CONSEIL REGIONAL DU LIMOUSIN Séance plénière du 22 mars 2012 Intervention de Marc Horvat

CONSEIL REGIONAL DU LIMOUSIN

Séance plénière du 22 mars 2012

Marc Horvat

Intervention de Marc HORVAT, Président du groupe Europe Ecologie-Les Verts

Je m’associe avec les républicains responsables et les propos solidaires déjà évoqués ici, au chagrin des familles de Toulouse et de Montauban, en espérant que la république sache se maintenir à distance des dérives sécuritaires qui pointent leur vilain nez brun ici et là.

M. le Président, permettez-moi de vous remettre ce rapport de l’OCDE, la très réputée Organisation pour la Coopération et le Développement Économique, perspectives de l’environnement à l’horizon 2050, les conséquences de l’inaction. Non pas, M. le Président, pour laisser sous entendre que le Conseil Régional du Limousin serait frappé d’immobilisme, mais pour bien rappeler que la période dans lequel nous sommes entrés exige de nous un engagement, une disponibilité, une capacité de mobilisation que nous n’avons jusqu’ici rarement eu à mettre en œuvre, tout du moins depuis l’après guerre, tant les enchaînements qui se profilent sauront nous rappeler que nous sommes, humblement, des éléments et des serviteurs de l’Histoire.

Ce qui y est dit, chers collègues, c’est que la multiplication par 3 de l’économie mondiale depuis 1970 a laissé des traces indélébiles sur l’état de notre climat, du fait de l’explosion de la production des gaz à effet de serre.

Que la course effrénée à la consommation se fait au prix de l’appauvrissement de la biodiversité qui représente un coût estimé de 2 à 5.000 milliards de dollar par an.

Que les projections montrent une disponibilité de l’eau de plus en plus problématique, associée à des prélèvements en croissance que la pollution atmosphérique devrait devenir la première cause environnementale de décès prématurés.

Si le constat et la prospective ne sont pas particulièrement riants, le rapport propose des voies d’améliorations, voire des inversions de tendances si, dans les politiques mises en œuvre, pouvaient être intégré l’augmentation du coût des activités polluantes par rapport aux solutions vertes, que les prix intègrent les services éco-systémiques et patrimoniaux, que l’on supprime toutes subventions aux activités polluantes tout en encourageant l’innovation verte et les règles environnementales.

On est bien loin des propos de campagne des uns et des autres qui voudraient que « l’écologie ça commence à bien faire » que les « contraintes » environnementales empêcheraient l’économie, voire les propos délirants d’un certain nombre de présidents de chambres d’agriculture qui voudraient rendre les écologistes responsables des difficultés rencontrées par les agriculteurs, plutôt que de s’interroger sur la durabilité d’un système basé sur les exportations, et de fait particulièrement fragilisé face à la fluctuation des cours et l’augmentation des intrants (40% en 2 ans). Si quelques bougons trouveront que nous sommes fort éloignés des considérations locales, peut-être parce qu’ils considèrent bien à tord que notre cher Limousin se trouve sur une autre planète, je rappellerais que la France est condamnée par la communauté internationale et européenne pour la légèreté avec laquelle elle traite (maltraite) son eau, que environ 80% des réservoirs de surface du Limousin sont touchés par une eutrophisation répétée du fait des concentrations en nitrates et en phosphore, et que la région, solidaire de ses agriculteurs a su prélever 4 millions d’€ sur son budget pour soutenir l’activité locale frappée, et il n’y a plus guère de doute la dessus, par les effets grandissants du dérèglement climatique, il n’y a qu’à tremper ses orteils dans les cours d’eau d’ici et aujourd’hui pour en faire l’amer constat. Et que si le Limousin est bien sur la planète décrite plus haut par les experts de l’OCDE, la sècheresse historique qui frappe le royaume uni, l’Espagne et toute l’Europe du sud, le Maroc, une partie de l’Amérique centrale, du sud, le Sahel associée aux inondations du nord de l’Europe, du sud Tunisien, d’Australie, de Nouvelle Zélande, ces extrêmes climatiques vont rappeler que l’autonomie des exploitations n’est pas issu d’une fatwa écolo, mais une nécessité économique et sociale si on veut limiter les impacts de la mondialisation sur l’agriculture et si on veut limiter les impacts de l’agriculture sur l’eau. Il n’est pas anodin qu’ « UFC que choisir » publie son rapport sur la qualité de l’eau potable en France dont les résultats sont sans appel : la qualité de l’eau potable se dégrade à l’écart des villes, nitrates, pesticides se trouvent dans l’eau des robinets de nos zones rurales, issus de l’agriculture et essentiellement de l’agriculture. Or, ces produits présents dans l’eau que nous consommons, ce sont des produits chers, des intrants dont le prix ne cesse d’augmenter, des « phytosanitaires » dangereux pour ceux qui les utilisent comme pour ceux qui les consomment, ce sont des millions d’Euros du revenu agricole qui sont lessivés dans nos assiettes, et qui font exploser le coût du retraitement de l’eau et qui font exploser le budget de la sécu.

Pour rappel, ni l’OCDE, ni l’UFC que choisir ne sont à ma connaissance des groupuscules rattachés à Europe écologie-les verts.

Pour répondre à ces enjeux, M. le Président, chers collègues nous devons réussir à inverser le fonctionnement de notre institution, c’est à dire non seulement privilégier le financement des seules activités qui profitent au maintien de l’économie locale, et des éléments du SRDE 2 vont dans ce sens, mais surtout nous devons être à l’initiative des projets les plus dynamisants pour la transition économique, sociale et environnementale que la situation impose. Nous devons être l’amplificateur au service de notre territoire, nous pouvons être le promoteur du faire bien, à l’initiative des actions les plus opportunes, plutôt que de répondre à des demandes parfois opportunistes. Il ne s’agit pas non plus de politiser le développement économique, il s’agit encore moins de relâcher les vieux démons du centralisme, mais de rester à l’écoute au plus près des acteurs locaux et des expérimentations réussies ailleurs pour avancer à pas légers vers la prospérité, qui, je le rappelle, n’est pas synonyme d’une consommation débridée de machins en plastiques inutiles, de réalisations bétonesques et pharaoniques, ou d’innovations technologiques qui le sont le matin mais détrônées le soir par plus innovantes encore jusqu’au matin suivant, déjà obsolescentes, mais plutôt l’accompagnement volontaire d’initiatives favorables au bien commun et locales, durables et inoffensives. Et les outils sont présents, M. le Président, chers collègues, quand la commande politique est claire, il se trouve des acteurs pour réaliser un travail considérable, il ne manque pas dans ces murs de personnes qualifiées et engagés pour se saisir de la tâche, et même à l’extérieur s’il fallait n’en citer qu’un seul, Limousin Expansion, qui ne demande que ça.

Telle que la délibération qui nous sera proposée plus tard, c’est à dire celle qui décidera, avec votre assentiment, chers collègues, le principe d’accompagnement des coopérations entre les entreprises pour l’innovation, qui à mon sens, M. le Président, place la région dans son rôle le plus noble, celui qui crée le lien autour du développement, plutôt que de placer la concurrence au pinacle de la construction économique, et ceci au profit de notre territoire, et au profit de la conscience d’être et de vivre sur notre territoire.

Il faut, M. le Président, chers collègues, travailler ensemble pour développer les outils qui permettront de placer la région au centre de l’initiative, c’est à dire quels moyens pour la veille technologique et sociale, quels outils statistiques et épidémiologiques pour tracer les limites de l’action si elle ne veut pas continuer à nuire à la santé et au développement des individus, quelles coopérations pour porter la demande sociale au plus près des associations, des entreprises et des collectifs, quels moyens humains et matériels à mettre à la disposition du développement, et ceci pour contredire l’OCDE, pour pouvoir faire et dire: nous n’aurons pas en Limousin à payer le prix de l’inaction.

Merci pour votre attention.

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