[BS 2014] Intervention de Sophie Bringuy sur la charte développement durable

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La Région souhaite aujourd’hui contribuer à l’engagement du territoire dans le développement durable à travers l’adoption de la charte régionale pour le développement durable.

Soyons clairs : ce type de démarche suscite chez les écologistes une réaction première de défiance, nourrie par des années de désillusion.

Que s’est-il passé depuis la consécration du concept de développement durable à Stockholm en 1973 ? A dire vrai, pas grand-chose… sinon pire ! Et depuis, des centaines de chartes ont vu le jour aux quatre coins de la planète, sans empêcher la situation de se dégrader. C’est en tout cas le constat que fait le dernier rapport du GIEC, publié en avril.

Alors qu’il faudrait sortir des sentiers battus, et rebattus, du productivisme, imaginer les pistes nouvelles de la transition, réorganiser la société en tenant compte de notre vulnérabilité et des limites physiques de notre planète, nos dirigeants semblent englués dans leur nostalgie d’un âge d’or révolu. Et ils pondent des chartes qui éclosent… sur pas grand-chose.

Pourtant, malgré notre défiance, nous avons décidé de soutenir la charte, proposée aujourd’hui, en misant sur le fait que cette fois-ci, nous sortirions du « pas grand-chose ».

Nous voulons y croire car cela bouge dans les territoires. Chaque jour, des milliers d’initiatives citoyennes fleurissent ici et là, sans attendre que les mentalités politiques évoluent. Il y a à peine un mois, le parc éolien citoyen de Bégane était inauguré. Ce sont ces créatifs culturels qu’il faut accompagner, et protéger des verrouillages socio-techniques de nos institutions et des conservatismes des lobbies.

La charte du développement durable devait permettre d’écrire, avec les acteurs et actrices du territoire, une nouvelle histoire avec pour dénominateur commun la transition. Malheureusement, la co-écriture ne s’est pas faite et le document final ne résulte pas du travail collectif que nous souhaitions. Espérons que cela ne freinera pas la dynamique et que l’adhésion sera au rendez-vous.

En soutenant cette charte, les élu-es écologistes font le pari qu’elle vienne réellement enrichir le terreau existant, et contribue à catalyser les énergies de nos territoires. Je pense notamment aux modèles d’économie dites « alternatives », qui remettent l’humain et les enjeux environnementaux au cœur de leurs pratiques – économie circulaire, économie collaborative, économie sociale et solidaire – mais aussi à la transition de nos systèmes alimentaires et agricoles vers une production biologique et locale, qui s’appuie sur la biodiversité au lieu de la détruire, à la transition énergétique via la rénovation énergétique des bâtiments, le développement des énergies renouvelables et des filières industrielles associées, ou encore les circuits et commerces de proximité… Malheureusement, cette économie n’est pas assez valorisée dans le document actuel.

Nous souhaitons également que la charte soit l’aboutissement de la réflexion engagée en 2010 sur les nouveaux indicateurs de richesse. Or, à notre sens, il y a des indicateurs pertinents qui n’ont pas été intégrés dans la charte. Quand on veut améliorer la santé-environnement, par exemple, comment ne pas prendre en compte les taux d’obésité, cancers, maladies cardio-vasculaires ou allergies ? Ces données existent, et il serait simple de les intégrer.

Enfin si nous soutenons ce projet, c’est aussi avec l’espoir qu’il ne sera pas le faire-valoir d’un monde ancien qui se peint en vert, dans une démarche de green marketing. L’expérience de la charte sur les circuits de proximité et de qualité nous a quelque peu refroidis. Après une bonne communication autour de ce document et  quelques signatures, il ne s’est pas passé grand-chose.

Cette fois-ci, faisons autrement. Pourquoi ne pas créer une plateforme internet de suivi de la charte que chaque signataire pourrait renseigner, en fonction des indicateurs pertinents dans son domaine d’actions, et qui permettrait à quiconque d’aller explorer la dynamique « développement durable » en Pays de la Loire ?

Pourquoi ne pas mettre en place un comité de suivi indépendant du Conseil régional, afin d’éviter que nous soyons à la fois juges et partie ? Par exemple, un panel citoyen « permanent » ou pourquoi pas le CESER, qui aurait aussi son mot à dire dans le rapport développement durable annuel ? Ce comité de suivi évaluerait également la pertinence des indicateurs choisis, et l’intérêt de les garder ou de les modifier.

Et puis, l’adoption de cette charte doit être l’occasion de revisiter profondément notre organisation et nos politiques publiques au prisme de la transition écologique. Que notre institution s’engage pleinement dans les six axes définis par la charte. Chaque règlement d’intervention ou subvention versée doit aller dans le sens de l’avenir. Chaque commission devrait rapidement faire de premières propositions pour dire comment elle peut contribuer à l’exemplarité du Conseil régional.

Allons plus loin également dans le conditionnement des aides et la commande publique du point de vue social, sociétal et environnemental, avec un système de bonus pour les projets de développement durable et une charte de progrès avec un champ d’intervention plus large qu’aujourd’hui. Montrons l’exemple !

J’ai beaucoup parlé de transition dans cette intervention. Nous sommes aujourd’hui à la croisée des chemins. Entre la Belle Verte et Bienvenue à Gattaca, les options sont ouvertes. Différents scénarios de prospective existent. En Pays de la Loire, celui de l’association Virage Energie Climat, dont je salue l’expertise citoyenne, montre que nous avons la chance d’avoir toutes les ressources nécessaires pour devenir autonomes en énergie renouvelable et pour nourrir, de manière saine, la population mondiale en 2050.

Mon message est donc simple : c’est possible, osons aller plus loin !

Nous voulons y croire car cela bouge dans les territoires. Chaque jour, des milliers d’initiatives…

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