jour après jour et surtout pas comme un objectif tendanciel, qui, selon nous, pour se consolider comme interaction sociale imprescriptible doit adopter une stratégie inclusive en trois aspects essentiels de la vie d’une communauté qui voudrait être vraiment libre et indépendante:
1) la récupération de l’agriculture et de l’artisanat traditionnels, dépositaire des valeurs historico-archaïques de notre civilisation;
2) la transformation de l’Europe des affaires et des états nationaux en une Europe des peuples et de la solidarité, comme somme des valeurs de la modernité;
3) un accueil de l’Autre qui surmonte racisme et piétisme pour devenir connaissance, confrontation et échange paritaire entre les peuples du monde aux fins d’une pacifique convivialité planétaire postmoderne.
1) Les paysans ont été ces quelques cinquante dernières années les grandes victimes de la modernité. Ils ont vu leur monde renversé, balayés ces savoirs ancestraux, pulvérisée leur traditionnelle socialité. Ils ont été absents de l’expérimentation chimique, payant un lourd prix en vies et en maladies professionnelles pour sauver leurs propres récoltes des parasites toujours nouveaux et de douteuse provenance. Comme si cela ne suffisait pas ils ont du subir – suite à la croissance de la conscience environnementale - la diabolisation des environnementalistes citadins qui les ont accusés d’être les responsables de l’empoisonnement des campagnes. Le mouvement néorural né dans les années ’70 est issu de cette présumée 1utte pour relancer l’agriculture: les paysans ne peuvent pas être des empoisonneurs, avant tout d‘eux mêmes, mais attentifs au soin de la terre et de la vie. Nous faisons ici un retour au biologique (qui n’est pas de leur invention, mais jusqu’aux années ’50 était la norme dans les campagnes), qui est la requalification des cultures historiques et la récupération du rôle social.
2) Il n’a pas été facile pour ces innovateurs (revenir en arrière pour aller de l’avant) de dialoguer avec les paysans traditionnels en raison des difficultés de communication, empêtrées qu’elles étaient par les mécanismes de la production para-industrielle. Les uns donnaient pour passées les choses que le monde rural historique avait oublié, enfermé qu’il était dans les mécanismes de la production para industrielle. Les autres ne réussissant pas à accepter le fait que quelqu’un prétende de faire le geste des ancêtres sans aucune tradition acquise.
3) D’ailleurs, le soutien institutionnel de type assistanat (surtout la 20/78) laissait aux paysans la pratique des tâches faciles (penser aux cultures de tournesols), qu’ils désapprouvaient mais acceptaient, dès lors au plan clientélaire, comme une commode intégration au maigre rendement des campagnes.
De fait, l’absence d’une politique culturelle qui refonde l’économie agricole dans le sens qualitatif a mené à la disparition de centaines de milliers de petites et moyennes exploitations dans les deux dernières décennies, soit par l’absence de relève générationnelle, soit par l’impossibilité économique de gérer la confrontation avec les grandes productions industrielles des latifundia reconstituées (en 2010: 8% des propriétaires possédaient 63% des terres cultivables).
Donc, si aujourd’hui l’on veut arrêter cette sorte de génocide et faire en sorte que l’agriculture et les paysans survivent vraiment, il est nécessaire de créer un réseau d’exploitations en partant du bas, avec un fonctionnement de type mutualiste sauvegardant les spécificités individuelles et qui soit en mesure de proposer un modèle de communauté, indépendante des choix de financement institutionnalisés : un nouveau tissus paysan capable de revendiquer et d’interpréter avec conscience un rôle central dans la vie économique et sociale du pays. Et pour cela, il ne sert à rien qu’apparaissent des acteurs en documentations de circonstance, témoins de recherches anthropologiques, mais une entente commune depuis les Alpes jusqu’à la Sicile pour faire sortir la campagne de la subalternité qui l’oppose à son histoire. Dialogue, organisation légère, mais efficace, reconnaissance sociale, avec la fière conscience d’être l’unique “centre de gravité permanent” pour quelque soit l’hypothèse d’un pays futur.
Mais ce qui vaut pour les paysans vaut aussi pour les artisans. Une recherche de la CGIA di Mestre selon laquelle l’impact dû à la crise économique du secteur a révélé que de 2009 à la fin de 2014, 94.400 entreprises artisanales ont fermé leurs portes. Et les bulletins de la même organisation syndicale continuent à rapporter périodiquement d’autres données négatives. Apparaît également la constante paupérisation du pays qui a réduit drastiquement la demande interne, laquelle est la principale référence du marché des agences artisanales.
C’est à dire que même chez les artisans, comme pour les paysans, il est advenu au cours des dernières décennies du siècle écoulé une mutation anthropologique qui a privilégié la quantité et la productivité au détriment de la qualité et des savoirs traditionnels. En pratique plusieurs d’entre eux au cours de l’époque expansionniste du marché du travail, se sont transformés en assembleurs de composants produits par d’autres et en opérateurs de machines de marques industrielles pour l’utilisation desquelles la professionnalité et le métier traditionnel n’étaient absolument pas nécessaires.
Mais il n’y eut pas que cela. Il y a eut ceci : les artisans ont toujours été au cours des siècles à l’avant garde de la défense de la liberté individuelle et ont été les protagonistes, à partir de la révolution industrielle et jusqu’à la fin de la première moitié du siècle dernier, de toutes les luttes pour l’émancipation et la justice sociale. Travailleurs solidaires, prêts au soutien des causes des plus faibles, les reconnaissant comme propres.
Et puis, surtout à partir des années ’80, la progressive spirale des individualisations qui les a portés à suivre le marché et à oublier leurs racines par griserie, ou mauvaise aventure entrepreneuriale. Rares sont ceux qui ont réussi a concrétiser leurs nouvelles aspirations, beaucoup ont été désillusionnés et ont payé, ou payent encore le prix de la crise. Et celui qui résiste encore se trouve à avancer péniblement avec les paysans et les ouvriers et se trouve contraint de partager le même destin de précarité, de cette sorte de “néo globalisation” qu’est le marché global.
Si les artisans, comme les paysans, veulent se soustraire à cette nouvelle subalternité, s’ils veulent être encore des sujets sociaux protagonistes de communautés indépendantes, ils doivent recouvrer les racines professionnelles et culturelles de leur travail et, surtout, cette pratique de la solidarité qui les a rendus essentiels dans les luttes tout au long de leur émancipation sociale.
Mais l’indépendance des communautés minoritaires territoriales des différents pays européens ne peut faire abstraction d’une révision profonde des Institutions de l’Union Européenne, qui la transforme en un véritable Etat Fédéral. Cependant, avec une véritable souveraineté centrale de l’Europe il est possible et pensable à des processus d’indépendance locale, pacifiques et constructifs. Du reste il n’est pas possible de liquider ces instances comme ressurgis d’anachronismes de micro nationalismes, mais il faut avant tout analyser comment sont nés historiquement les différentes nations européennes. Il faut avant tout analyser comment sont nés historiquement les différentes nations européennes pour se rendre compte qu’en général leur avènement à eut lieu à la suite d’un acte arbitraire sans tenir compte de la volonté des différents peuples qui les composaient. Frontières tracées par suite de victoires ou défaites ont souvent divisé des peuples qui revendiquaient une histoire, une unité millénaire, intégrant de force cultures et traditions diverses avec des processus autoritaires d’homologation. On été niées langues, coutumes, usages, cherchant à superposer, comme disait Pasolini, “maschere” à la multi culturalité des peuples.
Avec l’accès à la démocratie, les différents états ont cherché de résoudre le problème des minorités selon diverses approches, en général liées à leur propre Histoire et à leur propre naissance comme nation, et avec une intransigeance centraliste (ex. la France et l’Espagne), avec la reconnaissance de forme d’autonomie souvent identitaire, parce que vécues en situation de minorité, plutôt qu’une véritable indépendance (ex. l’Italie).
Dans un cas comme dans l’autre, cependant, le dialogue entre cultures n’est pas pour autant venu, dès lors et surtout par l’intransigeance des cultures dominantes, et par ailleurs, à cause du ressentiment revanchard des cultures minoritaires. Perdure dès lors une défiance réciproque entre dominant et dominé, à l’exemple de critères identitaires nationaux et culturels qui désormais, à l’ère de la globalisation homologuant, risquent d’être des concepts vides, pures et simples manifestations folkloriques. Parce que le nœud est là : si un peuple a complètement oublié les événements de son Histoire, s’il a renié ses racines agro-pastorales et communautaires, s’il participe comme la majorité au rite quotidien du consumérisme, s’il accepte la dynamique de la globalisation économico-financière en conscience que cela détruira la particularité de son histoire et de son imaginaire, quelle raison aurait-il de descendre dans la rue ou de voter un référendum pour l’indépendance quand celle-ci désormais n’est que le fétiche de celle qu’il a perdu ?
Voici donc que l’action législative d’une éventuelle Confédération Européenne pourrait garantir aux minorités la pleine autonomie et favoriser la réunification sous son égide de populations divisées depuis des décennies voire des siècles. Même avec la création de macro régions transnationales qui jouissent d’une double juridiction : autonome comme culture, langue et traditions; partagées, et ici complètement sous tutelle, au plan politico institutionnel.
Mais ce que, même un gouvernement central européen ne pourrait jamais garantir, à moins d’une impensable révision de la culture technocrato-industrielle de ses élites, c’est le mode en lequel ces communautés vivront leur autonomie; cela dépendra seulement de leur choix : continuer à suivre le mite du développement illimité et de la consommation ou embrasser sérieusement un nouveau modèle de développement qui soit compatible avec l’environnement et récupère les savoirs traditionnels en les reproposant comme clé moderne de mise à jour ? Personne, à ce stade, ne pourra évoquer un alibi et se cacher derrière le fait que, peut-être, il est impossible de changer vu que nous nous sommes engagés trop loin et que nous sommes désormais avancés dans un système que nous avons ensemble convenu. Changer se peut, à commencer par la langue minoritaire, qui doit devenir première langue enseignée dans les écoles comme dans l’usage quotidien. Cependant nous devons en être convaincus et non seulement en parole, par sentiment alors qu’on ne la parle pas avec ses propres enfants. Parce que là est la vraie minorité : la peur de se sentir minoritaire dans ce monde.
4) Vient enfin, le problème de l’accueil de l’Autre, qui suscite dans tous les pays européens des résurgences xénophobes qui nous renvoient à un triste passé. Cependant il s’agit d’un problème qui, volens nolens, nous renverra longtemps à la notion suivante : quand réussirons-nous à établir des relations paritaires avec les autres continents en appliquant concrètement la déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen à l’échelle planétaire.
Pour comprendre l’inéluctabilité de l’invasion on ne peut faire abstraction de la connaissance des raisons qui ont poussé des multitudes d’êtres humains à fuir leurs pays. D’une manière ou d’une autre, toutes sont liées à notre approche d’occidentaux rapport à ces mondes, déprédation des ressources, autoritarisme colonial et discrimination raciale. Mais surtout de procédés conjoints de déculturation et d’acculturation aux fins de transformer ces populations en véritables consommateurs potentiels.
Ce sont des raisons tellement objectives et claires que personne ne peut les nier, mais que l’on préfère alors ne pas les prendre en considération et assumer une attitude de refus national : “Je n’ai pas d’intérêt à les voir arriver, je les refuse.” Et aussi ces politiques qui sur ces positions pré racistes construisent leur légitimité en les dépeignant comme déclarations de défense des valeurs chrétiennes (!) et occidentales, cherchant à masquer leur myopie politique et culturelle avec des arguments auxquels ils ne croient pas eux-mêmes. Et les gents s’installent dans la peur, laquelle devient l’unique forme de rassemblement d’une société qui, comme le disait Baumann, est toujours plus “liquide” et atomisée.
Mais même quand les Etats sont disponibles à l’accueil, cela se manifeste concrètement par des formes de détention, dans des camps “lager” dans une perpétuelle attente de ce qui n’arrivera jamais, soit l’intégration dans la société civile, sociale et économique. Ces structures sont souvent gérées par des gents sans scrupules et qui ont fait de l’immigration une affaire lucrative : le meilleur moyen de créer une armée d’inadaptés qui deviendront des proies faciles pour de fanatiques criminels.
C’est de cette attitude hypocrite et contreproductive que doivent se dissocier les actions d’accueil de communautés libres et indépendantes : forts de leur identité retrouvée, ils doivent établir avec les migrants un dialogue entre personnes d’égale dignité, qui prenne en compte constamment le droit fondamental de chaque homme à une vie digne d’être vécue. Droit qui ne peut faire abstraction du travail qui, outre qu’il est source de substantialité, est aussi le meilleur terrain de confrontation. Eux, en tant que porteurs de cultures anciennes et de savoirs que nous mêmes avons perdus, et nous enfants d’un monde qui a épuisé sa défunte économie sociale et ne réussit pas à se la réapproprier. De l’intégration de ces deux diversités peut naître cette attitude de récupération d’un passé comme “mémoire active” qui est le moteur indispensable pour un modèle de développement à la mesure d’homme et à faible impact environnemental, le seul qui puisse encore garantir aux populations européennes et des autres continents d’avoir un futur sur la Terre et de retrouver le sens le plus authentique et solide de la convivialité humaine.
Ceci est le modèle que les états colonialistes auraient dû inciter quand, dans les phases de décolonisation, viendront les grands projets de coopération avec les nouveaux états africains indépendants, au lieu des grands flux d’argent qui ont été canalisés vers ces pays et sont revenus (sauf quelques bribes distribuées aux élites locales), dans les poches des colonisateurs, au détriment soit des financements soit des destinataires. Lorsque l’on entend certains déclarer : “il faut les aider chez eux”, il faudrait leur rappeler que ce leitmotiv a été parole de néo colonisateur qui entendait cette aide comme une forme d’exploitation plus sophistiquée, sans la charge des responsabilités institutionnelles.
Pour nous, cependant, les aider veut dire soutenir avec des outils modernes (dès lors suffirait une pompe aspirante pour avoir de l’eau), pour l’agriculture paysanne de subsistance des communautés villageoises ou bien, financer l’implantation de laboratoires artisanaux pour satisfaire la demande interne, qui encore se sert de produits d’importation. Les aider veut dire mettre à leur disposition notre expérience de producteur afin que ne soient répétées nos erreurs et ne pas détruire l’extraordinaire patrimoine de biodiversité de leur environnement. Les aider veut dire les mettre en garde sur l’excessive concentration de populations dans les centres urbains qui débouche sur la dégradation sociale et la perte d’identité. Les aider veut dire interagir avec eux sur le plan technique et professionnel, favorisant des stages d’échanges réciproques qui amplifient les compétences respectives. Les aider veut dire entreprendre ensemble sur les divers continents, de manière que les profits restent sur le territoire comme salaires et comme nouveaux investissements.
Si nous seront capables de faire de telle sorte qu’aillent dans la direction de la rencontre avant l’affrontement, peut être réussirons nous à contenir et à rationnaliser les flux et à offrir un destin “chez eux” à des millions de personnes fuyant la misère, la guerre et la désertification.