La nature en péril
Puisque n'existe ni positif ni négatif qu'en fonction des préjugés individuels et surtout de pressions sociales qui les encadrent, on nous invitera à ne pas voir dans l'autre que ce que nous avons décidé qu'il devrait être.
SARTRE dit « le mal c'est l'autre », Levi SRAUSS « le barbare c'est celui qui croit en la barbarie ».
La pollution de l'environnement dont on parle tant aujourd'hui fait elle-même partie d'une pollution beaucoup plus générale, plutôt un désir de pollution.
Il est arrivé à l'homme la même catastrophe qu'à la nature, objets des entreprises séculaires de Prométhée, DESCARTE avait lancé un appel aux savants qu'ils missent leur travaux en commun pour se rendre maîtres et possesseurs de la nature, à l'heure actuelle l'homme se pose un problème nouveau: non celui de transformation de la nature mais celui de la protection. Les grecs dans leur sagesse semblaient pressentir qu'on ne rompt pas impunément un équilibre naturel. Aujourd'hui l'air que l'homme respire, l'eau que l'homme boit, la terre qu'il cultive sont de plus en plus empoisonnés par des déchets de la production si bien que la nature risque de devenir biologiquement invivables et d'être transformer un véritable égout. Or nous nous trouvons aujourd'hui en présence des déchets et des résidus qu'on engendrés de telles entreprises. L'homme est devenu sa propre déjection, si bien que le problème qui se pose est celui de la protection d'une nature humaine, objet des coups de butoir de ceux qui veulent la défoncer. La tâche est si difficile que règne un système de la pensée unique qui ravale au rang de répression fasciste tout refus de consommer sa production. La différence n'existe pas. De nos jours l'homme risque de pourrir sur le lit de sa puissance. La multiplication des moyens de communication, les voies de la technique et celles de la politique sont autant d'efforts pour rejeter son vide intérieur
Au lieu de réagir à la situation actuelle, nous réagissons partiellement à ce que nous évoquons d'une situation passée ou à ce que nous imaginons d'une situation future, par exemple à propos du réchauffement climatique, notre comportement est moins commandé par l’événement que par les échos qu'il éveille en nous par les idées préconçues, les opinions pré établies, au travers desquelles nous le considérons. Il nous arrive fréquemment de renverser l'ordre naturel d'évaluation, au lieu de vérifier nos abstractions supérieures en les confondants aux inférieurs nous manipulons ces dernières pour les faire correspondre aux premières, nous jugeons les faits d'après nos théories et nous oublions de reconsidérer les théories à la lumière des faits. Ceci nous conduit à des extrapolations illégitimes, nous somme alors amenés à formuler nos constatations et nos opinions de manière autoritaire - dogmatique.
Nous somme nus devant la nature et nous mourrons nus, celui qui quitte la vie aura beau amonceler autour de son lit de mort l'immensité de ses richesses comme le fit SARDANAPAL, rien ne l'accompagnera dans la tombe, PASCAL le dit « on mourra seul », c'est la vanité qui motive notre civilisation, il est encore plus facile de ne trouver en elle qu'une rhétorique de nanti.
Les mourants accomplissent souvent les gestes d'un homme qui se dépouille et tente d'enlever tout ce qui pèse encore sur lui, ce sont peut-être les premières démarches libératrices de celui qui va se déshabiller de la vie.
Nous ne pouvons offrir à la nature extérieur et intérieur agonisante ou blessée qu'une aide partielle et provisoire, simplement des prothèses permettant des sauvetages mais jamais un salut. La nature, notre nature se présente à nous avec toute sa vulnérabilité touchante et naïve, nous somme pris du désir intense sincère de tout mettre en œuvre pour lui épargner une fin inexorable.
Attention, ne confondons pas celui qui était animé de faire du bien et de protéger qui risque de se transformer peu à peu en un conquérant se débattant dans toutes les dialectiques de la bonne et mauvaise conscience, attention à l'excès que le sauveteur ne devienne pas le séducteur, le conquérant.
Que dire et que faire devant le suicide collectif d'une humanité confrontée au désastre du changement climatique ?
Que dire et que faire en effet quand une grande partie de la population se débat dans la détresse et que nous-mêmes soyons enfermés dans la notre ?
Les belles paroles, les approches pédagogiques, les entreprises de persuasion, les techniques de communication, pour séduisantes ou perfectionnées qu'elles puissent être ricochent sur la peau de l'humanité comme une cuirasse.
Tout appel à la raison est ainsi comme une bouteille à la mer, de celui qui parle et de celui qui écoute il y a place pour toutes les tempêtes ou le message sera englouti.
Que faire ? Quel mot nouveau faudra t-il inventer, quels gestes inconnus devrait-on esquisser pour qu'on comprenne que le changement est en nous il ne faut pas changer sous la contrainte simplement pour sauver sa peau ou celle de vos enfants, il faut choisir librement et dire oui pleinement. Le drame tient dans ce dilemme ou bien la liberté sera respectée et une grande partie de l'humanité dira non.
On le voit pour Notre Dame des Landes ou elle dira oui qu'à la condition d'y avoir une contrainte telle est l'alternative que nous allons vivre et à laquelle nous tentons en vain d'échapper en voulant contradictoirement forcer l'humanité à dire enfin oui.
De tels déchirement naissent toutes les conduites d'acharnement contre soi-même ou contre les autres, l'humanité s'affronte alors depuis toujours dans un corps à corps qui n'est pas celui de l'amour mais dans lequel elle tente de vaincre cette peur panique du futur. C'est le début d'un désarroi en train de se transformer en folie destructrice.
Gérard PAGANUCCI