Pourquoi je ne voterai pas le Projet de loi constitutionnelle de protection de la Nation.
Lors des débats au Conseil de l'Europe sur la lutte contre le terrorisme, de nombreux parlementaires ont alerté sur le fait que les États occidentaux adoptent des lois dérogeant plus ou moins gravement aux principes démocratiques et aux libertés publiques.
Le point commun entre tous ces textes réside dans l’absence de définition réelle de ce qu’est un acte terroriste. La lutte contre le terrorisme légitime un renforcement considérable des pouvoirs des services de police, sans réelles garanties quant à leur usage.
Prenons le cas de la France. L’état d’urgence a donné le pouvoir à la police d’assigner à résidence et de perquisitionner sur simple décision administrative.
Face à ces attentats meurtriers, naturellement, pour intervenir, les services de police en France comme ailleurs, revendiquent toujours plus de pouvoirs en s’appuyant sur la peur, compréhensible, de nos concitoyens et sur la volonté des gouvernants de sembler faire quelque chose, faute de produire des résultats visibles et rapides sur un phénomène aussi complexe que le terrorisme, lié aux dictatures et aux intégrismes.
Mais, maintenant, le Gouvernement français annonce vouloir intégrer l’état d’urgence dans la constitution !
L’exception devient la norme, la démocratie s’affaiblit, les libertés publiques se réduisent pour une très hypothétique sécurité des personnes.
D'ailleurs, M. le Secrétaire général du Conseil de l'Europe a fait part au Président de la République du risque que le respect des libertés fondamentales soient affaiblies.
" Je songe notamment aux dispositions concernant l'usage des armes à feu par les forces de l'ordre et aux restrictions à la liberté d'aller et venir."
Alors que notre Constitution française est, selon le site du Conseil constitutionnel, un texte qui établit la règle que se donne le peuple concernant le fonctionnement des institutions et les règles relatives aux droits des individus, elle énonce, par son préambule, en 1946, des principes économiques et sociaux nécessaires à notre temps, ajoutés à la Déclaration des Droits de l 'Homme et du citoyen de 1789. S'y ajoute en 2004 la Charte pour l’environnement.
La Constitution c'est la loi des lois, l'acte solennel par lequel la société civile déclare les principes qui la fondent, qui la rassemblent, qui l'organisent.
Aussi, "l'autorité intelligente" que le Peuple français accorde à son Président de la République et que Cicéron considérait comme gardienne de sagesse, aurait voulu que la Constitution ne puisse être modifiée en temps de troubles. Il aurait été préférable de se rassembler autour de ses valeurs.
Le moins qu'on puisse dire c'est que ce n'est pas le cas, surtout pour son deuxième article concernant la déchéance de nationalité, qui, de fait, met en avant deux catégories de français, considérant qu'à priori, les uns seraient plus menaçant pour la sécurité du pays que les autres.
Un enfant de parents de nationalités différentes porte en lui la belle histoire de l'amour qui ne connait pas les frontières. Lui demandera-t-on un jour de choisir entre son père et sa mère ? Lui demandera-t-on de renier son histoire multiculturelle, multicolore et porteuse d'espoirs de paix.
Alors que nous devrions plutôt agir à favoriser la lutte contre le racisme et les discriminations, et aux moyens d’une meilleure inclusion et justice sociale et inter-culturelle de tous et en tout lieu, que nos concitoyens attendent de leurs élus un débat sur le partage du droit au travail et des revenus, nous voilà empêtrés dans un débat qui divise.
Lundi 1er février, à Port Ste Foy, lors de la réunion publique sur la citoyenneté que j'organisais, ont été exprimées le besoin de valoriser tout le travail des citoyens au quotidien, par l'éducation populaire, la solidarité, l'écoute, le respect des autres, la laïcité qui fondent notre République démocratique.
Je ne voterai donc ni cet article, ni cette loi, quel que soit la sémantique et les subterfuges que vous proposerez.
Je reprendrai donc plutôt cette phrase de Georges Sand, qui disait : pour faire des citoyens, " faites agir ; il ne suffit pas de laisser agir. "
Pour que ces devises indissociables qui sont les nôtres de Liberté, égalité, fraternité rayonnent partout sur la Terre, pour élever les jeunes en citoyens du Monde.
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