Gratuit, mais à quel prix ?

La crise économique remet au premier plan le slogan du « tout gratuit ». Hormis le soleil et le vent, rien n’est gratuit. Tout a un coût, et c’est à la puissance publique d’organiser la juste répartition des richesses pour y faire face.

A ce titre, était-il justifié qu’un ménage lillois argenté ne paie que 2,20 € pour un repas de cantine dont le coût total se situe autour de 8 € ? Etait-il logique qu’un fils de smicard vivant à 2,9 km de son lycée n’ait droit à aucune aide au déplacement, alors que les enfants de familles aisées bénéficiaient d’un aller-retour gratuit, s’ils habitaient à plus de 3 km du lycée ? Assurément non.

Nous plaidons pour une révision des tarifs publics, afin que chaque famille paie à hauteur de ses revenus. Nous avons proposé des tarifs de cantine (ré)adaptés avec la ferme volonté d’atteindre 50% de produits bio dans les repas en 2014. Nous préférons un abonnement de transport mensuel à 9 ou 18 € selon les revenus pour tous les lycéens, plutôt que d’en exclure les deux-tiers de façon arbitraire.

Invoquer sans cesse le bas prix est un leurre, que nous laissons aux hypermarchés. Des enfants de ménages démunis devraient-ils se satisfaire de produits industriels à la cantine et d’un strict aller-retour entre la maison et le lycée ? N’ont-ils pas droit, comme les autres, au goût, à la qualité, à la mobilité ?

Un siècle de consumérisme a ancré dans nos esprits que tout serait accessible à peu de frais, au mépris de la qualité, des besoins réels, et des limites de la planète. Ainsi, les cafés du centre-ville étalent leurs terrasses qu’ils s’évertuent à chauffer : le tout-marchand continue d’envahir notre espace social. Nous ne sommes pas obligés de l’accepter. Le sacro-saint chiffre d’affaires n’explique ni ne justifie de telles pratiques.

Michel Ifri

Tribune politique à paraître dans Lille Magazine.

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