Médiapart : à Grenoble, un Rassemblement pour «réinventer la gauche»
Le journal en ligne Médiapart affiche à sa Une du mercredi 5 mars 2014 "Grenoble: écologistes et PG pour «réinventer la gauche»", un reportage sur la campagne municipale à Grenoble.
Voici quelques extraits de cet article de Mathieu Magnaudeix :
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Dans cette campagne municipale un peu morne, les regards se tournent volontiers vers Grenoble. Elle est une des 80 villes où le Parti de gauche (PG) et les écologistes partent unis au premier tour. Et elle est la seule où cet attelage a une vraie chance. Les médias défilent. La campagne est nerveuse. « Pas étonnant qu'il y ait des invectives entre candidats : cette élection est une primaire à gauche », résume Simon Labouret, enseignant à Sciences-Po Grenoble. [...]
Écologiste « qui roule en voiture et mange de la viande », ancien patron cofondateur du collectif anti-austérité Roosevelt 2012, Éric Piolle « défrise » : « Je suis une synthèse politique à moi tout seul. » Il déteste « les étiquettes », affirme qu'« être de gauche, c'est rompre les rangs, bouger les lignes », des phrases-valises qui plaisent à tout le monde. [...]
Dans cette ville de gauche, où les cadres sont plus nombreux qu'ailleurs, « Éric Piolle est le candidat écologiste idéal pour ratisser très large, assure le chercheur Simon Labouret. Que ce soit sur le plan de la crédibilité à gérer une ville ou des gages à donner à la gauche de la gauche, son programme c'est son histoire : celle d'un cadre d'une grande entreprise hightech licencié pour avoir refusé de délocaliser. » [...]
Après avoir été entre 1983 et 1995 le fief du RPR Alain Carignon, l'homme politique le plus condamné de France, Grenoble est ancrée à gauche. Ici, François Hollande a réuni 64 % des voix au second tour de la présidentielle. Ces dernières années, les écolos ont flirté avec le score du PS (26,5 % aux régionales de 2010). Parfois, ils l'ont dépassé (29 % aux européennes de 2009). Le centre-ville a un conseiller général écologiste depuis 2004. [...]
Cette fois, aux côtés du PG, qui fait de bons scores dans les quartiers populaires, de l'ADES (une association locale connue pour ses combats anti-Carignon, et depuis 1995 par son activisme juridique contre les grands projets de Michel Destot) et du Réseau citoyen, agglutination de plusieurs collectifs locaux, EELV rêve de « faire la bascule au premier tour » : se retrouver devant le PS, même d'un rien, et lui dicter ses conditions. Par exemple une fusion des listes, au prorata des voix des uns et des autres.
Un tel résultat ferait figure de sanction lourde pour le PS, dans la ville de la ministre de la recherche Geneviève Fioraso. « Ça se joue à 2 000 ou 3 000 voix », assurent les colistiers. « On sera dans un mouchoir de poche », prédit Éric Piolle. « Jérôme Safar, le candidat socialiste, reste le favori, analyse le chercheur Simon Labouret. Mais arithmétiquement, il y a une fenêtre de tir pour la liste de Piolle. Pour l'emporter, ce dernier doit toutefois progresser en notoriété et convaincre qu'il a la légitimité pour être maire. » [...]
Destot l'admet:il a«hésité»à passer la main:«Je ne souhaitais pas qu'on perde la ville. J'étais le meilleur candidat, ce n'est pas prétentieux de le dire, ici tout le monde me connaît. Mais le moment était venu. » Le PS compte mettre Jérôme Safar sur orbite pour devenir président de la métropole grenobloise qui verra le jour en 2015 et détiendra bien plus de pouvoirs que la ville. [...]
Le candidat socialiste n'est pas très connu des Grenoblois. L'été dernier, un sondage de notoriété commandé par le PS avait donné des résultats décevants. Ce samedi 1er mars, sur le marché de Saint-Bruno, un quartier populaire derrière la gare, deux papis abordent le candidat. « Vous représentez Destot ou Carignon ? »« Michel Destot... C'est moi qui lui succède. »« Destot, c'est mon ami », dit l'un des deux, Ahmed, 82 ans. « C'est moi qui vais devenir votre ami maintenant », plaisante Safar. Rires, tapes sur l'épaule. Le candidat socialiste s'éloigne. Ahmed se confie: « Je vote Destot. Mais lui je m'en fous, je ne le connais pas. » [...]
En face, le candidat UMP-UDI bataille pour exister, plombé par le présence sur sa liste, en position éligible, de l'ancien maire Alain Carignon, condamné en 1996 pour corruption, abus de biens sociaux, subornation de témoins : cinq ans d'inéligibilité, 29 mois de prison ferme. Après un long psychodrame, une primaire annulée, une guerre fillonistes-copéistes évitée de justesse, c'est Matthieu Chamussy, élu d'opposition depuis deux mandats, qui conduit la liste. [...]