Tribune

Bonne année à mes amies les vaches !
par Isabelle MEIFFREN
I 15/01/2010

Mangeons moins de viande pour réduire nos rejets de gaz à effet de serre. Il suffirait de supprimer la viande un jour par semaine de nos menus pour réduire de 10 % nos rejets de gaz à effet de serre. Moins manger de viande oui, mais attention à ne pas se tromper de viande !

Alors, quelle viande réduire ? La rouge, synonyme de force et de santé, de classes aisées ? Ou la blanche, qui évoque la pureté, la légèreté, l'enfance même et de plus en plus, les fins de mois difficiles. La question est importante. La viande occupe une place centrale dans l'univers symbolique de notre alimentation. Elle est source de croyances nourries de religion, de culture, d'éducation. Elle nous classe socialement, identitairement. Soyons en convaincus : avec cet appel à manger moins de viande au nom de la lutte contre le changement climatique, nous touchons là, même si nous nous en défendons, un « gros morceau » culturel.
Un gros morceau qui pourrait si nous n' y prenons pas garde, se retourner, malgré nos louables intentions, contre les meilleurs de nos éleveurs. Contre nos amies les vaches qui ne peuvent plus ruminer la conscience tranquille.

Ce que nous devons conseiller ?

La suppression de la viande des élevages intensifs en premier lieu. Surtout pas celle qui provient des élevages - bovins, ovins - extensifs de nos piémonts, causses, vallées montagnardes, où bœufs et moutons mangent de "l'herbe", que de l'herbe, et créent ce faisant de la biodiversité, protègent les sols, animent des paysages vivants et "humanisés", dans des régions économiquement fragiles.

D'aucuns - pas très nombreux mais qui ont large tribune dans les médias - nous invitent à manger moins de viande rouge, et lui préférer de la viande blanche (poulet, porc) au motif que ces granivores - non ruminants donc - n'émettent pas de méthane. Ne relayons pas ces propos. Ce serait oublier que nos élevages majoritairement intensifs de poulet, porc, ont un bilan global « gaz à effet de serre » catastrophique, du fait :

    * des importations massives d'aliments notamment de soja du Brésil (avec déforestation et déstockage de CO2)
    * des cultures de maïs grains qui génèrent de grosses quantités de protoxydes d'azote liés à la sur-fertilisation, gaz à effet de serre extrêmement puissants (bien plus que le méthane !)
    * des concentrations d'effluents eux aussi très impactants sur l'effet de serre.

C'est pourquoi, j'invite bien sûr les écologistes à appeler à manger moins de viande, pour toutes les bonnes raisons que l'on sait qui vont au-delà des impératifs de lutte contre le changement climatique, mais sans se tromper de viande ! Oui au pot au feu des pâtureuses des Pyrénées et au gigot d'agneau du Larzac !

J'invite les écologistes à lutter contre le discours ambiant qui met tout sur le seul dos de nos bonnes vieilles vaches qui regardaient, quand il y en avait, passer les trains et qui ont toujours ruminé peinard, à résister à l'appel du poulet et du cochon de batteries concentrationnaires.
A nous de préparer un plan d'accompagnement (dans les régions, mais aussi au plan européen) pour que les éleveurs, en premier lieu les éleveurs de bovins à l'herbe, ne soient pas injustement pénalisés,...

Tout ceci est cohérent avec nos programmes de conversion des agricultures régionales. Mais soyons vigilants : l'année 2010 sera "saignante" pour la viande. Il ne faudrait pas qu'elle le soit pour les éleveurs.


Isabelle MEIFFREN
Bipède carnivore très modérée et candidate Europe Ecologie Midi-Pyrénées

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