Que penser des gaz de schiste ?

En France, la question de l’exploitation des Gaz de schiste (GS) anime le débat social et semble loin d’être définitivement tranchée. Pour preuve, l’hésitation de l’actuel gouvernement qui suspend un certain nombre de permis reposant sur la technique de la fracturation hydraulique sans toutefois en interdire l’exploration. C’est que les enjeux économiques et environnementaux qui en découlent sont considérables et souvent incompatibles. 
Deux oppositions se manifestent au sein de la société : représentants de l’industrie pétrolière d’un côté, inébranlables croyants des bienfaits du capitalisme et ardents défenseurs du tout progrès technique, et de l’autre côté les écologistes qui s’interrogent (peut-être justement) sur le bien fondé d’une marche en avant forcée vers l’exploration d’une ressource assez mal maîtrisée dans d’autres contrées (exemple Nord Américain à l’appui). Les uns défendant l’idée « d’un trésor caché sous nos pieds » qui aiderait la France à s’affranchir du tout nucléaire, de la dépendance au gaz étranger, tout en permettant la création de bon nombre d’emplois sur notre territoire ; les autres qui appellent à l’avènement d’un autre modèle de société, fondé sur les notions d’efficacité, de sobriété et de durabilité, et proclament l’urgence d’une vision globale sur notre consommation énergétique. 
Du débat social, je retiens deux problématiques : l’analyse des risques et du rôle de la société. Véritable fiasco démocratique vu le manque de transparence, d’information et de consultation du public, les GS sont actuellement exploités aux Etats-Unis mais aussi dans certains pays européens (Pologne). Est-ce pour les mêmes raisons ? Du point de vue entrepreneurial certainement : l’appât du gain le justifierait. Mais, qu’en est-il du consentement social ? La culture américaine encouragerait l’initiative individuelle et la prise de risque, adossée à une logique (assez permissive) de réparation des dégâts, alors qu’en Europe le principe de précaution prévaudrait. Mais alors pourquoi l’extraction des GS en Pologne ? Parce que la perception du risque et son acceptation sociale dépendent également du niveau des revenus. Les pauvres n’ont ni la formation ni le choix, et la sortie de la pénurie les amène souvent à accepter des risques jugés inacceptables par les nantis. 
Quant aux risques encourus, ils se révèlent plutôt importants de par leur nature et probabilité. Au menu : pollution de l’air, des eaux, des sols, risque sismique et concomitante baisse des valeurs immobilières, dégagement de matières radioactives et impact sur la santé, atteinte à la biodiversité et contamination probable des nappes phréatiques. Contamination probable, voire même certaine, puisque les techniques de fissuration à l’horizontale utilisées pour l’extraction des GS multiplieraient par un facteur 1000 le risque d’accident par rapport à l’extraction dite conventionnelle. La protection des Biens communs de l’humanité serait-elle abandonnée au profit d’une logique marchande fonctionnant selon le principe de la privatisation des profits et de la socialisation des risques !     
Dès lors, faut-il persister dans l’idée d’un modèle de développement fondé sur la consommation d’énergies fossiles, épuisables, de moins en moins disponibles et qui, de surcroît, impactent dangereusement le climat, ou alors préparer, dès aujourd’hui, la nécessaire transition énergétique en accordant aux énergies renouvelables une place de choix dans le paquet énergétique et en réservant le peu qui reste des énergies fossiles pour des utilisations stratégiques, présentes et à venir ? N’est-ce pas là faire preuve de bon sens, de clairvoyance et de responsabilité intergénérationnelle !!!  

  Rui OLIVEIRA SANTOS  EELV32

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