REJET DU RAPPORT DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE CONSACRÉE AU CRÉDIT D’IMPÔT RECHERCHE

COMMUNIQUE DE PRESSE DE CORINNE BOUCHOUX

Rejet du rapport de la commission d’enquête consacrée à l’attribution et l’utilisation du crédit d’impôt recherche

Corinne Bouchoux, sénatrice de Maine et Loire, et membre de la commission d’enquête sur « la réalité du détournement du crédit d’impôt recherche de son objet et de ses incidences sur la situation de l’emploi et de la recherche dans notre pays » regrette que le rapport présenté le mardi 9 juin ait été rejeté.

Cette commission d’enquête, présidée par le sénateur Francis Delattre (LR) et avec pour rapporteure la sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin (CRC), vient d’achever ses travaux entamés depuis le mois de janvier sans parvenir à un accord sur le bilan dressé de l’utilisation du crédit d’impôt recherche (CIR).

Pour Corinne Bouchoux, très assidue aux auditions : « un crédit d’impôt recherche doit stimuler l’activité, irriguer la recherche, et développer l’emploi des docteurs. Ce crédit d’impôt devrait aussi aboutir à la production de brevets et de publications scientifiques. »

La connaissance scientifique du dispositif CIR est encore insuffisante. Les recommandations visaient à faire évoluer un dispositif qui coûte de plus en plus cher et bénéficie davantage aux grandes entreprises qu’aux PME sans le remettre en cause à ce stade.

Corinne Bouchoux sera attentive à ce que le CIR ne soit pas détourné pour devenir un simple outil d’optimisation fiscale mais bénéficie réellement au développement de la recherche.

 

Contribution personnelle de Corinne Bouchoux au rapport sur le CIR 

« Malgré un intitulé qui n’a pas fait consensus, le rapport tel qu’il est publié a montré son utilité. En effet, il donne une photographie précieuse et détaillée du crédit d’impôt recherche (CIR), de son utilisation.

Un crédit d’impôt recherche doit stimuler l’activité, « irriguer » la recherche, et développer l’emploi des docteurs. Ce crédit d’impôt devrait aussi aboutir à la production de brevets et de publications scientifiques. Le rapport démontre de manière implacable quelques « idées reçues ».

La connaissance scientifique du dispositif CIR est encore insuffisante. Les recommandations visent à faire évoluer un dispositif qui coûte de plus en plus cher et bénéficie davantage aux grandes entreprises qu’aux PME.

La progression du CIR risque d’avoir un effet collatéral en profitant à des concurrents étrangers, des entreprises françaises, tout en encourant un jour des reproches (au niveau européen) sur une « distorsion de concurrence » qu’il peut provoquer.

Enfin, il n’est pas dépourvu de risques avec un fonctionnement « à l’aveugle », il est possible de booster des « loosers ».

Du coup, le CIR fait aussi ce que les banques ne font plus, accorder des fonds « sur-risqués ».

Enfin, la galaxie incroyable des startups (1100 à partir du seul CNRS), la prolifération des structures « unicellulaires » élues au CIR devront être mieux connues.

On pourrait aussi envisager ultérieurement plusieurs axes de réflexion afin de voir évoluer le crédit d’impôt recherche (CIR).

Maîtriser le crédit d’impôt recherche constitue, comme nous l’ont montré les travaux menés par la Commission d’enquête, une nécessité afin de se prémunir contre tout risque d’éventuel détournement du dispositif.

Après une évaluation des avantages du CIR, comme le préconisent les recommandations du rapport, il pourrait être opportun que le législateur entame une réflexion sur le plafonnement du CIR et sur son taux. Ainsi, continuer à plafonner le CIR à 100 millions d’euros, mais en le mesurant à l’ensemble d’un groupe pourrait permettre d’éviter la création de filiales critiquées comme pouvant paraître fictives ou trop « monocellulaires ». Tout comme la mise en place d’un taux différencié suivant la taille des entreprises pour favoriser celles qui réinvestissent le plus en recherche et développement, c’est-à-dire les petites et moyennes entreprises.

Ainsi, la promotion de la recherche et du développement français doit rester la finalité du CIR.

Pour répondre aussi à cet objectif, une piste intéressante pourrait consister à conditionner le renouvellement du CIR. Une entreprise bénéficiaire ne pourrait pas prétendre à un renouvellement de ce crédit d’impôt si elle ne dépose aucun brevet actif pendant trois ans.

La maîtrise du CIR implique également une exigence de transparence. Ainsi, pourrait être exigé des entreprises bénéficiaires du CIR un rapport thématique annuel détaillant les disciplines de recherche concernées et les effets de ce crédit d’impôt sur l’activité. Plus généralement, connaître l’ensemble des aides publiques annuelles des entreprises constituerait un outil utile pour évaluer leur efficacité et les faire évoluer.

Une recherche et un développement performants impliquent que les chercheurs y jouent un rôle majeur. Dans cette optique, il convient de redonner sa juste place au doctorat. En effet ce dernier – qui assure une « formation à la recherche et par la recherche » selon le Code de l’éducation – constitue le plus haut diplôme reconnu au niveau international. Seulement, force est de constater que les docteurs sont sous représentés au sein des entreprises françaises. A titre d’exemple, en 2011, seuls 12% des chercheurs en entreprise étaient titulaires d’un doctorat, contre 55% diplômés d’une école d’ingénieur ou d’une grande école. Le constat est d’autant plus inquiétant que ce taux de docteurs parmi les chercheurs en entreprise est en baisse constante depuis quinze ans (14,9% en 1997, 13,2% en 2007, 13% en 2009, 12% en 2011).

Le crédit d’impôt recherche se doit de constituer un véritable levier de la promotion de l’emploi des docteurs dans le secteur de la R&D privée. Une alternative envisageable consisterait, comme l’a déjà proposé le groupe écologiste du Sénat en amendant le projet de loi de finances pour 2015, à la prise en compte des dépenses de personnel pour le calcul du crédit d’impôt recherche en fonction des dépenses de personnel titulaire d’un doctorat et employé́ en CDI.

Mieux cibler le crédit d’impôt recherche passe, enfin, par une réflexion autour de son taux. Il s’agirait ainsi de réorienter les effets de la niche fiscale vers la transition écologique. Inciter la recherche et le développement dans ce domaine constitue une nécessité absolue pour l’avenir de notre pays, et surtout, de notre planète. La France se doit de constituer un exemple l’année où la COP 21 se tient à Paris et ainsi se donner les moyens de lutter efficacement contre le dérèglement climatique et d’impulser/d’accélérer la transition vers des sociétés et des économies résilientes et sobres en carbone.

La recherche et le développement dans le secteur privé doivent donc être favorisés par le dispositif que constitue le CIR. Pour autant, il ne faut pas oublier la recherche et le développement dans le secteur public à qui il faudrait consacrer davantage de moyens.

Enfin, la réalisation de deux ou trois doctorats d’économie avec des approches différentes (macroéconomique, microéconomique, sectorielle) serait salutaire. Sans oublier les liens entre CIR et création d’emplois scientifiques…Un CIR vertueux sans « effet d’opportunisme » (cf. Rapport de l’Association Sciences en marche à la commission d’enquête sénatoriale) est-il envisageable ? »

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