En Ariège on parle bio abeilles et climat

Des remparts de la Cité aux tréteaux électoraux
par Gérard ONESTA, le 22 octobre 2009

Les pas des manifestants - quand ils sont très nombreux - sont plus "éloquents" que le plus savant des discours. Voilà pourquoi la grande manifestation bisannuelle en faveur de la langue occitane, est devenue, succès aidant, le lieu où le "tout politique" doit impérativement se montrer ou, au minimum, être représenté. Pour les édiles des partis traditionnels, arpenter le bitume une heure tous les deux ans est peu cher payé pour tenter de capter cette lame de fond citoyenne qui ne fait encore qu'affleurer ici ou là, mais dont on ressent déjà l'immense potentiel. Car le rendez-vous de Carcassonne, en défendant ce bien si précieux et si "parlant" qu'est la langue d'ici, est, en fait, un jalon sur la longue élaboration du contre modèle au nivellement par le bas imposé par la globalisation culturelle.Et c'est vrai que voilà une façon commode, pour les partis qui se sont succédés au pouvoir à Paris, d'essayer de faire oublier qu'ils ont, tour à tour, dans une unanimité confondante, toujours refusé de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. N'oublions pas que l'inscription de nos idiomes régionaux dans la Constitution ne s'est faite qu'à l'arraché, et ce, en annexe, dans une simple démarche "patrimoniale". Comme si une langue n'était qu'un support muséographique…Il faut bien comprendre que face à ces jacobins plus ou moins masqués, chaque avancée en faveur de l'occitan ne se fera que dans le rapport de force ou dans la mise en oeuvre d'une dynamique qui les dépasse. Il faut par exemple entendre, en privé, leurs réactions aigries et revanchardes devant la joie des toulousains parce qu'un élu écologiste a "osé" faire annoncer le nom de chaque station du métro en occitan. Un simple mot dans cette belle langue chantante, c'est encore trop pour certains qui joueront pourtant des coudes pour apparaître en tête de cortège à Carcassonne. De même, il fallait voir les forces de l'inertie à l'œuvre quand j'ai réussi, au Parlement européen, à faire admettre - encore à la marge - l'usage de quelques langues constitutionnelles comme le Catalan, le Basque, le Galicien ou le Gallois.Ma longue expérience européenne m'a cependant montré qu'en vraie démocratie, le multilinguisme apaisé tend à devenir la règle et la discrimination linguistique une plaie honteuse qu'il faut traiter comme telle. J'ai pu mesurer, outre hexagone, à quel point notre République était malade de sa "mono-culture" et, dès lors, ridicule dans sa prétention à éclairer le vaste monde qui est bien plus riche qu'elle ne peut le concevoir.Si les échéances régionales du printemps prochain ont un sens, elles devront, sans tabou, ouvrir tous les débats afin que tombent les masques. Car il est grand temps pour la puissance publique de ne plus simplement "tolérer" ou encourager à la marge le milieu associatif occitaniste, mais de s'impliquer à ses côtés - directement et fortement - pour faire de la politique linguistique un outil naturel et structurant de son action. Pour cela, il faudra investir des moyens humains, techniques, juridiques et budgétaires dans un organisme régional public "non cosmétique" chargé de promouvoir la langue dans toutes ses dimensions, notamment économique : codifier, enseigner, rechercher, former, subventionner, diffuser, créer… Il y a tant à faire dans la sphère publique.Puisse, samedi, la manifestation de l'Occitanie profonde et plurielle être plus impressionnante encore que celles des années passées pour se prolonger enfin jusque dans les débats politiques à venir.

Gérard ONESTA 
Ancien Vice Président du Parlement européen
Porte parole des écologistes pour les régionales en Midi Pyrénées

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