Accueil Actualités Débat Center-Parcs du ROUSSET: Intervention de François Lotteau lors de la plénière du 8 juin

Débat Center-Parcs du ROUSSET: Intervention de François Lotteau lors de la plénière du 8 juin

En 5 minutes, il faut aller droit au but et ne pas se tromper d’objectifs.

Le Débat public est un processus qui doit permettre à chacun de prendre connaissance d’un sujet dans ses diverses dimensions, de peser les arguments et de démêler, derrière les discours de persuasion, le vrai du faux. Ce travail de décryptage et de mise à plat peut aboutir à lever des incompréhensions, mais le Débat public n’a pas pour objectif de déboucher sur un compromis et n’est pas décisionnel. Il éclaire les citoyens et les acteurs du projet.

Aussi, je vais poser deux questions qui n’ont pas encore trouvé réponse. Deux questions essentielles. Il y en a d’autres, bien sûr, et je ne reviens pas sur les interventions précédentes.

La première touche à la motivation des élus et aux attentes des citoyens, elle porte sur l’emploi.

La seconde concerne la durabilité du projet.

Ne pas répondre ou répondre à côté à l’une ou l’autre de ces questions rendrait de fait le projet caduc car il ne s’agit de rien d’autre que de savoir s’il est justifié d’engager de l’argent public, sans lequel le projet restera dans les cartons.

L’emploi et la création de richesses :

L’objectif le plus fortement mis en avant par les élus est la création d’emploi. C’est une préoccupation majeure. De ce point de vue, la question est de savoir

Combien coûte à la collectivité un emploi dans le projet Center parc ?

Je me suis déjà entendu répondre par des élus, sur le ton du politique responsable, qu’un emploi, dans les circonstances actuelles, ça n’avait pas de prix et, de façon moins explicite, peu importe la qualité de l'emploi! Il me semble pourtant qu’un projet qui, avec la même somme, garantit des conditions de travail décentes et qui crée deux emplois est meilleur qu’un projet qui n’en crée qu’un

La vraie responsabilité du politique est de promouvoir des emplois de qualité, et de mettre en œuvre les alternatives à deux, trois ou quatre contre un, même et surtout en prenant en compte l’équilibre entre les territoires. Connaître ce coût, comparer, proposer. La solution clés en mains pour l’emploi présentée par Pierre et Vacances est-elle une opportunité ou une solution de facilité hors de prix ?

Par conséquent, les collectivités doivent être en mesure, face à cette interrogation, de proposer une étude comparative, à somme égale, dans des secteurs à fort potentiel d'emplois comme l'agriculture locale et biologique, les énergies renouvelables et la promotion du patrimoine naturel et historique pilier de l'écotourisme.

D'autant que certains secteurs d'activités, comme le patrimoine, sont menacés par des pertes d'emplois et des cessations d'activités à cause de la diminution des aides publiques et particulièrement celles du Conseil Départemental.

Nous demandons une évaluation des emplois détruits et des effets de la déstructuration

des réseaux associatifs dus aux réductions des aides publiques à ce secteur dynamique

qui assure un véritable maillage du territoire. Ceci est à mettre en balance avec les aides considérables apportées en un seul point et pour des résultats touristiques et culturels forcément minimes à l'échelle du territoire et entre donc de plein droit dans la problématique de notre débat.

La durabilité du projet :

Combien de temps les critères retenus pour évaluer la faisabilité du projet resteront-ils inchangés ?

Les hypothèses sont-elles suffisamment solides pour espérer garantir raisonnablement une exploitation optimale dans la durée ?

La question est : Pierre et Vacances a-t-il prévu un « plan B » si les objectifs ne sont pas atteints dans les délais prévus ou s’ils le sont mais pas sur une durée suffisante ?

Dit autrement, le désir légitime des élus d’agir pour l’emploi ne doit pas masquer les risques d’une exploitation déficitaire. L’argent public devient trop rare pour se permettre de ne pas se prémunir au moins contre les pertes les plus lourdes, le choix ayant été fait d’emprunter via une SEM.

Dit autrement encore, est-il prévu de pouvoir passer d’un système d’exploitation optimum à un système de type low-cost ? Si ce n’est pas le cas, sur qui porte le risque ? Si c’est prévu, il n’est pas envisageable de ne pas le dire dans le cadre de ce débat. Comment calculer le prix de revente, au bout de combien d’années ? Enfin, le démontage de la bulle au cas où son entretien deviendrait trop coûteux et sa fréquentation trop faible, est-il provisionné, est-il garanti en cas de reprise ?

Ce projet est trop cher et trop impactant pour le lancer sur un coup de dé, ce qui serait le cas si ces précautions quant à son avenir n’étaient pas prises.

De même que j’ai entendu que l’emploi n’avait pas de prix, j’ai entendu aussi que rien ne se faisait sans risque. L’esprit d’entreprise, qui implique des prises de risques calculés, est trop souvent confondu par les élus avec la nécessité d’honorer leurs promesses en saisissant des opportunités parfois illusoires.

Or, il est possible que nous soyons dans ce cas de figure. En effet, la clientèle des Center parcs décroitra probablement dans les années à venir. Pour deux raisons : d’une part son appauvrissement relatif et d’autre part l’évolution de ses aspirations.

Le modèle Center parcs, seule planche de salut de Pierre et Vacances, fait le pari d’un désir de nature auquel il est répondu par une offre qui sera sous peu d’années perçue de plus en plus négativement, apparaissant, au fur et à mesure de la progression d’une conscience environnementale, pour ce qu’elle est : un artifice en contradiction avec des valeurs en cours d’appropriation par les couches moyennes hautes qui sont encore aujourd’hui sa cible. Ces valeurs sont celles de l’écologie. Respect de la nature réelle, protection de la diversité biologique et valorisation des services rendus à l'homme, économie des ressources non renouvelables, réduction des émissions de CO2. La Conférence climat de Paris approche, la sensibilisation s’accroit et cela continuera.

Je ne crois pas que l’argument de Center parc réduisant l’utilisation des avions puisse être pris au sérieux encore bien longtemps.

Je crois à l’utilité du Débat public et je suis certain, Madame la Présidente, mesdames et messieurs les membres de la Commission, que vous obtiendrez de Pierre et Vacances, demandeur de ce débat, et des partenaires publics, les réponses à mes questions.