Recherches minières en Bretagne? Pour les élus EELV, il y a déni de démocratie. Lettre à Emmanuel Macron.
Lettre ouverte à Monsieur le Ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique.
Monsieur le Ministre,
Le Préfet des Côtes d’Armor vient d’octroyer un permis exclusif d’exploration à la société Variscan (filiale du conglomérat Australien « Platsearch ») sur une superficie de 585km². Nous sommes étonné-e-s à plusieurs titres par cette décision.
Lors de la session du Conseil régional de Bretagne le 27 juin 2014, un vœu concernant les projets de recherches minières en Bretagne, à l’initiative du groupe des élus écologistes, a été voté à l’unanimité. Ce vœu montre le besoin, toutes tendances politiques confondues, de transparence et de débat démocratique sur ce sujet dont les conséquences à long terme seront importantes. Or, le Préfet des Côtes d’Armor n’en a pas tenu compte.
Ce vœu demandait aux instances compétentes:
– de faire preuve de vigilance sur la nature des demandes d’exploitation et d’exploration de substances polymétalliques, ainsi que sur la gestion des contraintes et retombées environnementales ;
– de vérifier le respect des objectifs affichés afin que les sondages ne soient pas détournés au profit de toute autre exploration non déclarée ;
– d’engager un vrai débat démocratique ainsi qu’une transparence totale en cas de demandes de recherches minières.Nous considérons que cette décision excluant les élu-e-s du territoire est un déni de démocratie et nous nous sentons floué-e-s.
A l’heure où des projets impactant profondément l’environnement sont contestés localement et parfois de façon violente et à l’heure où le président de la République exprime sa volonté de renforcement de la démocratie participative dans ce domaine, nous considérons que cette décision va à l’encontre de cette prise de conscience.
La Ministre de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie, chargée de la mise en œuvre de cette réflexion, l’a confié aux membres du Conseil National de la Transition Écologique (CNTE). Ceux-ci reconnaissent que la consultation du public et des acteurs concernés n’est jamais organisée suffisamment en amont du projet, que les projets alternatifs ne sont pas étudiés, que la concertation intervient alors que les projets sont déjà ficelés et des moyens engagés, que l’enquête publique est vécue comme une contrainte formelle alors que la réglementation en matière d’environnement -la convention d’Aarhus et la Charte de l’environnement- prévoit clairement un temps de participation et d’association du public à la prise de décision et pas seulement une consultation.
Bien sûr les recherches ont peu d’effet sur l’environnement, mais si celles-ci s’avéraient positives, aucune information n’est donnée sur les impacts de l’exploitation éventuelle, son cadrage juridique et technique et son déroulement.
La révision du code minier est en panne, aussi, tant qu’un nouveau cadre juridique concernant l’exploitation n’est pas clairement défini et en vigueur, nous pensons prématuré de mener ces recherches.Nous, conseiller-ère-s régionaux-ales EELV de Bretagne, pensons que la démocratie se porte mal et, tant que les pouvoirs publics n’auront pas la volonté de prendre en compte réellement le point de vue des mouvements citoyens, les ZAD fleuriront face à ces passages en force de projets contestés par des citoyen-ne-s et des élu-e-s responsables.
Groupe des élu-e-s régionaux EELV :
René Louail, président
Yanick Bigouin, conseiller régional
Anne-Marie Boudou, conseillère régionale
Guy Hascoët, conseiller régional, ancien Secrétaire d’Etat à l’ESS
Janick Moriceau, conseillère régionale
Yvette Rayssiguier, conseillère régionale
Gaëlle Rougier, conseillère régionale
la lettre des élus du 18 mars 2015 ici
La réponse de Monsieur Macron du 9 juin 2015:
Suite à notre courrier du 20 mars au Ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique, sa cheffe de cabinet nous a répondu, « tout va bien, la loi est respectée, donc laissez faire l’entreprise…. ».
L’essentiel de cette réponse nous rappelle le cadre réglementaire des permis de recherches minières ; c’est utile mais non suffisant par rapport à nos demandes.
Sur les manques de débat et de transparence, tout aurait été fait….
A nos inquiétudes concernant le manque d’information sur les impacts de l’exploitation éventuelle, il nous faudra attendre car seul un dossier de demande qui comprendra en particulier une étude d’impact soumise à enquête publique permettra de les connaître….
Enfin, ce qui est écrit sur la révision du code minier, apparemment ré-engagée, nous satisfait puisqu’elle « vise essentiellement à y introduire des innovations, notamment pour renforcer les modalités de prise en compte des enjeux environnementaux dès l’amont des projets, ainsi que les modalités de participation du public ».
Nous attendons avec impatience cette évolution, qui nous espérons sera réelle, pour qu’enfin les habitants puissent participer aux choix liés à leur territoire !
Anne-Marie Boudou, conseillère régionale EELV en Bretagne