Nucléaire, compétitivité et pouvoir d’achat

Après le Figaro en octobre, la presse se fait aujourd’hui l’écho d’une « étude » annonçant que la sortie du nucléaire coûterait très cher et affecterait les plus modestes et la compétitivité de nos entreprises. Cette fois il ne s’agit pas de transposer hâtivement une donnée allemande mais des calculs de l’Union Française de l’Electricité (UFE), des producteurs et vendeurs d’électricité donc. 

Face à ces pseudos « évidences », Europe Écologie Les Verts invite à regarder les faits en face. Ils sont aussi têtus que les productivistes du nucléaire.

La vraie responsabilité est de ne plus « raser gratis » sur le prix de l’énergie

Le temps de l’énergie abondante et bon marché est fini. L’inflation prévisible des énergies fossiles vaut aussi pour l’électricité. EDF demande une hausse des tarifs de 30% et l’UFE table sur 33%… Le choix n’est donc pas entre un scénario bon marché et un scénario coûteux, mais de limiter le coût pour les ménages au travers de la tarification sociale de l’énergie et de l’efficacité énergétique. 

Comparons ce qui est comparable : des investissements seront nécessaires quelque soit la manière dont on produit l’énergie. La plupart des réacteurs nucléaires arriveront en fin de vie d’ici 2030. Choisir de rester dans le nucléaire signifie investir massivement non seulement dans la prolongation et la mise à niveau de sécurité du parc actuel, mais aussi dans un nouveau parc dès la décennie qui vient. Benjamin Dessus*, spécialiste des coûts de l’énergie conclut que la poursuite du nucléaire coûterait 10 à 15% plus cher qu’un scénario de sortie ; avec des incertitudes relatives à un dérapage des coûts extrêmement plus fortes dans le cas du nucléaire. 

La transition énergétique : anticiper les crises plutôt que les subir

Face à l’augmentation du prix de l’énergie – dont l’électricité – il faut instaurer une tarification progressive qui rendra les premières consommations très accessibles tandis que les surconsommations seront dissuadées. Rappelons qu’actuellement c’est l’inverse : ceux qui consomment le plus, paient le moins cher leur électricité. La tarification progressive proposée par les écologistes fait d’ailleurs l’unanimité au sein des partis de gauche.

Mais la véritable réponse réside dans les économies d’énergie. Aujourd’hui, un ménage allemand consomme 25% d’électricité de moins qu’un ménage français alors que le niveau de consommation des deux côtés du Rhin était le même en 1991! Cette différence s’explique par la mise en œuvre d’une politique d’efficacité énergétique. L’industrie allemande est également plus performante, malgré le coût de l’énergie Outre-Rhin. À l’inverse, rien en France n’est mis en œuvre pour économiser l’énergie. L’UFE, qui regroupe les vendeurs d’électricité, propose donc fort logiquement de consommer toujours plus. Demander aux producteurs d’électricité d’élaborer une stratégie énergétique vertueuse revient à demander aux industriels du tabac de définir la politique de santé publique. 

Agiter le chiffon rouge de l’accroissement du prix de l’électricité en cas de sortie du nucléaire revient à berner les Français. Dans tous les cas il faudra investir massivement. La question que nous posons est celle-ci : où voulons-nous investir ? En tant qu’écologistes, nous préférons, pour le même prix, avoir l’indépendance énergétique, la sureté et les centaines de milliers d’emplois en choisissant les énergies renouvelables et les économies d’énergie. 

Pascal Durand, Porte-parole

Denis Baupin, adjoint au maire de Paris, chargé du développement durable, de l’environnement et du plan climat

Hélène Gassin, vice-présidente de la région Île-de-France chargée de l’environnement, de l’agriculture et de l’énergie

* Président de Global Chance, ingénieur et économiste. Co-auteur avec MM Charpin et Pellat d’une étude économique prospective de la filière nucléaire remise à Lionel Jospin, alors Premier ministre (2000)

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