Intervention de Didier JOUVE : pour un développement durable de Rhône-Alpes
Monsieur le Président,
Vous avez du travail !
Depuis 2004, tous les ans, nous entendons le rapport d’étape sur le Développement Durable.
Nous avons institué ce rapport plusieurs années avant la loi Grenelle, dont nous respectons du coup facilement le récent article 255.
Nous avons engagé en 2004 une démarche de Développement Durable à partir d’une équation redoutable, qui est à la base du rapport Bruntland : nous sommes sur cette planète 6,5 milliards d’habitants, nous serons 9 milliards en 2050.
Il y a un fantastique enjeu de développement : je dis bien non pas croissance des flux financiers qui mesure n’importe quoi, mais développement : de l’eau potable, de l’agriculture, de l’école publique, de la santé publique, du logement salubre, des infrastructures essentielles. Un fantastique enjeu de développement pour l’Humanité à 9 milliards de femmes, d’hommes et d’enfants.
Mais les inégalités s’accroissent, dans les pays, et à l’échelle planétaire. Il n’est pas crédible d’imaginer que ces inégalités vont être encore longtemps supportées, il n’est pas crédible de penser qu’un bunker occidental pourrait longtemps encore vivre dans l’opulence, même relative pour une part croissante d’entre nous, tandis que des milliards d’êtres humains voient vivre l’occident sur les télévisions des bidonville pendant qu’ils s’enfoncent plus encore dans la misère.
Il y a donc un fantastique enjeu de solidarité, même pour les plus égoïstes, s’ils veulent rester en paix.
La troisième donnée de cette équation, c’est la dégradation de notre milieu de vie :je dis bien milieu de vie et non environnement : nous sommes comme des poissons qui auraient sciemment décidé de polluer leur bocal. L’effort de développement nécessaire, et la solidarité indispensable pour la paix, ne peuvent pas être réalisés sur le modèle de développement occidental, qui n’est pas extensible déjà aux 2,5 milliards d’indiens et de chinois.
Il faut donc construire un autre modèle de développement qui respecte enfin notre milieu de vie et ressources fondamentales.
Cette alliance indispensable du vrai développement utile, des renforcements de solidarités nécessaires, du respect de notre milieu de vie et de nos ressources fondamentales, c’est ça le développement soutenable.
En 2004, les écologistes ne souhaitaient pas qu’il y ait une Vice-Présidence Développement Durable : nous étions convaincus qu’une telle politique ne peut être que globale, et que son impulsion doit se faire au plus haut niveau, le VOTRE, Monsieur le Président, et que sa mise en œuvre doit être orchestrée par le Directeur Général des Services.
Nous avions cependant accepté la mission de construire une telle démarche en Rhône-Alpes, je m’y suis consacré intensément, le rapport présenté aujourd’hui fait le point sur ces avancées collectives, j’insiste, collectives.
Nous avons travaillé sur plusieurs niveaux :
– la Région exemplaire dans ses propres réalisations comme les lycées, ou le nouveau siège
– la Région incitatrice des autres collectivités, à travers la conditionnalité des aides régionales
– la Région qui passe contrat : nous avons refondu les Contrats de Développement Durable Rhône-Alpes, fait entrer le Développement Durable dans l’écriture du programme opérationnel FEDER ; reste la question de l’application par l’Etat de cette rédaction
– enfin, la Région stratège a installé la question du Développement Durable dans plusieurs schémas régionaux.
En interne, une culture du Développement Durable a émergé, et dans toutes les directions, des agents motivés font avancer les choses au quotidien, plus de 400 salariés se sont volontairement formés, un groupe Développement Durable inter-directions se réunit régulièrement.
Question : est-ce que ça suffit ?
Monsieur le Président, je le redis, vous avez du travail.
Dans cette nouvelle mandature, vous avez accepté notre suggestion de 2004 : il n’y a plus de Vice-Président au Développement Durable.
Le Développement Durable n’est plus une politique qui se débat difficilement au milieu des autres : c’est la politique de la Région et vous avez choisi d’en être responsable.
C’est un très beau challenge que vous vous êtes fixé.
Il va falloir utiliser toute l’énergie et le courage dont vous êtes capable :
– d’abord pour organiser enfin la Région autour de cet objectif ; pour que tous ceux qui ont reçu mission d’appliquer la politique régionale mettent en place, à leur niveau, les programmes et actions qui intègrent enfin le Développement Durable au rang d’exigence fondamentale.
– il va falloir convaincre, jusque dans votre plus proche entourage, que toutes les dépenses ne se valent pas, que la croissance sans conscience n’est que ruine de l’homme, convaincre que chaque euro dépensé doit avoir un sens, pour nos concitoyens, pour nos enfants, pour la planète.
– il va vous falloir surmonter les habitudes, les égoïsmes, les lobbies, les démagogies, il va falloir convaincre que le rôle du politique est davantage celui de précurseur que de suiveur, ou de Père Noël.
Vous avez vraiment du travail.
Et ce travail, les rhônalpins vous le demandent. Ils ont voté pour une politique plus écologique, prenant en compte développement, solidarité et environnement, démocratie renforcée ensemble.
Et nous l’avons promis.
Le budget 2010 sera la première occasion de la nouvelle mandature de passer réellement aux actes.
Vous avez le mandat pour le faire, tous les moyens de la Région, sont à votre disposition.
Chaque jour, vous serez confronté à cette exigence, qui ne survivrait pas de rester dans la déclaration d’intentions ; vous devez arbitrer les contradictions. Il y aura encore des Shangai, des jeux olympiques, des Center Parcs, qui vous seront proposés et des collectivités qui voudront de grosses subventions régionales en prenant le minimum d’engagements.
Le Développement Durable impose de choisir, tout n’est pas compatible.
C’est ici, dans cette aptitude à choisir, à arbitrer, à affirmer une volonté, qu’est la grandeur du politique.
Monsieur le Président, vous avez choisi de prendre en charge le Développement Durable de Rhône-Alpes ; nous avions commencé. Vous avez du travail et nous vous y aiderons, avec la conviction que vous nous connaissez.