Intervention de Marc HORVAT, Président du groupe EELV en Scéance plénière du 21 mars 2013
CONSEIL REGIONAL DU LIMOUSIN
Séance plénière du 21 mars 2013
Intervention de Marc HORVAT, Président du groupe Europe Ecologie-Les Verts
M. le Président, très estimés collègues
J’ai eu l’occasion à de nombreuses reprises de rappeler tout l’attachement, l’engagement que nous avons pour l’Union Européen, mais au vu de l’actualité, je me dois de poser la question :
Que se passe-t-il avec l’Europe ? Où est la grande idée d’un espace convergeant, vivant en paix dans la prospérité ?
Alors que les collectivités locales souffrent déjà d’un accès difficile aux investissements, la baisse du budget global était déjà un signe très négatif, et à l’inverse très positif en direction des eurosceptiques. Mais qu’en plus, il n’ait pas été possible de plafonner les subventions PAC au profit des exploitations les plus riches et les plus rentables, cela prend un sens particulier pour notre région d’élevage, ainsi que pour l’ensemble de nos concitoyens, les grecs apprécieront. Le record : 178 millions d’€, pour une coopérative sucrière. Où est l’idée d’une plus grande justice sociale ? Mais la cerise sur le gâteau date de cette semaine, et ceci sans préjuger de la chute de cette lamentable affaire : pendant des années, depuis mai 2004, l’UE a accepté un état membre en état de quasi paradis fiscal, quoi qu’en cohérence avec d’autres, comme le Luxembourg, la Belgique, Guernesey, l’île de Man, Jersey, la Lettonie, l’Irlande et j’en passe. Comment une institution peut exiger un prélèvement sur le compte d’épargnants sans enquête préalable ni jugement ? Et que dire de ce désengagement au dépend du fond alimentaire ? Quel est le message qui est donné sur la légitimité de l’Europe et ses pratiques ?
Parce que l’histoire du minerai de viande, ou de la viande de cheval, ou de mouton, ou je ne sais quoi encore qui nous reste à découvrir, trouve aussi un chapitre au Luxembourg, et en Belgique. C’est-à-dire que la « valeur ajoutée » a été captée fiscalement dans les pays dont la législation est la plus favorable. 3€50 les 25 KGs. Quel que soit la viande utilisée, voire même éventuellement du bœuf, c’est de la merde qu’on donne à manger, de la nourriture pour chien. Et en plus, ça permet la défiscalisation, l’enrichissement des voyous et l’appauvrissement des Etats et des éleveurs. Cette même Europe, avec l’Allemagne en tête, qui s’est refusé d’interdire les néo nicotinoïdes, alors qu’un seul gramme de ces substances suffirait à potentiellement éliminer toutes les abeilles de France. Quant aux effets sur les humains, ils sont tout simplement inconnus. Ils sont inconnus parce qu’il n’y a pas de recherche. On ne s’intéresse pas à leurs effets sanitaires, alors que leur cibles, ce sont les neurones. Le système central nerveux des insectes, soit, mais quid du nôtre ?
C’est là que le premier pas fait par la Région, en vous proposant d’entrer dans la dynamique zéro pesticide, prend tout son sens. Et le message est fort pour tous les utilisateurs, même s’il reste du chemin à parcourir. Car cela implique que la sélection des plantes en laboratoire doit cesser, qu’il faut travailler la terre différemment, redécouvrir l’utilité des écosystèmes, réorienter les aides, soutenir les alternatives, sortir de cette logique du déni de mise en danger, et faire face aux lobbies. Cela fait par ailleurs déjà 4 années que le Limousin intervient en finançant l’animation autour de la signature des chartes zéro pesticide pour les collectivités locales. Le Limousin par ailleurs, est reconnu pour l’aide apportée à l’association nationale pour la promotion des PNPP.
Nous avons pu, M. le Président, avec votre soutien, rencontrer librement des arboriculteurs, échanger avec eux, leurs permettre l’élaboration de mesures pour une transition agricole avec pour seul objectif, cesser le massacre tout en développant l’activité économique agricole. Nous vous avons transmis, par la voix d’un chercheur de la chambre d’agriculture, les propositions issues de ces travaux. Et ces préconisations sont bonnes, par ce qu’elles sont librement consenties par les principaux intéressés, et qu’elles ont reçu un écho très favorable des riverains. Elles tendent vers la disparition de l’usage des pesticides. L’appel des 80 médecins limousins concernant les dangers sanitaires liés aux pesticides à fait le tour de France, a été relayé dans la presse, radios, télévisions. Nous ne pouvons pas faire comme si rien n’était, le message porté par la Région est bon, mais devra trouver son relais et ses formations dans les lycées agricoles, dans la formation initiale et continue, dans les bulletins et informations à destination des professionnels. Jardiniers paysagistes comme agriculteurs, c’est de notre responsabilité, il reste beaucoup à faire.
Tout comme il est de notre responsabilité de se positionner collectivement sur le devenir de nos espaces, du territoire Limousin. Faut-il défigurer nos paysages, dégrader notre eau au profit du mirage des gaz non conventionnels, qu’ils soient de schiste ou de houille, ce sont tout autant des accélérateurs du réchauffement climatique ? Alors qu’il y a tant à faire pour la transition énergétique. Le plus grand gisement d’énergie, et sans aucune commune mesure avec l’extraction de quelques années de stocks fossiles, se trouve dans les économies, dans la réhabilitation des logements, la construction de logements neufs, de logements sociaux. Mais encore faudrait-il pour cela que la DDT concède plus de quotas d’agréments. 140 logements seulement sur Brive par an. Est-ce pour ménager les prix exorbitants du foncier ?
Là est le gisement d’emplois, le rééquilibrage de la balance commerciale énergétique, l’amélioration des conditions de vie, l’augmentation du pouvoir d’achat : près de mille € par ménage, c’est possible, vu les couts de chauffage qui s’envolent. C’est, M. le Président, chers collègues, le principal levier du retour vers un cercle vertueux, si on veut bien s’en saisir. J’ai toute confiance dans notre ministre du logement pour améliorer la situation, mais ce ne se fera qu’avec le relais d’une dynamique locale, l’invention de nouveaux financements basés sur le partage des fruits des économies d’énergie, la formation de professionnels chevronnés, la valorisation de notre production forestière, l’innovation en faveur de procédés plus efficients, plus accessibles. Un véritable chantier d’avenir, une vision de la prospérité sans croissance.
Récemment, j’ai découvert avec quelque surprise les propos de Michel Rocard et de Pierre Laroutourou, que je connaissais plutôt comme les chantres de la croissance, je souhaiterai les citer ici, et rendre hommage à leur liberté de ton :
« Toutes les grandes défaites se résument en deux mots : « trop tard », affirmait le général Douglas MacArthur. Allons-nous attendre qu’il soit trop tard pour mesurer la gravité de la crise, en Europe et dans le reste du monde ? Allons-nous attendre qu’il soit trop tard pour nous attaquer à ses causes fondamentales et pour agir en posant des actes à la mesure des dangers qui nous menacent ? En ce début 2013, la question n’est pas d’être optimiste ou pessimiste. La question est d’arrêter de faire l’autruche. »
« Nous devons établir nos budgets et nos politiques de l’emploi en misant sur une croissance zéro… C’est une vraie révolution. Nous avons été habitués à confondre croissance et progrès. Nous avons été habitués à confondre croissance et justice sociale. Nous avons été habitués à confondre croissance et financement des services publics. Ce ne sera plus jamais le cas… Ce n’est pas de la croissance que viendra la justice sociale, mais c’est d’un surcroît de justice sociale que viendront la stabilité économique et la prospérité. »
Le titre de l’ouvrage : « la gauche n’a plus droit à l’erreur » et le sous titre « arrêtez les rustines »