Contournement Est de Rouen : Regardons l’avenir en face, passons à autre chose !
Alors que le préfet de Haute-Normandie a annoncé réunir ce vendredi le comité de pilotage du projet de contournement Est de Rouen après avoir, selon lui, « purgé l’hypothèse environnementale », EELV Haute-Normandie appelle tous les décideurs politiques, économiques et institutionnels à tenir un discours de vérité, et à mettre fin aux promesses sans lendemain.
Oui, c’est vrai, il y a urgence !
Il y a une urgence de santé, celle de résoudre les problèmes de pollution de l’air liée à la circulation routière. La majorité des flux de véhicules[1]allant en centre-ville, le contournement Est ne ferait qu’apporter une pollution atmosphérique supplémentaire vers les périphéries, sans permettre de réduire significativement celle du centre-ville de l’agglomération.
Il y a urgence à stopper la pollution de nos ressources en eau ! Le contournement Est impacterait très gravement le captage de la Chapelle (Saint-Etienne du Rouvray), essentiel pour l’alimentation en eau potable des habitant-e-s de la CREA, mais également, quels que soient les tracés, un ensemble de bassins d’alimentation en eau potable du territoire (dont certains captages Grenelle[2]).
Il y a urgence à répondre aux besoins de mobilité de nos concitoyen-ne-s, maintenant, pas dans 10 ou 15 ans. Il n’y a pour l’instant pas d’alternatives satisfaisantes à la voiture pour se déplacer depuis les zones périurbaines, pour aller au travail, à l’école, dans les espaces de loisirs…
Il y a urgence à réorganiser la filière logistique dans notre région, pour décongestionner nos routes (où passent plus de 70% des marchandises transportées en Haute-Normandie) car la majorité des flux de camions entrant dans l’agglomération rouennaise ne sont pas des flux de transit.
Il y a urgence à préserver la qualité de nos paysages et de nos cadres de vie ! Avec le contournement, ce serait les réservoirs de biodiversité les plus riches de l’agglomération, ultimes indicateurs de la qualité de nos cadres de vie, ainsi que des terres agricoles périurbaines de qualité et des zones de loisirs qui seraient détruits.
Il y a urgence à devenir raisonnable quand il s’agit des deniers publics et des finances de nos concitoyen-ne-s! Ce contournement sera une concession avec péage obligatoire, c’est-à-dire une nouvelle injustice sociale, avec une infrastructure à 2 vitesses, la rapide pour les riches, et pour les autres qu’ils se débrouillent ! Enfin, il coûterait 1,2 milliard d’euros ! Alors que le Grand Contournement Ouest de Strasbourg, moins cher et d’une rentabilité financière supérieure, vient d’être abandonné faute de financeurs privés, qui peut croire que le Contournement Est de Rouen réunira le tour de table financier nécessaire ?
Il est donc l’heure de se rendre à l’évidence… Non, le contournement Est de Rouen ne doit pas se faire, et il ne se ferra pas !
Mais pour répondre à ces urgences, il existe des alternatives ! EELV – Haute-Normandie appelle donc tous les décideurs politiques, économiques et institutionnels à se rassembler pour mettre en œuvre ensemble les solutions qui répondent aux besoins urgents de nos concitoyen-ne-s.
Les acteurs économiques doivent reconnaître l’existence de la liaison A28-A13… A l’ouest de Rouen, par la Sud III et la rocade Sud. Elle dessert avantageusement le port. Pour que le contournement Ouest soit finalisé, il ne reste plus qu’à terminer les accès au pont Flaubert et la liaison sans ronds-points à la Sud III.
Pour favoriser enfin le transfert modal vers des modes de transport moins émetteurs de gaz à effet de serre, il faut favoriser les offres de transport fluvial et ferroviaire entrant au cœur de l’agglomération.
Pour les habitant-e-s, et notamment celles et ceux des zones périurbaines, une politique ambitieuse et innovante de développement de l’offre de transports collectifs doit se confirmer. Après les efforts d’équipements sur le cœur d’agglomération, l’accent doit porter sur la desserte des zones périurbaines: tram-trains, parkings-relais, amélioration de l’offre de covoiturage, bus à haute qualité de services… La CREA, à la recherche de concepts nouveaux, devrait répondre au 3ème appel à projets pour développer des solutions de transports en commun innovantes (par exemple un téléphérique urbain pour la desserte des plateaux). La Région de son côté doit poursuivre cette ligne positive d’amélioration des dessertes TER, en devenant une autorité coordonnatrice du développement de nouvelles formes de déplacements périurbains, dont le tram-train.
D’autres solutions d’application immédiate sont possibles, notamment la gratuité du péage d’Incarville. Demandée par M. Jean Louis Destans, président du Conseil général de l’Eure, lors du débat public en 2005, elle n’a pourtant jamais été avalisée. Pour que le contournement Ouest prenne forme dès à présent, il serait également simple de prendre un arrêté préfectoral organisant la déviation du flux de transit hors des centre-villes.
Ayons donc le courage de reconnaître qu’il est temps d’abandonner ce projet d’un autre âge, pour enfin préparer l’avenir, sur des bases respectueuses des habitant-e-s, de leurs ressources et de leur environnement.
Tribune libre co-signée par:
Laetitia Sanchez
Secrétaire régionale – Europe Ecologie –Les Verts Haute-Normandie
Jérôme Bourlet
Conseiller régional de Haute-Normandie – Vice-président de la commission transport
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[1] Sur les D 6015, D 6014 et RN31.
[2] Les « captages Grenelle » ont été identifiés comme étant les plus menacés par les pollutions diffuses, et sont objets de mesures de protection prioritaires. Voir http://www.developpement-durable.gouv.fr/La-preservation-de-la-ressource-en.html