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Le sens de notre action – Discours sur les finances régionales

le 28 juin 2012, par Jean Marc Pasquet

Monsieur le Président, notre CA apparaît tel un monument d'esthétique comptable au milieu d'un paysage, économique, social, moins flatteur. Qu'on prenne ce pavé de 400 pages par n'importe quel chapitre : inutile de s'engager dans la litanie des bons indicateurs. Ici, la progression de notre épargne brute, là, le maintien d'une capacité de désendettement à un niveau exceptionnel.

A quoi peut servir un budget de 4,5 milliards qui autofinance près de 60% de ses dépenses d'investissement quand l'Etat peine à maintenir ses 350 milliards d'euros sans emprunter près la moitié de cette somme, sans dégager un seul euro de fonds propres.

C'est en réalité la question du sens de notre action qui est posée au travers de ce CA, la seule qui mérite d'être posée. Elle est fondamentale.

Au moment où le dogme de la stabilité des dépenses, celui des concours aux collectivités est en passe d'être remplacé par celui des dépenses et des concours stabilisés (subtile nuance), nous voyons dans ce changement l'immuabilité d'une pensée qui écrase tout débat sous l'argument coupable de territoires traités comme des objets immatures, vecteur de dépenses inutiles, de clientélismes plus ou moins assumés dans le pire des cas.

Cette pensée trouve des relais dans les esprits les mieux formés et, si on n'y prend garde, il pourrait nous conduire au désastre. Quel est ce danger?

Non, cher(e)s collègues, il n'est pas dans le fait d'écarter les collectivités, notre Région, de l'effort nécessaire de reconstitution d'équilibres sains de nos finances publiques plombées par les choix dévastateurs de la majorité nationale précédente, impécunieuse, imprévoyante sur le plan fiscal,  mue par un dogme hostile à la dépense bien plus que de sa réforme.

A l'heure où l'INSEE nous alerte de l'arrêt de tous les moteurs de l'activité, du coups brutal, historique depuis l'année 1984, coups brutal porté au reste à vivre des ménages, au tassement de l'investissement des entreprises, il ne se trouve plus qu'un levier. Celui de l'équipement public, générateur de plus de 70% de l'investissement national, de 40% des carnets de commande du secteur du BTP, 10% de la valeur ajoutée nationale que nous contribuons à enrichir en Trains, en rénovation sur notre patrimoine scolaire : nous faisons ce que nous avons dit. Les taux de consommation en témoignent.

Non, le vrai danger, il est dans la tentation de l'accumulation des politiques dites de correction, administrées à doses massives. A l'heure où nous parlons, entreprises, associations, territoires s'interrogent sur le réglage de la pendule budgétaire, sur notre volonté d'aller trop loin et trop vite.

Non, je n'évoque pas ici le rythme de la consommation de lignes budgétaires sur l'ESS, de la médiation, de l'aide aux départs en vacances des ménages populaires, du soutien au spectacle vivant : non. Pour les mêmes raisons que l'an dernier et des règles de régulation internes, de celles qui justifient des virements de crédits bien éloignées de l'intention du législateur que nous sommes. C'est bien d'un retard qu'il nous faut dans ces cas évoquer.

Non, le vrai danger, il serait de couver notre CA en attendant l'Acte III de la Décentralisation. Le mettre à l'abri, de la tentation de l'impulsion, la seule qui reste, pour nous sortir de l'ornière, celle qu'ont utilisé nos anciens dans les périodes les plus sombres. Nous vivons une telle époque.

Oui, nous avons plaidé, en Commission des Finances notamment, l'argument de l'utilisation de l'épargne privée, abondante, celui de la force de frappe des collectivités, dés lors qu'elles se fédèrent pour collecter de la ressource, construire en commun de nouveaux outils quand le secteur bancaire trahit sa vocation.

Et nous avons entendu, comme en écho à Mme Merkel il y a quelques heures : "Moi, vivante, il n'y aura pas de dette commune". En termes à peine voilés, nos Chypre à nous, pointés du doigt, Clichy sous bois; Sevran, notre petit Portugal.

J'en parlais à notre collègue Serne, qu'il serait bon pour notre épargne brute que Le RER D ait son Terminus à la Gare de Lyon.

Gouverner, c'est choisir. Nous approuvons ce CA comme un appui à la construction d'un budget 2013 à la croisée des chemins. A mi-mandat, au pic d'une crise reflétés par des indicateurs rouge vif. M. le Pdt, mes chers collègues, nous serons aussi attentifs cette année à la qualité de l'intervention publique, à sa valorisation territoriale. C'est le sens de notre action, je vous remercie.

 

Jean Marc Pasquet

Vice-président de la commission des finances