Tartuffes
Cela fera bientôt un quart de siècle qu’en France, puis dans le monde, le 17 octobre symbolise notre volonté collective de refuser la misère. Cette misère demeure, alors que quelques décennies d’hyper consommation l’avaient plus ou moins masquée, à défaut de la réduire. En témoigne le « succès » des manifestations organisées par les associations dans nos quartiers, souvent un simple, mais vrai repas.
Il serait tellement plus confortable de l’ignorer, et de faire le tartuffe : Cachez cette misère que je ne saurais voir ! Comme la halte de nuit que l’ABEJ a utilement instaurée pour permettre à ceux qui n’ont plus que la rue de se poser un moment. Comme les centres de distribution des Restos du Cœur ou du Secours Populaire qui « attirent » de plus en plus. Ou encore comme les villages d’insertion qui redonnent un peu de dignité aux Roms persécutés.
Mais cette misère n’est-elle pas aussi le produit, voire le moteur de notre modèle économique ? Parce que ce modèle use de la peur d’y sombrer. Parce que l’hyperconsommation a besoin de riches de plus en plus riches et de pauvres de plus en plus pauvres, pour générer les frustrations habilement utilisées par les publicitaires. Misères et gaspillages sont les deux faces d’une société qui vit à crédit sur les ressources naturelles et la misère exploitée, dans l’indifférence des agences de notation. Aujourd’hui le monde n’en peut plus. La crise est écologique, sociale et économique.
En ce 17 octobre 2011, avec les associations et autour de notre collègue Dalila Dendouga, nous avons aussi commémoré le cinquantenaire du massacre des Algériens, jetés à la Seine sur ordre du Préfet Papon. Anniversaire d’un passé colonial que notre République ne sait pas reconnaître.
Maudit 17 octobre. Quand est-ce qu’on en sort ?
Marc Santré
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Tribune politique publiée dans Lille Magazine N° 78 – Nov 2011