Intervention de Dominique Normand au Conseil municipal de Limoges, le 06/12/2006
Monsieur le maire, cher-e-s collègues,
Depuis 5 ans nous avons droit à une avalanche de textes législatifs portant sur la sécurité et la délinquance, le dernier en date, voté hier à l’assemblée en première lecture par les seuls députés UMP, étant présenté comme un projet de loi pour « la prévention de la délinquance ».
Ce projet de loi du ministre de l’intérieur, ainsi intitulé, n’a de prévention que le nom. Cette habileté sémantique consistant à habiller un texte répressif de façon à faire croire à des intentions autres n’est pas nouvelle (voir loi sur « l’égalité des chances » par exemple).
De plus ce projet, qui arrive après une succession de lois sécuritaires (loi sur la sécurité intérieure, loi pour l’égalité des chances, loi sur l’immigration et l’intégration…) atteint des sommets en matière de cynisme, de violation des droits de la personne humaine, de non respect de conventions internationales (droits de l’enfant en particulier), de stigmatisation de catégories de population et d’attaques envers les principes fondamentaux de certaines professions (mise à mal du secret professionnel, incitation à la délation, confusion des pouvoirs,…).
Nous passons ici une autre étape : après les lois sécuritaires, la loi totalitaire. . Les catégories professionnelles concernées, que ce soit au niveau de la santé, de la justice ou du travail social, ainsi que les organisations soucieuses de solidarité et de justice sociale, sont à juste titre fortement mobilisées contre ce projet de loi. De nombreux avis très réservés ont été émis par des institutions telles que la commission nationale des droits de l’Homme et la commission informatique et liberté, ainsi que la Caisse Nationale des Allocations Familiales.
De plus ce texte stigmatise les populations en difficulté, en faisant d’elles des nids de délinquants potentiels, et organise autour des familles tenues pour seules coupables de la délinquance un véritable fichage. Il met à mal les politiques de prévention en faisant le choix de pénaliser l’ensemble de la vie sociale, sans jamais s’attaquer aux racines des maux. Il est muet sur les moyens dévolus à la réinsertion.
Les Verts soutiennent la mobilisation qui s’est mise en place contre ce projet de loi et y sont partie prenante. Tous les citoyens doivent avoir conscience du danger que constitue ce texte, aux visées exclusivement répressives, témoignant d’un choix de société rompant avec tous les principes de solidarité et mettant en danger les libertés individuelles.
Le ministre voudrait aujourd’hui transformer tous les professionnels de l’éducation, de la prévention et du soin, en policiers, sous la houlette du maire. Celui-ci voit ses pouvoirs de police accrus, auxquels s’ajoute un pouvoir de contrôle social considérable.
L’association des maires de France s’est inquiétée à juste titre des prérogatives qui leur seraient ainsi données, changeant la nature même de leurs relations avec leurs administré-e-s, entraînant une confusion entre les missions de chacun des acteurs de la sécurité, et un transfert de responsabilités de la part des services de police, de justice ou de l’éducation nationale vers les seuls maires. En effet, si ce texte est adopté, le maire, pivot du dispositif, devient à la fois travailleur social, policier, juge et psychiatre… A cette confusion s’ajoute également celle concernant la répartition des compétences entre conseil général et municipalité.
C’est pourquoi il nous semble essentiel que les conseils municipaux s’expriment et se positionnent fermement sur cette question.
La France que veut nous préparer Nicolas Sarkozy ressemble à un pays sous surveillance policière permanente. Les Verts refusent ce modèle de société, contraire à toutes les valeurs de l’écologie politique, et dénoncent ce projet de loi fondé sur une logique uniquement répressive et désignant jeunes et précaires comme des dangers sociaux. Ils attendent de tous les parlementaires conscients de leurs responsabilités face à nos concitoyens qu’ils votent contre ce projet de loi.
Monsieur le Maire, cher-e-s collègues, je vous remercie